FOCUS – Plusieurs lignes électriques ont été incendiées dans la nuit du lundi 4 au mardi 5 avril 2022, sous le pont de Brignoud enjambant l’Isère, entre Villard-Bonnot et Crolles. Conséquences : plus de 5000 clients (foyers et entreprises) ont été privés d’électricité durant la nuit, tandis que la circulation a dû être coupée sur la RD10. Ce nouveau sinistre est survenu vingt-quatre heures après l’incendie ayant visé, la nuit précédente, un poste de RTE, à Froges, et ciblant la société STMicroelectronics. Deux actes pour lesquels les enquêteurs privilégient la piste d’activistes d’ultra-gauche. Du côté de la classe politique iséroise, les condamnations sont, elles, quasi unanimes.
[Article publié le 5 avril à 11 heures, dernière mise à jour le 8 avril à 10 heures]
Un nouvel incendie criminel en Isère ? Plusieurs lignes électriques ont été incendiées dans la nuit du lundi 4 au mardi 5 avril 2022, entre Villard-Bonnot et Crolles, dans le Grésivaudan. L’information, révélée par France Bleu Isère, a été confirmée par la préfecture ce mardi matin. Un acte qui survient après le sinistre ayant visé, la nuit précédente, un poste de RTE à Froges, et ciblant apparemment la société STMicroelectronics à Crolles.
Neuf lignes électriques ont été incendiées sous le pont de Brignoud qui franchit l’Isère sur la RD10, entre Villard-Bonnot et Crolles. © Département de l’Isère
Il était un peu moins d’1 heure du matin lorsque les pompiers ont été appelés pour un feu de câbles électriques sous le pont de Brignoud enjambant l’Isère sur la RD10, entre les communes de Villard-Bonnot et Crolles. Au total, neuf lignes électriques ont été brûlées : huit lignes moyenne tension de 20 000 volts et une ligne haute tension de 225 000 volts.
Plus de 5000 clients privés d’électricité durant la nuit, dont des entreprises comme Soitec et STMicroelectronics, « durement touchées »
« Un périmètre de sécurité a été instauré afin de prévenir tout risque pour les populations ou
l’environnement », indique la préfecture. Malgré d’importants dégâts constatés, « le feu est dorénavant éteint », rassure-t-elle ce mardi, en début d’après-midi.
Les pompiers, intervenus durant la nuit, ont réussi à maîtriser le feu, ce mardi 5 avril au matin (photo d’illustration). © Raphaëlle Denis – Place Gre’net
Au plus fort de l’incendie, durant la nuit, 5539 clients ont été privés d’électricité, principalement à Crolles et Bernin, dont quelque 3800 foyers ainsi que de nombreuses entreprises de la zone industrielle. Parmi ces dernières, STMicroelectronics et Soitec ont été « durement touchées par ces dégradations », souligne le procureur de la République de Grenoble Éric Vaillant.
« Si le montant du préjudice n’est pas encore connu, il pourrait se monter à plusieurs dizaines de millions d’euros », ajoute-t-il. Enedis a pu néanmoins rétablir le courant pour la plupart des foyers avant 6 h 30 et ce mardi, à 14 h 30, « seuls 350 clients restaient concernés, essentiellement des entreprises », précise la préfecture.
Coupures de circulation, déviations et bouchons ce mardi 5 avril
Autre conséquence, la circulation a dû être coupée dans les deux sens sur la RD10, au niveau du pont de Brignoud, fermé jusqu’à nouvel ordre après avoir subi une énorme montée en température. Un vrai casse-tête en prévision alors que ce pont voit habituellement passer quelque 27 000 véhicules par jour. Les expertises vont reprendre ce mercredi 6 avril afin de poursuivre l’évaluation des dégâts.
La circulation sur la RD10 est coupée dans les deux sens au niveau du pont de Brignoud, fermé jusqu’à nouvel ordre. © Google Maps (capture d’écran)
La sortie 24b de l’A41 en direction de Brignoud est également fermée. « Des déviations ont donc été mises en place par les RD 523, RD 165, RD 30 et RD 1090 via Le Versoud, Saint-Nazaire-Les-Eymes, Bernin et Crolles », explique la préfecture, qui invite les automobilistes à éviter le secteur.
Ces routes sont en effet très chargées, avec d’importants bouchons observés dans toute la zone ce mardi 5 avril. Illustration : on mettait ainsi, d’après France Bleu Isère, « trois heures pour faire 9 kilomètres », en début de matinée.
« La piste d’incendies volontaires imputables à l’ultra-gauche privilégiée » par le parquet
Aucune revendication n’a encore été publiée à ce stade. Mais pour les deux sinistres successifs, « la piste d’incendies volontaires imputables à l’ultra-gauche libertaire est évidemment privilégiée, compte tenu des inscriptions retrouvées, du mode opératoire et des précédents recensés sur le secteur », confirme Éric Vaillant.
Plusieurs tags, découverts sur les lieux de l’incendie du poste RTE de Froges, ciblaient en effet la société STMicroelectronics, dénoncée pour sa trop grande consommation d’électricité. L’entreprise, basée à Crolles, avait d’ailleurs enregistré une coupure temporaire d’alimentation électrique à la suite de l’incendie.
Le procureur a confié l’enquête à la Section de recherches de Grenoble, en co-saisine avec le groupement de gendarmerie de l’Isère. « Avisé des faits par mes soins, le parquet national antiterroriste ne s’est pas saisi des faits en l’état », ajoute-t-il.
Condamnation ferme pour Catherine Kamowki et Frédérique Puissat, demande de saisie du parquet national antiterroriste pour Jean-Pierre Barbier et Henri Baile
Dans un communiqué transmis ce mardi 5 avril, Catherine Kamowski, députée LREM de la cinquième circonscription de l’Isère, « condamne avec fermeté cet acte insensé qui a privé, et prive encore d’électricité, de nombreux de foyers dans ce secteur ». « Cet acte malveillant porte atteinte aussi bien à la vie privée et professionnelle de centaines d’habitants du Grésivaudan », poursuit-elle. « Il s’agit également d’une atteinte au bon déroulement des activités d’entreprises du secteur. »
Catherine Kamowski, députée LREM de la cinquième circonscription de l’Isère, « condamne avec fermeté un acte malveillant ». DR
De leur côté, Jean-Pierre Barbier et Henri Baile, présidents respectifs (LR) du Département et de la Communauté de communes Le Grésivaudan, ont également « condamné fermement ce nouvel acte criminel », dans un communiqué commun. Ils demandent que « le parquet national antiterroriste se saisisse de cette affaire ».
Le président du Département Jean-Pierre Barbier a lui aussi condamné, dans un communiqué commun avec Henri Baile, président de la Communauté de communes du Grésivaudan, un « acte criminel ». © Ilan Khalifa-Delclos – Place Gre’net
« Le Sud-Isère, et plus particulièrement la grande région grenobloise, est en effet la cible d’incendies volontaires réguliers depuis déjà plusieurs années, sans qu’aucun des auteurs de ces actes terroristes n’ait encore été appréhendé », déplorent les deux présidents. « L’impunité doit cesser », exigent-ils. Et Jean-Pierre Barbier et Henri Baile d’apporter « tout leur soutien aux habitants qui ont subi des coupures d’électricité », ainsi qu’à « la filière nanotechnologique » et « aux commerçants, TPE et PME, victimes directes des conséquences de cet incendie ».
La sénatrice Frédérique Puissat condamne elle aussi fermement l’incendie et appelle à ce que l’enquête aboutisse au plus vite. DR
Mêmes mots pour presque pour la sénatrice de l’Isère Frédérique Puissat (LR) qui, elle aussi, « condamne fermement le nouvel acte criminel ». Par ailleurs, elle « regrette que ces faits criminels stigmatisent de nouveau une attention négative sur la métropole grenobloise ». Par conséquent, la sénatrice espère que « l’enquête sur ces méfaits aboutisse rapidement et que leurs auteurs soient appréhendés et jugés au plus vite afin que la sérénité puisse enfin revenir sur le territoire ».
Le groupe Union de la gauche écologiste et solidaire espère « trouver une solution de déplacement pour les habitants du Grésivaudan »
La classe politique iséroise se montre quasi unanime face aux incendiaires, de la droite à la gauche. Le groupe Union de la gauche écologiste et solidaire (UGES) – émanation du Printemps isérois – au conseil départemental condamne ainsi lui aussi « avec la plus grande fermeté » le sinistre « apparemment volontaire », dans un communiqué envoyé ce mercredi 6 avril.
Les conseillers départementaux du groupe Union de la gauche écologique et solidaire (UGES), émanation du Printemps isérois, condamnent eux aussi fermement un « acte injustifiable ». © Ilan Khalifa-Delclos – Place Gre’net
« Cet acte malveillant a en partie détruit les lignes électriques qui passaient par ce pont et a causé une coupure de courant pour plus de 5 000 particuliers et entreprises » déplore le groupe UGES. « Les dommages causés sur le pont le rendent également impraticable pour plus de 27 000 usagers quotidiens. »
Les élus de gauche et écologistes anticipent ainsi les futures difficultés des nombreuses personnes résidant en rive gauche de l’Isère et travaillant à Crolles ou Bernin, habituées à emprunter chaque jour la RD10 et le pont de Brignoud. Ils apportent donc leur soutien aux équipes du Département « afin de trouver une solution de déplacement pour les habitantes et habitants du Grésivaudan, pénalisés par cet acte injustifiable ».
Pour Reconquête, « cet acte s’inscrit dans un contexte d’intimidations, de violences et d’agressions de la part de l’ultra gauche »
À l’autre bout de l’échiquier politique, Reconquête Isère se montre beaucoup plus virulent, faisant même l’amalgame entre extrême gauche et ultra-gauche. Illustration avec son communiqué de ce mercredi 6 avril, intitulé : « Agression de militants et incendie criminel du pont de Brignoud : il est temps de dire stop à l’extrême gauche. »
Le parti d’Éric Zemmour relie ainsi le sinistre avec une série d’événements survenus ces dernières semaines en Isère. « Cet acte s’inscrit hélas dans un contexte particulièrement tendu d’intimidations, de violences et d’agressions de la part de l’ultra gauche contre toutes les forces politiques qui lui déplaisent en France et plus spécifiquement sur l’agglomération grenobloise », affirme Reconquête. « Ainsi, après l’agression de Clément Chappet, candidat LR aux législatives sur un marché, c’est un militant LREM qui a été violenté il y a quelques jours seulement. »
Alexandre Lacroix, coordonnateur départemental de Reconquête ! Isère, dénonce les « exactions de l’ultra-gauche » en Isère. DR
« Pour ce qui concerne notre parti, outre des appels aux tabassages de nos militants fréquemment lancés par cette mouvance, ce n’est pas moins qu’un commando prétendument antifasciste qui est venu violenter une conférence privée que nous organisions la semaine dernière », ajoute le mouvement d’extrême droite. Avant d’appeler l’État à « diligenter une enquête sérieuse afin de trouver et de traduire en justice les personnes responsables de ces agissement ».
« En tant qu’élue de la Nation, ce qui ressemble à une nouvelle vendetta anti-technologie menée par la mouvance anarcho-libertaire dans le bassin grenoblois doit nous alerter quant au devenir de notre territoire », assène Émilie Chalas.
Enfin, la députée LREM de l’Isère Émilie Chalas a, comme tous les élus, « condamné avec fermeté » ces actes, avant de revenir sur la série de sinistres imputés à l’ultra-gauche, ces dernières années, en Isère. « En tant qu’élue de la Nation, ce qui ressemble à une nouvelle vendetta anti-technologie menée par la mouvance anarcho-libertaire dans le bassin grenoblois doit nous alerter quant au devenir de notre territoire », assène-t-elle.
Emilie Chalas, députée LREM de l’Isère, souligne la répétition de ces incendies volontaires dans le bassin grenoblois, depuis quelques années. © Corentin Bemol – Place Gre’net
« Incendies de plusieurs casernes de gendarmerie et de la Casemate en 2017, incendie de l’Église St Jacques à Grenoble, incendie des locaux de France Bleu Isère en 2019, incendie d’antennes-relais en mai 2020″, énumère la députée. « La liste des incendies volontaires perpétrés est longue. »
« Révoltée », Émilie Chalas rappelle en outre que « Grenoble connaît un nombre d’incendies volontaires trois fois plus important que dans d’autres villes de tailles similaires ». Et la députée, qui « redoute une nouvelle vague d’obscurantisme antisystème », de conclure : « J’appelle l’ensemble des responsables politiques à l’unité et à la mobilisation face à ces atteintes régulières aux institutions de la République et aux fondements de notre démocratie. »