FOCUS – Alain Carignon continue à labourer le terrain du mécontentement manifesté par certains Grenoblois. Après avoir demandé à Eric Piolle d’agir pour lutter contre les incivilités et la violence dans la ville, l’ancien maire de Grenoble a invité les habitants, ce jeudi 12 octobre, à venir « débattre de l’avenir du centre-ville, de sa dégradation, de son accessibilité et de la vie commerciale ».
Une petite centaine de personnes ont répondu à l’invitation d’Alain Carignon (LR), l’ancien maire de Grenoble, à venir débattre de l’avenir du centre-ville, de sa dégradation, de son accessibilité et de sa vie commerciale autour d’un apéritif devant le restaurant l’Épicurien, place aux Herbes.
Sous la halle, la moyenne d’âge avoisine les 60 ans et les conversations vont bon train tandis que sont servies les boissons de l’apéritif. Alain Carignon se déplace de groupe en groupe, saluant untel, plaisantant avec tel autre. On se retrouve entre amis et vieilles connaissances, le public semble acquis. En tout cas, pas de quoi déplaire à l’ancien édile qui surfe là sur sa notoriété passée et escompte bien occuper, voire regagner, une partie du terrain politique grenoblois. Un terrain qu’il n’a de cesse de labourer à travers le site du collectif Grenoble, le changement.
« Il y a trop de vélos ! On ne peut plus circuler sur les trottoirs ! »
Dans l’assistance ? Des retraités, des commerçants ou autres habitants venus là en curieux. Dans les conversations, dominent les thèmes récurrents dont le collectif fait habituellement son pain béni. Insécurité, saleté des rues et espaces verts, commerces en déclin, perte d’attractivité de la ville et Grenoble qui a perdu son renom.
« La ville est sale ; elle n’a jamais été dans cet état », « j’ai peur de me déplacer dans Grenoble », « tous les commerces ferment », « on ne peut plus circuler en ville » ou encore « il y a trop de vélos ! On ne peut plus marcher tranquillement sur les trottoirs ! », peut-on entendre au détour des conversations.
Le coupable ? Éric Piolle, le maire de Grenoble, diabolisé et responsable de tout ce qui précède. Quant aux centres d’intérêts des uns et des autres ainsi que les motivations qui les ont poussés à participer à ce temps d’échanges, elles sont diverses. Florilège.
« Une montée de la violence et de la délinquance reconnue par tout le monde »
Cette réunion d’échange n’est pas due au hasard, elle est programmée juste après la récente fusillade contre la devanture du magasin Instinct situé rue des Clercs qui a mis en émoi les riverains de la place Notre-Dame. Et suscité nombre de réactions. Notamment celle du conseiller régional Stéphane Gemmani ou encore des élus du Rassemblement de gauche et de progrès. Sans oublier ce même Alain Carignon qui s’était fendu d’un communiqué exhortant Éric Piolle à agir.
L’ancien ministre de la Communication estime que cet événement « a marqué un degré supplémentaire dans l’escalade de la violence » qui justifie qu’il soit nécessaire d’échanger avec la population.
« Il faut échanger avec les Grenoblois, faire remonter les informations. Grenoble est dans une situation très difficile. Il y a une montée de la violence et de la délinquance qui est reconnue par tout le monde : le procureur de la République, le juge pour enfants, les représentants des quartiers… », explique Alain Carignon. Et d’énumérer les causes présumées de cette violence. « La bétonisation de la ville, la ghettoïsation, la complaisance, le clientélisme électoral ont abouti à cette situation très grave », juge l’ex-ministre.
« Grenoble va évoluer vers un situation de type mafieux »
Alain Carignon n’en démord pas, c’est l’ensemble de la politique menée qui est à reprendre totalement. « Il ne faut pas que les élus actuels abandonnent la bataille avant de l’avoir livrée. Sinon, Grenoble va évoluer vers une situation de type mafieux. C’est ce qu’il faut stopper avant de renverser la vapeur », déclare-t-il. Et celui-ci de proposer une série de mesures qui seraient, à son sens, susceptibles d’endiguer de manière pérenne la montée de la délinquance à Grenoble.
Quant à l’éventuel retour d’Alain Carignon vers des responsabilités municipales – une question qu’il est légitime de se poser tant l’homme se montre actif et constamment sur la brèche –, c’est une réponse à la normande qu’il nous délivre.
« Je pense qu’il va falloir proposer une alternative forte avec des solutions […] J’y travaille avec beaucoup de collectifs de citoyens. Nous avançons beaucoup et nous progressons énormément. Mais cette alternance il ne faut pas que ce soit un robinet d’eau tiède, il faut des solutions innovantes et donc c’est pour ça qu’avec d’autres je vais les proposer », nous confie-t-il. Tout en écartant prudemment, de la pointe de la chaussure, l’idée que cette alternance… il pourrait peut-être bien l’incarner.
Joël Kermabon