REPORTAGE VIDÉO – L’annonce, vers 18 heures, de la décision du Conseil constitutionnel validant l’essentiel de la réforme des retraites a provoqué la colère des manifestants rassemblés sur la place de Verdun, ce vendredi 14 avril 2023. Quelques centaines de personnes sont alors parties en manifestation spontanée, déambulant jusqu’en début de soirée dans les rues de Grenoble. Une manifestante a par ailleurs été interpellée par la police, qui a fait massivement usage de gaz lacrymogènes.
Certains gardaient un petit espoir tandis que d’autres – la majorité – préféraient ne pas se bercer d’illusions, estimant les dés pipés d’avance. Tout au long de l’après-midi, ce vendredi 14 avril 2023, les manifestants ont afflué vers la place de Verdun pour y attendre l’avis du Conseil constitutionnel sur la réforme des retraites.
Ils étaient plusieurs centaines (300 selon la police) lorsque les syndicats ont pris la parole peu après 18 heures pour leur délivrer la mauvaise nouvelle : le Conseil constitutionnel venait de valider l’essentiel de la réforme.
© Joël Kermabon – Place Gre’net
Bien qu’attendue par beaucoup, la décision des Sages a été accueillie par les huées et les cris de colère. Mais nulle résignation chez les manifestants, plutôt un mélange de consternation et d’indignation ainsi qu’une rage décuplée. Idem au sein de l’intersyndicale dont les représentants ont pris tour à tour la parole pour asséner une même conviction : le combat continue, pas question d’abandonner maintenant.
La police a bloqué l’hyper-centre, une fois tombé l’avis du Conseil constitutionnel
De l’autre côté de la fontaine colorée de jaune, les plus jeunes et les militants libertaires, autonomes, antifascistes et de gauche radicale commençaient, eux, à sortir les K‑Way noirs, masques et lunettes de piscine, en prévision de l’inévitable manifestation sauvage à venir. Tous s’y préparaient avant de venir ici, convaincus, à l’image de Camille, que « le conseil constitutionnel allait donner raison au gouvernement ».
« C’était couru d’avance, on ne peut compter que sur nous, sur la lutte et sur la rue », lance le jeune homme, approuvé par tous ses camarades. Alors, après quelques palabres et un petit tour de la place de Verdun, le temps d’affiner la stratégie et trouver une brèche dans les rues quadrillées par la police, un cortège de plusieurs centaines de personnes – dont une majorité vêtues de noir et masquées – s’est élancé dans la rue Lesdiguières.
La police a gazé pour la première fois au bout d’une dizaine de minutes, lorsque les manifestants ont tenté de quitter la rue Lesdiguières pour emprunter la rue Casimir-Perrier. © Manuel Pavard – Place Gre’net
Du côté des forces de l’ordre, la réaction ne s’est pas fait attendre. En tournant dans la rue Casimir-Perrier, les manifestants se sont ainsi heurtés à un premier cordon de policiers qui ont aussitôt noyé l’artère sous les gaz lacrymogènes. La manifestation spontanée n’était alors partie que depuis une dizaine de minutes. Et le message des autorités était clair : interdiction de pénétrer dans l’hyper-centre.
Déluge de gaz lacrymogènes et jeu du chat et de la souris
Ce sera d’ailleurs le leitmotiv de ce défilé. Toutes les rues donnant accès au centre-ville étaient ainsi barrées par la police. Et chaque tentative de forcer le passage a suscité un gazage massif. Nouvelle illustration après le premier départ avorté. Après un retour sur la place de Verdun, puis un bref moment de flottement, le cortège a de nouveau emprunté la rue Lesdiguières, avant d’essuyer une seconde salve de grenades lacrymogènes à l’angle du boulevard Agutte-Sembat.
Des cordons de policiers bloquaient toutes les rues donnant accès à l’hyper-centre. © Manuel Pavard – Place Gre’net
Les manifestants se sont alors dirigés, via les petites rues, vers Chavant, puis vers les grands boulevards. Non sans avoir perdu au passage une petite partie d’entre eux. Les 150 à 200 personnes restantes ont ensuite longé les boulevards Maréchal-Joffre et Maréchal-Foch en entonnant des slogans anticapitalistes et anti-police, suivies de près par les policiers.
Quelques vitrines de banques et agences d’assurances ont été taguées, notamment sur les grands boulevards. © Manuel Pavard – Place Gre’net
Sur le trajet, quelques poubelles ont été incendiées et une poignée de vitrines – notamment de banques ou agences d’assurances – taguées ou détériorées. Mais globalement, incidents et dégradations sont restés relativement limités, en comparaison des autres défilés spontanés des précédentes semaines.
La police a fait massivement usage de gaz lacrymogènes pour disperser les manifestants, comme sur le boulevard Foch, en fin de manifestation. © Manuel Pavard – Place Gre’net
Soutenu par les klaxons d’automobilistes, le cortège est arrivé au croisement du boulevard Foch et des rues Colonel-Lanoyerie et Commandant-de-Reynies lorsque la police a décidé de sévir, noyant toute la zone sous un déluge de gaz lacrymogènes. Ce qui a eu pour conséquence de disperser les manifestants en plusieurs petits groupes. Un jeu du chat et de la souris s’est alors engagé entre ces derniers et les policiers.
Au moins une interpellation dans la confusion et la tension
Dans la confusion générale, une jeune femme a été interpellée et violemment projetée dans un fourgon de police, au carrefour du boulevard Foch et de la rue Général-Ferrié, sous les huées et les insultes de la foule présente. Selon les premiers éléments, cette manifestante aurait été arrêtée pour « outrage à personne dépositaire de l’autorité publique ». Le face-à-face tendu avec les forces de l’ordre s’est prolongé à cet endroit, tandis que certains militants tentaient de bloquer la circulation du tram C.
Vers 20 h 30, les policiers de la Compagnie départementale d’intervention (CDI), renforcés par la Brigade anticriminalité (Bac), ont finalement décidé de repousser et « escorter » les derniers groupes de manifestants disséminés aux alentours. Lesquels n’ont eu d’autres choix que de progressivement quitter les lieux… Mais avec une détermination et une rage intactes, tout en promettant de revenir très vite dans la rue.
1 réflexion sur « Réforme des retraites : des centaines de manifestants en colère à Grenoble contre la décision du Conseil constitutionnel »
Force aux manifestant·es, on lachera rien jusqu’au retrait du projet de loi !