FOCUS – Quelles réactions au niveau local suite aux annonces du président de la République Emmanuel Macron pour les quartiers populaires ? Le maire écologiste de Grenoble Éric Piolle, comme le sénateur Les Républicains de l’Isère Michel Savin, torpillent le discours de l’Élysée… Tandis que la députée En marche de l’Isère Émilie Chalas sort les crocs pour le défendre.
L’Élysée avait prévenu : Emmanuel Macron ne présenterait pas de “Plan banlieue” à l’occasion de son « évènement de mobilisation pour les quartiers » organisé le 22 mai. Le président de la République a ainsi préféré mettre en avant une méthode, et formulé des annonces qui n’ont pas manqué de faire réagir les élus, au niveau national… comme local.
Sans surprise, le maire de Grenoble Éric Piolle ne s’est pas privé d’exprimer sa déception. Création d’une Agence nationale de cohésion des territoires, plan de lutte contre le trafic de drogues, signalisation aux municipalités des personnes fichées S présentes sur leur territoire… Autant d’annonces bien éloignées du plan que Jean-Louis Borloo avait présenté le 26 avril, dont l’édile grenoblois avait déclaré souhaiter « la pleine application ».
« On connaît les choix qui ont été faits par le président Macron, c’est la “start-up nation” versus “ceux qui ne sont rien” », dénonce Éric Piolle dans les colonnes du Dauphiné libéré. Avant de critiquer une vision « parisienne » de la question des banlieues. « À Grenoble, on n’a pas de banlieue telle que les Parisiens l’imaginent, avec de grands ensembles où il n’y a rien. » Et celui-ci de mettre en avant les services publics présents dans les quartiers ou leur tissu associatif comme autant de « richesses » et de « piliers solides ».
« Un nouveau plan de com” », juge le sénateur Michel Savin
À droite de l’échiquier politique, la réaction n’est pas plus tendre. Le sénateur Les Républicains de l’Isère Michel Savin défend à son tour un plan Borloo, « salué par tous », et voit dans le discours du président de la République un « nouveau plan de com” ». Aucun doute pour le parlementaire isérois : « L’ampleur de la crise que traversent aujourd’hui les banlieues n’est pas comprise. »
Au final, Michel Savin reproche à Emmanuel Macron d’avoir repris des annonces déjà formulées auparavant, notamment la mise en place d’une police de sécurité du quotidien, un dispositif dont Grenoble ne bénéficiera pas. Des annonces auxquelles s’ajoutent, selon le sénateur, « des mesures cosmétiques qui ne résoudront rien », sans explications de financement, et dans un contexte de rupture de confiance avec les collectivités.
Citant une récente agression de CRS à Grenoble, Michel Savin estime enfin « les signaux envoyés par le président de la République […] bien loin des attentes des acteurs locaux, qui agissent chaque jour de plus en plus difficilement sur les territoires ». Et de conclure : « Indiquant avoir besoin des acteurs locaux, Emmanuel Macron fait fausse route : ce sont les acteurs locaux qui ont plus que jamais besoin de signaux forts de l’État. »
La déception de Brahim Rajab, directeur du Prunier sauvage
Quelles réactions précisément du côté des acteurs locaux ? Brahim Rajab, le directeur du lieu de vie culturelle de la Villeneuve le Prunier sauvage n’a pas caché sa déception face au discours du président de la République. Membre de la délégation iséroise qui a accompagné le 22 mai à l’Élysée la députée En marche de la troisième circonscription de l’Isère Émilie Chalas, il était aux premières loges.
« Pour Emmanuel Macron, tout passe par la compétitivité, l’emploi et un peu de sécurité », écrit-il ainsi sur Facebook, regrettant notamment qu’il ne soit « nullement question de culture ». Pour Brahim Rajab, « la seule réponse de l’épanouissement par le capital ne suffira pas » face à une société qu’il juge « de plus en plus fragmentée ». Et le directeur du Prunier sauvage d’appeler à « faire preuve de créativité pour permettre à tous d’être reconnus dans leurs droits culturels ».
La députée En marche Émilie Chalas sort les crocs
Face aux critiques, la députée Émilie Chalas sort les crocs. Dans un communiqué « en réponse aux partisans du statu quo sur la politique de la ville », la parlementaire iséroise dit regretter que « certains commentateurs préfèrent jouer la carte de la polémique stérile ». Une attitude qui « ne témoigne pas d’une véritable envie de faire », considère-t-elle.
Pour Émilie Chalas, les critiques cultivent l’art de la caricature. Et ceci en s’attaquant à la réforme du logement social, « qui vise pourtant à débloquer la construction de logements », en qualifiant « toute action en faveur de la création d’emplois comme étant une politique “pour les riches” » ou encore en « méprisant les créateurs de start-up, pourtant nombreux dans les quartiers ».
La Ville de Grenoble dans le viseur
Et la députée d’égratigner tout particulièrement Éric Piolle. D’une part, en rappelant la fermeture de bibliothèques municipales de Grenoble situées dans des quartiers populaires, une décision qui démontrerait « qu’il n’y a pas de finances magiques ». D’autre part, en invitant la Ville à prendre ses responsabilités en matière de sécurité. Un sujet que le maire de Grenoble « esquiverait » en répondant aux habitants concernés : « la sécurité, c’est pas moi, c’est l’État. »
Émilie Chalas se veut enfin le relais de l’appel du président de la République à la « mobilisation générale » en faveur des quartiers. Afin, conclut-elle, que « tous les acteurs contribuent à repenser l’approche collective de la politique de la ville et prennent leurs responsabilités pour répondre concrètement aux besoins de nos concitoyens des quartiers les moins favorisés ».