Quartier de la Villeneuve à Grenoble. DR

Durant une semaine, la Villeneuve de Grenoble pré­sente « sa » vision de la transition

Durant une semaine, la Villeneuve de Grenoble pré­sente « sa » vision de la transition

FOCUS – Tandis que la Ville de Grenoble lance la pre­mière édi­tion de la bien­nale Villes en tran­si­tion, le quar­tier popu­laire de la Villeneuve a concocté, qua­si­ment sur la même période, à savoir du mardi 7 au samedi 11 mars inclus, la Semaine de la tran­si­tion, avec cinq jours de débats, ate­liers et actions. Risque de dou­blon­ner avec la bien­nale offi­cielle ? Loin s’en faut. Pour David-Gabriel Bodinier, l’un des orga­ni­sa­teurs de l’é­vé­ne­ment, il s’a­git de rap­pe­ler que la vraie tran­si­tion est d’a­bord démo­cra­tique et doit impli­quer les quar­tiers. Pour ce mili­tant de la Villeneuve, il est clair qu’elle exclut toute solu­tion para­chu­tée – sans l’a­vis des citoyens – du type « smart city », « métro­po­li­sa­tion » et « démo­li­tions » de loge­ments sociaux.

Affiche de "La semaine de la transition", organisée par le quartier de la Villeneuve du mardi 7 au samedi 11 inclus 2017

Affiche de la Semaine de la tran­si­tion, orga­ni­sée par le quar­tier de la Villeneuve du mardi 7 au samedi 11 inclus 2017

« La tran­si­tion ne peut pas se faire sans nous » mar­tèlent les très nom­breux coor­ga­ni­sa­teurs et par­te­naires de la Semaine de la tran­si­tion à la Villeneuve, dans un texte qui expose les rai­sons de cette manifestation.

Car de quoi s’agit-il pen­dant ces cinq jours bien rem­plis ? De mon­trer à voir com­ment la tran­si­tion s’incarne sur un ter­ri­toire et de réflé­chir à com­ment elle peut encore aller plus loin…

« De Saillans à la Villeneuve : la démo­cra­tie au fon­de­ment de la tran­si­tion » Autant dire que le thème de la soi­rée d’ouverture, en par­te­na­riat avec le Crieur de la Villeneuve, donne le la. Puis, durant cinq jours vont s’enchaîner work­shops, ate­liers, dis­cus­sions, débats, sémi­naires, tou­jours sur un mode très par­ti­ci­pa­tif, tan­tôt autour de sujets pra­tiques, telle l’économie cir­cu­laire des objets quo­ti­diens, tan­tôt polé­miques comme le refus des démo­li­tions de loge­ments sociaux à la Villeneuve, ou encore pros­pec­tifs, à l’ins­tar du sémi­naire du ven­dredi matin sur « les com­muns ter­ri­to­riaux » et « les condi­tions démo­cra­tiques de la tran­si­tion métro­po­li­taine ».

2èmes Rencontres de géopolitique critique du 8 mars au 11 mars 2017

2es Rencontres de géo­po­li­tique cri­tique du 8 mars au 11 mars 2017. Consulter le pro­gramme complet

A noter que la Semaine s’articule avec Les deuxièmes ren­contres de géo­po­li­tique cri­tique sur le droit à la ville (sorte d’alternative au Festival de géo­po­li­tique autour du pou­voir des villes orga­nisé par Grenoble École de mana­ge­ment, par­te­naire de la Biennale).

Le jour de clô­ture de l’événement, le samedi 11 mars, les orga­ni­sa­teurs invitent les par­ti­ci­pants à mar­cher vers la Biennale offi­cielle (départ à 15 h 30 de la Villeneuve) jusqu’à la Belle élec­trique.

Pour par­ti­ci­per au débat orga­nisé par le Monde sur la frac­ture urbaine ? Point du tout. Pour débattre du fameux linky sur le par­vis de l’équipement cultu­rel. A quelques mètres de la Biennale, mais tou­jours en marge…

Pourquoi le quar­tier de la Villeneuve s’est-il mis en tête d’organiser une Semaine de la tran­si­tion, en paral­lèle de la Biennale officielle ?

David-Gabriel Bodinier : Vis-à-vis de la bien­nale, on va dire « offi­cielle », cha­cun se posi­tionne comme il l’en­tend. On n’a pas une ligne où l’on dit : « C’est bien ou c’est mal ». On n’est pas du tout dans ce type de juge­ment moral ! […]. Après, c’est à cha­cun de s’en saisir […]

David-Gabriel Bodinier, socio-urbaniste, membre de l’Atelier populaire d’urbanisme (Apu). Il est coauteur du livre « Plaidoyer pour Villeneuve". © Séverine Cattiaux – Place Gre’net

David-Gabriel Bodinier, socio-urba­niste, membre de l’Atelier popu­laire d’urbanisme (Apu). Il est coau­teur du livre « Plaidoyer pour Villeneuve ». © Séverine Cattiaux – Place Gre’net

Nous, on n’imaginait pas sélec­tion­ner une action parmi un foi­son­ne­ment d’initiatives à la Villeneuve pour l’inscrire au pro­gramme « offi­ciel » […] La tran­si­tion, c’est en outre une démarche qui a du sens par ses dif­fé­rentes entrées, qui néces­site plu­sieurs sortes d’actions… On ne pou­vait donc pas, par exemple, mettre l’accent sur la tran­si­tion urbaine et pas sur la tran­si­tion démo­cra­tique, alors qu’on pense jus­te­ment que c’est parce qu’il y a des tran­si­tions démo­cra­tiques qu’on peut réflé­chir aux tran­si­tions urbaines […].

Et, à la fois, le plus impor­tant c’est que tout cela s’incarne sur le ter­ri­toire, qu’on ne dis­cute pas juste dans des salons : « Ce serait bien de faire comme ceci… ». Oui bien sûr que tout le monde est d’accord pour l’ac­cès à une meilleure ali­men­ta­tion, que glo­ba­le­ment on consomme moins d’énergie […]

Fête des moissons à la Villeneuve. © Yuliya Ruzhechka - Place Gre'Net

Fête des mois­sons à la Villeneuve. © Yuliya Ruzhechka – Place Gre’net

Par contre, ces alter­na­tives-là, il faut qu’elles puissent s’incarner sur le ter­ri­toire, et trans­for­mer le ter­ri­toire. Et c’est là toute la dif­fi­culté, en par­ti­cu­lier dans les quar­tiers populaires.

Or l’enjeu est que les ques­tions de tran­si­tion ne viennent pas aggra­ver les dif­fi­cul­tés. Grosso modo qu’il n’y ait pas, d’un côté, des per­sonnes qui mangent bio, et puis que de l’autre, la majo­rité conti­nue à aller à Lidl, parce que c’est moins cher […] Tout cela pour nous est extrê­me­ment impor­tant depuis très long­temps. Les alter­na­tives, oui, mais avant tout les alter­na­tives avec les quar­tiers. C’est là où les gens sont le plus impac­tés par les inéga­li­tés. Et donc ça paraît évident que c’est avec les quar­tiers qu’il faut réflé­chir aux alter­na­tives, sinon on risque de les augmenter…

La Semaine de la tran­si­tion n’est certes pas com­plè­te­ment une « contre Biennale ». Pour autant, la vision de la tran­si­tion de la Villeneuve n’est pas vrai­ment celle dans laquelle s’embarquent les villes en France, ni Grenoble…

D‑GB : Oui il y a des dif­fé­rences. La ques­tion de « smart city », on s’y refuse… Ce modèle de la smart city est porté par un cer­tain nombre d’entreprises de la Presqu’île scien­ti­fique.

Le nouveau compteur électrique communicant d'ERDF est contesté. A Grenoble, un collectif réclame un référendum. Crédit ERDF

Linky, le nou­veau comp­teur élec­trique com­mu­ni­cant d’ERDF est contesté. A Grenoble, un col­lec­tif réclame un réfé­ren­dum. © ERDF

Et clai­re­ment on pense que ce sont de fausses bonnes solu­tions. On sait très bien que ceux qui aujourd’hui apportent des “solu­tions” étaient les cli­mato-scep­tiques d’hier. Que ce sont toute une série de lob­byings inter­na­tio­naux qui ont freiné les démarches de trans­for­ma­tion pour essayer de résoudre la ques­tion du cli­mat, qui pré­tendent aujourd’­hui avoir des solu­tions, et qui sur­tout cherchent à faire du profit…

Il y a aussi, la ques­tion de la « métro­po­li­sa­tion » qui est à l’œuvre par­tout en France. On y est oppo­sés, parce qu’il y a d’autres modèles qui existent, comme celui exploré par le réseau des ter­ri­to­ria­listes qui seront pré­sents. Ils réflé­chissent à une alter­na­tive à par­tir des tra­vaux d’un Italien qui s’appelle Alberto Magnani, qui a tra­vaillé sur le concept de « bio­ré­gion ».

En gros la « métro­po­li­sa­tion », c’est le pro­ces­sus de domi­na­tion des ter­ri­toires à par­tir des villes-centres et des classes supé­rieures de ces villes, qui affirment : « Les enjeux ne se situent pas à l’échelle de la ville mais de la métro­pole, nous savons de quels enjeux il s’agit et nous allons pro­po­ser des solu­tions face à ces enjeux. » Et ils le font du coup de manière tech­no­cra­tique et non pas démo­cra­tique… C’est comme ça qu’on a, aujourd’hui, un pro­gramme local de l’habitat (PLH) et un plan local d’urbanisme inter­com­mu­nal (PLUI) dont per­sonne n’a jamais entendu parler.

Aussi mobi­lisé que l’est mani­fes­te­ment le quar­tier de la Villeneuve, peut-il réus­sir sa tran­si­tion sans la force publique ?

David-Gabriel Bodinier. © Séverine Cattiaux – placegrenet.fr

David-Gabriel Bodinier. © Séverine Cattiaux – pla​ce​gre​net​.fr

D‑GB : On est très conscients que non. Et c’est d’ailleurs le thème de la soi­rée finale « Du droit à la Ville au nou­veau muni­ci­pa­lisme ». On sait qu’il y a une série d’enjeux qui ne peuvent pas juste venir de la mobi­li­sa­tion de mou­ve­ments sociaux. Donc oui, c’est tout-à-fait impor­tant qu’il y ait des nou­velles muni­ci­pa­li­tés qui émergent, comme Barcelone ou Grenoble.

Après, quelles alliances opèrent-elles avec les mou­ve­ments sociaux ? A Grenoble, elles font défaut… Un cer­tain nombre de reven­di­ca­tions, comme la non démo­li­tion des loge­ments sociaux, mais aussi la ques­tion du droit au loge­ment, et la réqui­si­tion des bâti­ments vides ne sont pas pour le moment des dos­siers dont s’est empa­rée la Ville de Grenoble.

Séverine Cattiaux 

Séverine Cattiaux

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