CHRONIQUE – Place Gre’net s’associe à la radio RCF Isère chaque lundi midi dans la chronique L’Écho des médias. Notre objectif ? Revenir sur une actualité, décrypter une information… ou révéler les coulisses du traitement d’une nouvelle. Pour cette chronique sur RCF épisode 119 du lundi 2 juin 2025, retour sur la subvention perdue du festival Bien l’Bourgeon.
Aujourd’hui, nous allons parler d’un festival… et d’une subvention. Car durant ce week-end de l’Ascension se déroulait la 8e édition du festival isérois Bien l’Bourgeon. Et cette édition s’est accompagnée d’une petite polémique autour d’un retrait de subvention. En l’occurrence, celle du Conseil départemental de l’Isère, décidée en avril 2025 à l’occasion d’une commission permanente.
Ce retrait de subvention serait lié à la programmation du festival. Le Département ne l’a toutefois pas confirmé. Il s’est borné à répondre que « les organes délibérants des collectivités territoriales apprécient souverainement les subventions qu’ils entendent accorder dans le cadre de leurs compétences ». Ce qui est purement factuel mais ne nous apprend pas grand chose !
La programmation de Médine pose question
De toute évidence, c’est la programmation en tête d’affiche du rappeur Médine qui a provoqué le retrait de la fameuse subvention. Médine est, en effet, un artiste qui divise. Pour certains, il s’est rendu coupable de propos antisémites ou homophobes et serait porteur d’une idéologie violente. Pour d’autres, il est au contraire un fer de lance de la lutte contre le racisme et serait avant tout la cible des islamophobes de tout poil.
Si le débat se pose, Médine a tenu des propos très contestables, dont il s’est expliqué et excusé dans certains cas. Sa chanson Don’t Laïk, sortie peu avant les massacres de Charlie-Hebdo en 2015, pose clairement question.
Il y appelle, entre autres, à « crucifier les laïcards », ou prône la « religion pour les francs-maçons » et le « catéchisme pour les athées ». Là encore, le rappeur assure avoir voulu critiquer un « laïcisme anti-religion » et a concédé être allé trop loin dans la provocation.
Mais la question va au-delà de l’idéologie. Car l’association Mix’arts, qui organise Bien l’Bourgeon, considère que le Département n’a pas à s’immiscer dans la programmation d’un festival, et encore moins à la sanctionner. Cette décision, à ses yeux, s’oppose à la liberté de création, et serait peut-être même illégale.
L’empreinte politique du festival
Quoi qu’il en soit, Bien l’Bourgeon est un festival se revendiquant aussi politique et engagé, au même titre que l’association Mix’arts qui, rappelons-le, figure parmi les organisateurs du Mois décolonial à Grenoble.
L’empreinte politique est d’ailleurs très marquée dans les réactions face au retrait de la subvention. Si de nombreuses voix critiquent la majorité de droite du Département, certaines en profitent aussi pour régler des comptes. LFI tape ainsi sans retenue sur le PS, et le groupe d’opposition départemental IES attaque ses collègues du groupe Uges. Tout cela au nom de la culture, évidemment !
Certaines réactions peuvent aussi sembler paradoxales. Par exemple, celle du sénateur Guillaume Gontard qui critiquait la présence de Médine à l’université d’été des écologistes en 2023, mais vante aujourd’hui les “positions antiracistes” du rappeur.
Par ailleurs, certaines organisations qui soutiennent Bien l’Bourgeon exigeaient en 2023 l’interdiction du concert en Isère d’un autre rappeur, Millesime K, coupable de « ne pas cacher ses positions d’extrême droite ». Tout porte donc à croire que la liberté de création est à géométrie variable.
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