DÉCRYPTAGE – À l’ap­proche du pre­mier tour des légis­la­tives, qui se tient ce dimanche 12 juin 2022, les jeux semblent très ouverts dans la 2^e cir­cons­crip­tion de l’Isère. Bastion de la gauche depuis le début des années 1970, le ter­ri­toire avait été emporté par la vague macro­niste en 2017. Mais Cyrielle Chatelain, inves­tie par la Nupes, espère reprendre la cir­cons­crip­tion au député LREM sor­tant Jean-Charles Colas-Roy, qui brigue sa propre suc­ces­sion. La can­di­date éco­lo­giste devra cepen­dant comp­ter avec des can­di­da­tures de gauche concur­rentes. Et à droite, Les Républicains et le Rassemblement natio­nal – qui s’é­tait hissé au second tour il y a cinq ans – sont en embuscade.

Le duel annoncé entre Ensemble¹La coa­li­tion de la majo­rité pré­si­den­tielle regrou­pant Renaissance (ex-LREM), le Modem et Horizons (le parti d’Édouard Philippe) et la Nouvelle union popu­laire éco­lo­gique et sociale (Nupes)²L’alliance des gauches ras­sem­blant La France insou­mise, EELV, le PCF et le PS aura-t-il lieu dans la 2^e cir­cons­crip­tion de l’Isère ? C’est l’un des grands enjeux du pre­mier tour des légis­la­tives dans cette cir­cons­crip­tion du sud de l’ag­glo­mé­ra­tion gre­no­bloise, qui compte à la fois parmi les plus petites et les plus peu­plées du dépar­te­ment. Un ter­ri­toire hété­ro­gène englo­bant les deuxième et troi­sième villes isé­roises, Saint-Martin-d’Hères et Échirolles, sym­boles de la « cein­ture rouge » gre­no­bloise, mais aussi les com­munes rurales du can­ton de Vizille.

La 2^e cir­cons­crip­tion regroupe les can­tons d’Échirolles Est, Echirolles Ouest, Eybens, Saint-Martin-d’Hères Nord, Saint-Martin-d’Hères Sud et Vizille (moins la par­tie de la com­mune de Chamrousse). © Goultard59 / Wikimedia Commons

Historiquement, la 2^e cir­cons­crip­tion était un bas­tion de la gauche depuis 1973. Elle a ainsi élu sans dis­con­ti­nuer des dépu­tés PS et PCF durant qua­rante-quatre ans, avec notam­ment les longs man­dats d’Hubert Dubedout, Gilbert Biessy et Michel Issindou. Mais, en 2017, celle-ci a été empor­tée par la vague macro­niste qui a déferlé sur l’Isère et une bonne par­tie de la France, et porté à l’Assemblée natio­nale le « mar­cheur » Jean-Charles Colas-Roy.

Michel Issindou est le der­nier des quatre dépu­tés de gauche qui se sont suc­cédé sans dis­con­ti­nuer de 1973 à 2017 dans la 2^e cir­cons­crip­tion de l’Isère. © Sln38 / Wikimedia Commons

Comble de l’hu­mi­lia­tion pour la gauche : elle a échoué aux portes du second tour, étant par­tie for­te­ment divi­sée – avec Taha Bouhafs (LFI), David Queiros (PCF) et des can­di­dats PS et EELV. Un épar­pille­ment des voix dont a pro­fité Alexis Jolly, can­di­dat du Front natio­nal, pour se qua­li­fier face à son adver­saire LREM. Lequel s’est ensuite imposé lar­ge­ment, avec plus de 73 % des suf­frages.

Jean-Charles Colas-Roy veut « don­ner une majo­rité à Emmanuel Macron »

Cinq ans après, pour­tant, les cartes sont rebat­tues et les jeux semblent plus ouverts que jamais. Réinvesti par la majo­rité pré­si­den­tielle, Jean-Charles Colas-Roy brigue sa propre suc­ces­sion et ten­tera de sur­fer sur la réélec­tion d’Emmanuel Macron. Le député sor­tant le rap­pelle d’ailleurs presque quo­ti­dien­ne­ment sur les réseaux sociaux : « Face aux extrêmes, don­nons une majo­rité à Emmanuel Macron, pour une France forte et res­pec­tueuse des ins­ti­tu­tions répu­bli­caines. »

Le député LREM sor­tant Jean-Charles Colas-Roy, investi par Ensemble, bri­guera un second man­dat consé­cu­tif. DR

En sep­tembre 2018, le député de l’Isère avait can­di­daté, sans suc­cès, à la pré­si­dence de groupe LREM. Puis, can­di­dat à la pré­si­dence de la com­mis­sion Développement durable à l’Assemblée natio­nale, il n’avait pas fait le poids face à Barbara Pompilii, rééluée dès le pre­mier tour le 23 juillet 2019.

Et, comble de mal­chance, sa per­ma­nence avait été murée fin décembre 2018 à Échirolles par les Jeunes agri­cul­teurs de l’Isère qui contes­taient le vote d’une aug­men­ta­tion de plus de 70 % de la rede­vance pour pol­lu­tions dif­fuses. Le député Jean-Charles Colas-Roy fai­sait en effet par­tie des votants en faveur de la loi.

La per­ma­nence par­le­men­taire de Jean-Charles Colas-Roy, à Echirolles, avait été murée, en décembre 2018, par les Jeunes agri­cul­teurs de l’Isère, qui contes­taient le vote d’une hausse de plus de 70 % de la rede­vance pour pol­lu­tions dif­fuses. © Jeunes agri­cul­teurs de l’Isère

Son bilan en tant que député LREM ? La loi Hydrocarbures, qu’il a défen­due en tant que rap­por­teur. Alors que Nicolas Hulot pré­voyait d’interdire, d’ici 2040, toute pro­duc­tion d’hydrocarbures sur le ter­ri­toire fran­çais, celle-ci a per­mis d’octroyer aux indus­triels des auto­ri­sa­tions pour explo­rer les gise­ments d’hydrocarbures via des per­mis de recherche, ou pour les exploi­ter via des conces­sions, nou­velles ou pro­lon­gées. Le député de l’Isère a aussi été auteur d’une pro­po­si­tion de loi visant à lut­ter contre la mort subite et à sen­si­bi­li­ser la popu­la­tion aux gestes qui sauvent, adop­tée le 3 juillet 2020.

Quelles sont ses chances d’être réélu en tant que député ? L’équation com­porte une nou­velle don­née en 2022. Une incon­nue en cinq lettres : Nupes. À l’é­chelle natio­nale comme dans la cir­cons­crip­tion, la gauche a en effet joué la carte de l’u­nité, tirant les leçons de cer­taines erreurs pas­sées. Investie par la Nupes, l’é­co­lo­giste Cyrielle Chatelain, habi­tante d’Eybens et col­la­bo­ra­trice à la Métropole de Lyon, est donc sou­te­nue par un atte­lage ras­sem­blant LFI, EELV, PCF et PS.