La préfecture de l'Isère annonce déférer devant le tribunal administratif l'arrêté anti-remise à la rue adopté par la Ville de Grenoble.

La pré­fec­ture de l’Isère demande l’an­nu­la­tion de l’ar­rêté anti-remise à la rue de la Ville de Grenoble

La pré­fec­ture de l’Isère demande l’an­nu­la­tion de l’ar­rêté anti-remise à la rue de la Ville de Grenoble

EN BREF — La pré­fec­ture de l’Isère annonce défé­rer devant le tri­bu­nal admi­nis­tra­tif l’ar­rêté anti-remise à la rue adopté par la Ville de Grenoble le 22 mai. Et fait valoir les « efforts consi­dé­rables » déployés par l’État en matière de loge­ment et d’hé­ber­ge­ment sur le dépar­te­ment, tout en rap­pe­lant la mise en place du plan Logement d’a­bord sur le ter­ri­toire de la Métropole.

L’annonce n’a rien d’une sur­prise : la pré­fec­ture de l’Isère fait savoir qu’elle défère devant le tri­bu­nal admi­nis­tra­tif l’ar­rêté muni­ci­pal adopté par la Ville de Grenoble inter­di­sant toute expul­sion non assor­tie de pro­po­si­tion de relo­ge­ment ou d’hé­ber­ge­ment. Issu d’un vœu pré­senté par le groupe Ensemble à gauche, l’ar­rêté avait été approuvé lors du conseil muni­ci­pal du 13 mai 2019 et pro­mul­gué neuf jours plus tard, le mer­credi 22 mai.

Denis Besle, président du tribunal administratif de Grenoble. Le TA devra décider de la légalité ou non de l'arrêté adopté par la Ville de Grenoble. © Patricia Cerinsek - Place Gre'net

Denis Besle, pré­sident du tri­bu­nal admi­nis­tra­tif de Grenoble. Le TA devra déci­der de la léga­lité ou non de l’ar­rêté adopté par la Ville de Grenoble. © Patricia Cerinsek – Place Gre’net

« Dans le cadre du contrôle de léga­lité qu’il exerce sur les actes des col­lec­ti­vi­tés ter­ri­to­riales, le
pré­fet de l’Isère a déféré cet arrêté au tri­bu­nal admi­nis­tra­tif pour annu­la­tion », indique la pré­fec­ture. Pour quelle rai­son ? « Il n’est […] pas dans les pou­voirs du maire de faire obs­tacle à la déci­sion de jus­tice qui consti­tue le fon­de­ment de la pro­cé­dure d’expulsion », écrit-elle. Une « remise en cause des pou­voirs du juge » que les ser­vices de l’État jugent irrégulière.

Un arrêté illégal ?

« Le pré­fet déplore d’autant plus la déci­sion de la com­mune que plu­sieurs arrê­tés muni­ci­paux, au contenu simi­laire, ont déjà été jugés illé­gaux par la juri­dic­tion admi­nis­tra­tive au cours de ces der­nières années », ajoute la pré­fec­ture. Et de citer l’exemple de douze muni­ci­pa­li­tés com­mu­nistes de Seine-Saint-Denis, dont les arrê­tés anti-expul­sions adop­tés au début des années 2010 avaient tous été annu­lés par la justice.

Pour Alan Confesson, le libellé même de l'arrêté lui permet d'entrer dans les clous de la légalité. © Séverine Cattiaux - Place Gre'net

Pour Alan Confesson, le libellé même de l’ar­rêté lui per­met d’en­trer dans les clous de la léga­lité. © Séverine Cattiaux – Place Gre’net

Durant le conseil muni­ci­pal de Grenoble du 13 mai, l’élu Alan Confesson jugeait pour­tant que l’ar­rêté pro­posé n’é­tait pas un simple arrêté anti-expul­sion pro­mis à annu­la­tion. Mais qu’il entrait au contraire dans les clous de la léga­lité, en impo­sant « une solu­tion effec­tive, décente et adap­tée de loge­ment ou le cas échéant d’hébergement ». Récemment annulé par le TA de Lyon, un arrêté adopté par la com­mune de Vénissieux usait tou­te­fois de termes simi­laires.

Une annu­la­tion à venir ? Cela ne fait aucun doute aux yeux du groupe d’opposition Réussir Grenoble, pour qui le maire de Grenoble « ins­tru­men­ta­lise la misère » à des fins poli­ti­ciennes. Tandis que les mili­tants de Droit au loge­ment 38 appellent, de leur côté, l’en­semble des 49 com­munes du ter­ri­toire métro­po­li­tain à adop­ter un arrêté simi­laire, pré­ci­sé­ment dans le but de faire pres­sion sur les ser­vices de la préfecture.

Le pré­fet met en avant les « efforts consi­dé­rables » de l’État

Visiblement piqué au vif, le pré­fet de l’Isère assure pour sa part « mettre tout en œuvre pour limi­ter les expul­sions des per­sonnes les plus dému­nies ». « Les expul­sions n’arrivent qu’en der­nier recours d’un tra­vail social impor­tant, mar­qué par une recherche active de solu­tions avec les ménages concer­nés », écrit ainsi la pré­fec­ture, tout en van­tant les « efforts consi­dé­rables » four­nis pour assu­rer un loge­ment ou un héber­ge­ment aux per­sonnes en situa­tion de précarité.

Lionel Beffre et Eric Piolle. © Yuliya Ruzhechka - Place Gre'net

Lionel Beffre et Eric Piolle. © Yuliya Ruzhechka – Place Gre’net

Parmi ces efforts : « 1 016 places en centre d’hébergement et de réin­ser­tion sociale [et] plus de 1 300 places d’hébergement d’urgence pérenne […] ouvertes aujourd’hui en Isère », aux­quelles s’a­joutent plus de 500 place, dans le cadre du dis­po­si­tif hiver­nal. De plus, chiffre encore la pré­fec­ture, « 2 124 loge­ments sociaux ont été agréés par les ser­vices de l’État en Isère en 2018, après 1 969 loge­ments en 2017 et 2 182 loge­ments en 2016 ».

Lionel Beffre conclut en men­tion­nant encore la mise en place du Plan Logement d’a­bord sur le ter­ri­toire métro­po­li­tain. Bref, pour le pré­fet de l’Isère, les ser­vices de l’État « tra­vaillent en étroite rela­tion avec les col­lec­ti­vi­tés ter­ri­to­riales afin de pri­vi­lé­gier des solu­tions pérennes de retour au loge­ment pour ceux dont la situa­tion admi­nis­tra­tive le per­met, plu­tôt qu’une mul­ti­pli­ca­tion des réponses d’hébergement de court terme ».

Florent Mathieu

Florent Mathieu

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