DÉCRYPTAGE – Sur le pla­teau du Vercors, la polé­mique fait rage face aux pro­jets immo­bi­liers por­tés par Tony Parker et ses asso­ciés. À la Côte 2000, sur la com­mune de Villard-de-Lans, les oppo­sants à l’Ananda Resort ont atta­qué en jus­tice l’é­change de par­celles entre la ville et la Société des remon­tées méca­niques de Villard-Corrençon (SEVLC), déte­nue par l’an­cien bas­ket­teur via sa société Infinitiy Nine Mountain. Quant au pro­jet du hameau des Arolles, à Corrençon-en-Vercors, celui-ci devra faire l’ob­jet d’une nou­velle éva­lua­tion envi­ron­ne­men­tale por­tant sur l’en­semble de la sta­tion et pre­nant donc en compte les deux dos­siers. Des sujets dont l’as­so­cia­tion Vercors Citoyens a débattu lors d’une réunion publique orga­ni­sée mardi 20 février 2024, à Villard-de-Lans.

Techniquement, son nom n’est direc­te­ment asso­cié qu’au futur com­plexe hôte­lier prévu à la Côte 2000. Pourtant, l’ombre de “TP” plane sur les deux vastes pro­grammes immo­bi­liers ani­mant les conver­sa­tions, depuis de longs mois, sur tout le pla­teau du Vercors : l’Ananda Resort à Villard-de-Lans donc, et le hameau des Arolles à Corrençon-en-Vercors. Des édi­fices tou­ris­tiques dis­tincts mais qui, pour les médias comme les habi­tants, res­tent « les pro­jets de Tony Parker ».

Quelque 300 per­sonnes ont assisté, mardi 20 février 2024, à la réunion publique orga­ni­sée par Vercors Citoyens à la Coupole, à Villard-de-Lans, sur les pro­jets immo­bi­liers de Tony Parker. © Muriel Beaudoing – Place Gre’net

De fait, l’ex-bas­ket­teur star des San Antonio Spurs est à l’o­ri­gine des deux dos­siers qui ont été au cœur de la réunion publique orga­ni­sée, mardi 20 février 2024, par l’as­so­cia­tion Vercors Citoyens ayant réuni plus de 300 per­sonnes à la Coupole, à Villard-de-Lans. Des sujets qui se sont invi­tés jusque dans les foyers et qui « divisent de plus en plus la popu­la­tion », constate une habi­tante du Vercors.

À Villard-de-Lans et à Corrençon, « c’est Tony Parker qui tire les ficelles »

Tout est parti du rachat, en 2019, de la Société des remon­tées méca­niques de Villard-Corrençon (SEVLC)¹dont la délé­ga­tion de ser­vice public (DSP) prend fin en 2026 à Villard-de-Lans et en 2046 à Corrençon par Tony Parker, pour 9 mil­lions d’eu­ros, via sa hol­ding Infinity Nine Mountain. Alors tout frais retraité des par­quets, “TP” voit grand pour le domaine skiable. Et plu­sieurs pro­jets trouvent un second souffle, boos­tés par la pers­pec­tive d’une telle manne financière.

Tony Parker a racheté la SEVLC, via sa société Infinity Nine Mountain, en 2019, deve­nant de facto le nou­veau patron de la sta­tion de Villard – Corrençon. © Instagram – Tony Parker

À Villard-de-Lans, une luxueuse rési­dence hôte­lière 4 étoiles de 21 000 m² doit ainsi voir le jour, au pied des pistes, avec une cen­taine d’ap­par­te­ments, de nom­breux com­merces, un centre d’ac­ti­vi­tés indoor… Le tout pour un mon­tant total éva­lué à 96 mil­lions d’eu­ros. Même concept pour le futur hameau des Arolles, à Corrençon-en-Vercors, com­pre­nant 116 loge­ments aux­quels s’a­joutent, là aussi, com­merces, cha­lets indi­vi­duels, res­tau­rants et une salle de sport.

Image de syn­thèse de l’Ananda Resort (été/hiver), le com­plexe hôte­lier 4 étoiles porté par Infinity Nine Mountain à la Côte 2000. © Agence EuroExpo

Implanté au Clos de la Balme, ce der­nier pro­jet est piloté par la société Federaly. Une entre­prise dont le diri­geant, Ruben Jolly, est lui-même asso­cié d’Infinity Nine Mountain, la société de l’an­cien meneur des Bleus, pro­prié­taire de la SEVLC. En clair, résume un oppo­sant local, « au bout du compte, c’est Tony Parker qui tire les ficelles » sur le plateau.

Des oppo­sants confor­tés par le récent rap­port de la Cour des comptes

Au-delà du pro­fil du pré­sident de l’Asvel²club le plus titré du bas­ket fran­çais (Villeurbanne), qui aimante natu­rel­le­ment les regards et les débats, ce sont bien deux visions anta­go­nistes du tou­risme de mon­tagne qui s’af­frontent. D’un côté, les adeptes d’un déve­lop­pe­ment axé en prio­rité sur le ski alpin, avec l’aide des canons à neige. De l’autre, les par­ti­sans d’un chan­ge­ment radi­cal, appe­lant à limi­ter l’im­pact envi­ron­ne­men­tal du tourisme.

Station de Corrençon en Vercors : vue de la par­celle du pro­jet immo­bi­lier du hameau des Arolles, au Clos de la Balme, le 2 février 2024. © Muriel Beaudoing – Place Gre’net

Ceux-ci se voient en outre confor­tés par le récent rap­port de la Cour des comptes, publié le 6 février 2024, sur les sta­tions de ski face au chan­ge­ment cli­ma­tique. Un docu­ment poin­tant « l’es­souf­fle­ment du modèle du ski fran­çais » et le manque d’a­dap­ta­tion de l’en­semble des acteurs, avec des pré­vi­sions plu­tôt pes­si­mistes, notam­ment pour les sta­tions de moyenne mon­tagne – comme Villard et Corrençon – tri­bu­taires de chutes de neige de plus en plus aléatoires.

Des recours contre l’é­change de par­celles à Villard-de-Lans

Tony Parker, ses asso­ciés et les mai­ries concer­nées vont « droit dans le mur en défen­dant une vision obso­lète et dan­ge­reuse », affirme le mili­tant asso­cia­tif pré­cité, retrans­cri­vant la pen­sée de la plu­part des oppo­sants. À Villard-de-Lans, ces der­niers, ras­sem­blés autour de l’as­so­cia­tion Vercors Citoyens, ont donc déposé des recours contre l’é­change de par­celles adopté par le conseil muni­ci­pal en octobre 2023.