FOCUS – En pleine polémique sur le burkini, relancée par sa lettre ouverte à Emmanuel Macron, Éric Piolle est revenu sur le sujet ce mardi 3 mai 2022. À deux semaines de la délibération prévue lors du conseil municipal du 16 mai, le maire de Grenoble s’est placé sur le terrain de l’égalité et de l’accès universel aux services publics, refusant d’en faire un problème de laïcité. Selon lui, toute personne doit pouvoir se baigner, vêtue ou dévêtue comme elle veut, à la piscine, aussi bien seins nus qu’en maillot de bain couvrant.
« Si demain, j’ai envie de m’acheter un burkini et d’aller me promener à la piscine dans un maillot couvrant, (…) j’ai le droit. » Cible de nombreuses critiques depuis sa lettre ouverte à Emmanuel Macron, Éric Piolle a décidé de contre-attaquer, ce mardi 3 mai 2022. Le maire de Grenoble avait en effet relancé le débat, dans ce courrier adressé, le 29 avril, au président de la République, en ouvrant la voie à l’autorisation du burkini dans les piscines municipales. Une question sur laquelle l’édile précise sa position, dans deux vidéos postées sur son compte Twitter.
La vérité sur #Burkini à la piscine ?
Cela devrait être un non sujet. Permettre à chacun·e de se rafraichir, vêtu·e ou dévêtu·e, sein couvert ou sein nu, dans le cadre de la loi, c’est la base du service public. C’est l’égalité, tout simplement. Et c’est la grandeur de la France pic.twitter.com/qlj3yNvWaD
— Éric Piolle (@EricPiolle) May 3, 2022
À moins de deux semaines de la très attendue délibération prévue lors du prochain conseil municipal du 16 mai, la polémique fait rage au sein de la classe politique grenobloise. Éric Piolle se dit ainsi « attristé » par ce qu’il nomme « une lepénisation et une zemmourisation du débat ». Pour lui, le burkini est en effet « un non-sujet puisqu’il n’y a pas de problème de laïcité à la piscine ».
Demain, dans nos piscines, je veux que chacun puisse se rafraîchir vêtu·e ou dévêtu·e comme il/elle veut, tant que la loi (l’hygiène et la sécurité) est respectée. Oui, les seins des femmes pourront être libérés comme ceux des hommes. L’accès universel, en sécurité, pour tous·tes pic.twitter.com/CfveVAJONB
— Éric Piolle (@EricPiolle) May 3, 2022
Le maire EELV en fait donc « un sujet juste social, d’accès aux services publics ». Son leitmotiv ? Permettre à tout le monde, et surtout aux femmes, de « se baigner comme elles veulent » à la piscine, « vêtues ou dévêtues, seins couverts ou seins nus ». « Demain, vous pourrez vous promener la poitrine libre si vous le désirez, puis vous pourrez mettre un maillot couvrant si vous le désirez », précise-t-il. « Vous aurez le droit. » Seule condition, que les personnes concernées « respectent les consignes d’hygiène et de sécurité ».
Pour Éric Piolle, les menaces de Laurent Wauquiez « transpirent racisme, sexisme et mépris de la laïcité »
Éric Piolle a par ailleurs, dans un autre tweet, taclé sèchement Laurent Wauquiez. Réitérant son premier avertissement lancé à la mi-mars, le président LR de la Région Auvergne-Rhône-Alpes a en effet de nouveau, ce lundi 2 mai, menacé de « couper toute subvention à la Ville de Grenoble » en cas d’autorisation du burkini dans les piscines municipales.
« Je lis que Laurent Wauquiez menace de priver Grenoble de l’argent de la Région pour des motifs qui transpirent racisme, sexisme et mépris de la laïcité », accuse le maire. Et ce dernier de s’interroger, non sans ironie : « Où s’arrêtera cette chasse aux Françaises qui portent le voile ? Va-t-il leur interdire de monter dans les TER de la Région ? »
Émilie Chalas a « honte du maire de [sa] ville », après la lettre ouverte d’Éric Piolle à Emmanuel Macron
Émilie Chalas a vivement réagi à la lettre ouverte d’Éric Piolle à Emmanuel Macron. Dans un communiqué publié ce mardi 3 mai 2022, la députée LREM de l’Isère affirme ainsi avoir « honte du maire de [sa] ville ». Selon elle, dans ce courrier, « Éric Piolle étale sa haine, ses contradictions et affiche clairement son renoncement à la République ».
À en croire Émilie Chalas, le maire de Grenoble frôlerait le crime de lèse-majesté en s’attaquant au président de la République. « Qui est donc ce maire porteur de toutes les causes qui donne à un président de la République réélu des leçons d’histoire et de morale ? Ce maire qui, lui, a terminé quatrième aux primaires de son propre parti », ironise-t-elle.
La députée LREM défend son chef de file, s’indignant qu’Éric Piolle « juge le premier quinquennat poreux aux idées anti-républicaines ». « En qualifiant la loi dite “séparatisme” “d’insupportable” sa parole est comme toujours sans nuance », accuse-t-elle. « Éric Piolle affiche ainsi être pour les financements étrangers et opaques des lieux de cultes ; le mélange des genres entre cultuel et culturel ; que l’argent public finance des projets anti-républicains qui porteraient atteinte à l’ordre public, à la laïcité, à la dignité de la personne et aux symboles de la République. »
Concernant le burkini, l’édile est, d’après Émilie Chalas, « celui qui entretient le sujet depuis 2019. Si sa position était claire et républicaine, personne n’en parlerait », assure-t-elle. La députée estime que « les arguments d’Éric Piolle sont les mêmes que ceux des islamistes et militants intégristes ». Pour elle, en effet, « le burkini n’est pas un vêtement ordinaire. Il est demandé par une minorité au nom d’une religion et il porte atteinte au principe de l’égalité entre les femmes et les hommes. »
Émilie Chalas s’insurge par ailleurs lorsque le maire de Grenoble « ose comparer le port obligatoire du voile dans certains pays avec l’obligation de se découvrir ici en France ». Un « fantasme délirant » et une « comparaison indécente », s’offusque-t-elle. « Cette lettre d’Éric Piolle, c’est avant tout l’envie d’exister politiquement après tant d’échecs et de faire croire que le sujet est maitrisé », conclut la députée LREM, qui y voit « le symptôme d’une fragilité criante ».