FIL INFO – La cour administrative d’appel de Lyon a, dans un arrêt rendu ce 20 décembre, annulé la décision du maire de Grenoble de décréter la journée du 25 novembre 2015 sans services publics. Pour la cour, Eric Piolle a pris part à un mouvement national, de nature politique, contre la baisse des dotations de l’État décidée par le gouvernement.
Les élus de la majorité municipale lors de la journée sans services publics le 25 novembre 2015 © Séverine Cattiaux
La décision du maire de Grenoble d’organiser, le 25 novembre 2015, une journée sans services publics afin de dénoncer la baisse des dotations budgétaires de l’État a été annulée par la cour administrative d’appel de Lyon.
Dans un arrêt rendu ce jeudi 20 décembre 2018, la cour revient ainsi sur la décision du tribunal administratif. Le 9 février 2017, le juge grenoblois avait rejeté le recours de la conseillère municipale d’opposition Anouche Agobian. L’élue du Rassemblement de gauche et de progrès (gauche socialiste et citoyenne) contestait la compétence du maire de Grenoble pour décider d’une telle mesure, en lieu et place de l’assemblée municipale.
Elle y voyait une décision « unilatérale, autoritaire et arbitraire » mais aussi une décision « à caractère politique pour un motif étranger à l’intérêt de la commune ». Un « détournement de pouvoir » pour Anouche Agobian, portant qui plus est atteinte au principe d’accès libre et égal des citoyens au service public.
Un détournement de pouvoir et une action politique pour la cour d’appel
Contrairement au tribunal administratif, la cour a considéré que l’élue avait intérêt à agir pour contester la décision du maire de fermer les services publics communaux – hormis ceux assurant la sécurité – et le centre communal d’action sociale. Décision « qui affecte directement la gestion des affaires de la commune », souligne le juge lyonnais.
En imposant, à l’appel lancé par l’association des maires de France, la fermeture partielle des services publics, la décision d’Eric Piolle ne peut être assimilée ni à une simple mesure d’information, ni à un vœu, ni à une mesure d’ordre intérieur, souligne la cour dans son arrêt.
Journée sans services publics le 25 novembre 2015 à Grenoble : une décision entachée d’excès de pouvoir et donc annulée par la cour d’appel © Séverine Cattiaux
« Cette décision a surtout porté atteinte aux principes d’impartialité et de neutralité de la fonction publique et était entachée de détournement de pouvoir », souligne le Rassemblement de gauche et de progrès dans un communiqué en réaction à la décision de la cour d’appel. « Elle imposait aux agents de la commune d’assister à une réunion plénière, lors de laquelle la situation budgétaire de la Ville a été présentée sous un angle volontairement dramatique et inquiétant. »
Une décision illégale
Pour l’opposition de gauche socialiste comme pour la cour d’appel, il s’agit ni plus ni moins que d’une opération de nature politique. « En décidant de fermer au public l’accès aux services municipaux et au centre communal d’action sociale […], le maire de Grenoble, même s’il entendait ainsi sensibiliser les usagers à la situation financière de la ville, a pris part à un mouvement national, de nature politique, contre la baisse des dotations de l’État décidée par le gouvernement, souligne la cour dans son arrêt. Un tel motif, étranger à l’intérêt de la commune ou au bon fonctionnement des services municipaux, est de nature à entacher cette décision d’illégalité. »
Journée pour la défense du service public à Grenoble en 2015 © Séverine Cattiaux – placegrenet.fr
Si, dans les faits, l’annulation de cette journée d’action ne change pas grand-chose, l’arrêt est révélateur pour le Rassemblement de gauche et de progrès.
« La municipalité porte seule et pleinement la responsabilité du « Grenoble bashing » qu’elle aura contribué à déclencher en instrumentalisant systématiquement la situation au profit d’une communication dramatisant volontairement la réalité », souligne le groupe.
« Après le rapport de la CRC n’évoquant ni le risque de mise sous tutelle, ni l’insincérité budgétaire soit-disant “imminentes et avérées en 2015”, la démonstration d’une communication utilisant à des fins partisanes l’outil municipal pour mieux imposer un plan d’austérité jamais débattu ni présenté clairement devant les élus et la population est définitivement faite. »
La Ville de Grenoble* a en outre été condamnée à verser à Anouche Agobian la somme de 1 200 euros.
PC
- * Sollicitée, notamment pour savoir si elle entendait faire appel de la décision, la Ville n’avait lors de la publication de l’article pas répondu à nos sollicitations.