FACE CAMERA – Dotée d’un important bagage universitaire et d’une riche expérience professionnelle en tant qu’avocate, Michèle Girot-Marc a su s’imposer comme une figure incontournable du barreau grenoblois. Dans un entretien accordé à Place Gre’net, la bâtonnière pour la période 2024 – 2025 a partagé sa vision sur les enjeux actuels de la profession, présenté ses actions pour ses pairs, ainsi que ses initiatives en faveur des droits des femmes.
Bâtonnier ? Beaucoup ne connaissent pas ce terme. Dès le début de l’entretien, Michèle Girot-Marc a ainsi expliqué sa fonction et son choix de privilégier la forme « bâtonnière ». Son rôle ? Représenter et gérer l’Ordre des avocats, qui compte environ 630 membres à Grenoble. « C’est une belle taille, une sacrée responsabilité », a‑t-elle affirmé, tout en précisant que le barreau de Grenoble est reconnu pour sa diversité et son dynamisme.
La bâtonnière a également évoqué ses missions régaliennes, notamment en matière de déontologie et de discipline. Elle a mis en avant la nécessité d’une autorégulation efficace pour préserver la crédibilité de la profession et garantir la confiance du public envers les avocats. « Si nous ne nous auto-régulons pas, d’autres le feront à notre place », a‑t-elle averti, en insistant sur l’importance de maintenir des standards éthiques élevés au sein de la profession.
Améliorer la qualité de vie au travail des avocats
Consciente des défis auxquels font face les avocats, Me Michèle Girot-Marc a mis en place plusieurs initiatives pour améliorer la qualité de vie au travail. Elle a créé une commission dédiée à ce sujet, ainsi qu’une cellule d’entraide, « Help Avocats », composée d’avocats honoraires prêts à soutenir les jeunes générations. « Il est important de créer un pont entre les générations », a‑t-elle souligné, ajoutant que cette initiative vise à favoriser le partage d’expérience et à atténuer le sentiment d’isolement que peuvent ressentir les jeunes avocats.
La bâtonnière a également mentionné la création d’une cellule de psychiatrie pour aider les avocats en détresse. « Il n’y a rien de plus insupportable que de ne pas pouvoir accéder à un soutien psychologique en cas d’urgence. » En outre, elle a mis en place des formations sur la gestion du stress et la prévention du burn-out, ainsi qu’une micro-crèche pour faciliter l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle. « La profession est exigeante, et il est crucial de trouver des solutions pour préserver le bien-être des avocats », a‑t-elle insisté.
Les défis de la profession face aux évolutions sociétales
L’entretien a également abordé les défis que la profession d’avocat doit relever, notamment en matière de médiation et de conciliation. Michèle Girot-Marc a alors réagi aux critiques de Christophe Talon, premier président de la Cour d’appel de Grenoble, qui a plaidé pour une obligation accrue de médiation, lors de l’audience solennelle de rentrée, en janvier 2025.
« Nous avons toujours eu à cœur de trouver des solutions amiables », a‑t-elle affirmé, tout en reconnaissant que le changement de mentalité prend du temps. Elle a souligné que la médiation est un processus qui nécessite une volonté commune des parties, et qu’imposer cette pratique peut être parfois contre-productif.
Autre sujet évoqué : les dangers qui menacent l’Etat de droit. « Plus on parle de l’Etat de droit, plus cela m’inquiète », a confié la bâtonnière en mettant en garde contre les dérives qui peuvent survenir lorsque des libertés fondamentales sont restreintes au nom de la sécurité. « Nous devons rester vigilants et défendre nos valeurs démocratiques », a‑t-elle déclaré, insistant sur le rôle crucial des avocats dans la protection des droits des citoyens.
Une vision pour l’avenir : éducation et prévention
Concernant la dépénalisation, Michèle Girot-Marc a exprimé des réserves, notamment sur la dépénalisation du cannabis, récemment défendue par Éric Piolle, le maire de Grenoble. « La dépénalisation est un sujet complexe qui ne peut pas être abordé uniquement sous l’angle de la législation », a‑t-elle déclaré.
La bâtonnière a, par ailleurs, mis en avant l’importance d’une approche préventive et éducative pour aborder les questions liées à l’usage de stupéfiants. « Nous devons nous concentrer sur l’éducation et la prévention plutôt que sur la simple dépénalisation », a‑t-elle affirmé, soulignant que des mesures éducatives pourraient être plus efficaces pour réduire les comportements à risque.
« Nous devons nous adapter aux évolutions technologiques tout en préservant notre humanité et notre capacité à interagir avec nos clients. »
Et de souligner que la question de la dépénalisation ne doit pas occulter les enjeux de santé publique et d’éducation. « C’est un problème de politique sociale », a‑t-elle insisté, ajoutant que la dépénalisation pourrait envoyer un message ambigu aux jeunes.
Michèle Girot-Marc a, ainsi, mis en garde contre le risque de banalisation de l’usage de substances, qui pourrait avoir des conséquences néfastes sur la société. « La dépénalisation pourrait donner l’impression que l’usage de drogues est acceptable, alors que cela peut avoir des effets dévastateurs sur la santé des individus », a‑t-elle conclu.
L’impact de l’intelligence artificielle sur la profession d’avocat
L’entretien a aussi abordé l’impact des nouvelles technologies et de l’intelligence artificielle sur la profession. Pour Me Michèle Girot-Marc, l’IA transforme la manière dont les avocats exercent leur métier. « L’IA est un outil, et il faut l’intégrer dans notre pratique », a‑t-elle affirmé, tout en soulignant l’importance de vérifier les sources et de ne pas se laisser aller à la facilité. Si l’intelligence artificielle peut faciliter l’accès à l’information et améliorer l’efficacité des avocats, elle ne doit pas, selon elle, remplacer le contact humain essentiel dans la relation avocat-client.
« Nous devons nous adapter aux évolutions technologiques tout en préservant notre humanité et notre capacité à interagir avec nos clients », a‑t-elle ajouté. La bâtonnière a également évoqué la nécessité de former les jeunes avocats à l’utilisation de ces nouvelles technologies, afin qu’ils puissent en tirer le meilleur parti tout en restant vigilants face aux risques associés. « L’IA ne doit pas être perçue comme une menace, mais comme un outil qui peut nous aider à mieux servir nos clients », a‑t-elle conclu.
La bâtonnière appelle à l’humanité et à l’empathie
Enfin, Michèle Girot-Marc a lancé un appel à la solidarité et à l’empathie, tant au sein de la profession qu’envers les femmes afghanes sous le régime des talibans. « Nous devons être là pour soutenir celles qui sont opprimées », a‑t-elle déclaré, soulignant l’importance de ne pas rester indifférent face aux injustices. Elle a évoqué sa lettre ouverte dénonçant l’effacement progressif des femmes en Afghanistan, jugeant que « le silence est complice de l’oppression ».
A cette occasion, la bâtonnière a annoncé, en exclusivité à Place Gre’net, la création, dans le cadre de la Journée des droits des femmes le 8 mars, d’un collectif de bâtonnières intitulé « Nos voix pour elles ». Son objectif : attaquer juridiquement en dénonçant les conventions internationales qui ne seraient pas respectées. « Nous voulons ainsi faire notre petite part dans ce grand débat et dans ces grandes questions, parce que c’est aussi l’avenir de l’humanité qui est en question. »
En conclusion, Michèle Girot-Marc a encouragé les jeunes avocats à embrasser leur carrière avec passion et confiance. « C’est un marathon, pas un sprint ! », a‑t-elle rappelé, les incitant à vivre pleinement leur vocation dans un environnement en constante évolution. Pour elle, malgré les défis, la profession d’avocat reste l’une des plus gratifiantes et essentielles dans la société. « Soyez fiers de votre métier et n’oubliez jamais l’importance de votre rôle dans la défense des droits et des libertés ! », a‑t-elle conclu avec enthousiasme.
3 réflexions sur « Face caméra | Michèle Girot-Marc, bâtonnière du Barreau de Grenoble : « La carrière d’avocat est un marathon, pas un sprint ! » »
« à l’humanité et à l’empathie » dans le cadre de la mondialisation …
[Propos modérés].
Comme disait un humoriste :
» Les avocats, c’est 10 ans de Droit,
le reste de travers »
Dans certains cas, c’est bien vrai.
» cellule de psychiatrie pour aider les avocats en détresse »
Sera-t-elle construite sur la colline de Correnc ?
NB : Bonne place là pour une cellule au soleil.
Je compatis : Mais il me faudrait avoir une statistique pour connaître la proportion de « détresse » par rapport au reste .