La maison Kaminski, au 106 rue des Alliés. Alain Carignon et son groupe en font l'un des exemples de ce qu'ils présentent comme "le patrimoine grenoblois abandonné". Cette ville abriterait un squat, "offert à l'ultra-gauche", d'après l'ancien maire. © Martin de Kerimel - Place Gre'net

Tribune libre | Des asso­cia­tions patri­mo­niales s’a­larment : « Patrimoine his­to­rique de Grenoble : l’état d’urgence »

Tribune libre | Des asso­cia­tions patri­mo­niales s’a­larment : « Patrimoine his­to­rique de Grenoble : l’état d’urgence »

TRIBUNE – La Ville de Grenoble a annoncé l’in­té­gra­tion de la cha­pelle des Pénitents blancs (rue Voltaire) à Gren’ de pro­jets, à l’oc­ca­sion d’un point d’é­tape effec­tué, le 8 novembre 2023, sur ce pro­gramme de valo­ri­sa­tion des bâti­ments patri­mo­niaux. Une poli­tique qui est pour­tant loin de ras­su­rer cer­taines asso­cia­tions. Dans une tri­bune com­mune datée du 6 novembre, Gilles-Marie Moreau, pré­sident de l’Académie del­phi­nale, et Ingrid Caillet-Rousset, pré­si­dente de la Fédération des asso­cia­tions patri­mo­niales de l’Isère (Fapi), décrètent ainsi « l’é­tat d’ur­gence » concer­nant le patri­moine his­to­rique de Grenoble, dénon­çant un « dés­in­té­rêt » de la muni­ci­pa­lité face à la dégra­da­tion des monuments.

Ancienne capi­tale du Dauphiné, Grenoble est riche d’un patri­moine varié (bâti­ments civils, églises, œuvres d’art…), allant de l’époque gallo-romaine aux Jeux olym­piques de 1968 et au-delà, en pas­sant par le Moyen Âge et les Temps modernes. Or depuis de nom­breuses années, asso­cia­tions patri­mo­niales et socié­tés savantes tentent d’alerter les pou­voirs publics sur l’état de dégra­da­tion de ce patri­moine his­to­rique, égre­nant la longue liste des monu­ments en souf­france qui ne sont ni entre­te­nus ni res­tau­rés comme ils le devraient.

Tribune : "Patrimoine historique de Grenoble : l’état d’urgence"

L’historien Gilles-Marie Moreau, pré­sident de l’Académie del­phi­nale, a cosi­gné avec Ingrid Caillet-Rousset, pré­si­dente de la Fapi, une tri­bune aler­tant sur la dégra­da­tion du patri­moine his­to­rique de Grenoble. © Sébastien Dos Santos – Diocèse de Grenoble-Vienne

Infiltrations d’eau, végé­ta­tion anar­chique, vitraux cas­sés… Nos monu­ments sont « en déshé­rence », comme l’a déclaré Ingrid Caillet-Rousset, pré­si­dente de la Fapi, (Dauphiné libéré, 30/10/2022).

« Symptômes de ce dés­in­té­rêt, Grenoble, qui a le label « Ville d’art et d’histoire », n’a plus d’élu en charge du patri­moine his­to­rique depuis mi-2022. »

Cet « état d’urgence patri­mo­nial », constaté par tous, s’aggrave d’année en année sans que la Ville de Grenoble ne prenne les mesures indis­pen­sables. Jamais les réunions de concer­ta­tion pour­tant pro­mises n’ont été mises en place. Symptômes de ce dés­in­té­rêt, Grenoble, qui a le label « Ville d’art et d’histoire », n’a plus d’élu en charge du patri­moine his­to­rique depuis mi-2022 ; depuis plu­sieurs années, le ser­vice qui était dirigé par un archi­tecte du patri­moine a dis­paru ; la ligne bud­gé­taire cor­res­pon­dante a dis­paru également.

Tribune : "Patrimoine historique de Grenoble : l’état d’urgence"

Les asso­cia­tions s’in­quiètent de l’a­jout de la cha­pelle des Pénitents blancs à Gren” de pro­jet, crai­gnant une vente qui pour­rait mettre en dan­ger le mobi­lier his­to­rique. © Manuel Pavard – Place Gre’net

De plus en plus de menaces semblent peser sur cer­tains monu­ments. Une récente annonce concer­nant la cha­pelle des Pénitents (17 rue Voltaire), riche d’un somp­tueux mobi­lier Renaissance et baroque mais tou­jours fer­mée au public, engendre de vives inquié­tudes chez de nom­breux Grenoblois : on ne peut accep­ter qu’elle soit ven­due ou démantelée.

« La pos­ses­sion d’un patri­moine his­to­rique est une chance »

En effet, le patri­moine his­to­rique est le bien com­mun de tous les citoyens, d’aujourd’hui et de demain. Héritage et témoin de notre passé, il par­ti­cipe de notre éco­sys­tème urbain, de notre envi­ron­ne­ment cultu­rel. Il éclaire et donne du sens à notre his­toire, donc à ce que nous sommes. À ce titre, il doit être pré­servé pour les géné­ra­tions futures, qui pour­raient nous repro­cher de l’avoir laissé se déla­brer voire dis­pa­raître sans réagir.

La pos­ses­sion d’un patri­moine his­to­rique n’est pas un poids, elle est une chance. Sa valo­ri­sa­tion amé­liore l’attractivité de la ville, et per­met à ses citoyens un accès de proxi­mité, local et éga­li­taire, à l’art et à la culture en géné­ral. Elle n’est pas une dépense inutile : elle est ren­table. Elle n’est pas source de divi­sions : elle est au contraire puis­sam­ment fédé­ra­trice, dans notre société tou­jours plus frac­tu­rée et en quête de valeurs com­munes. Elle ne mani­feste pas un repli sur soi, mais une ouver­ture à la connais­sance et à la découverte.

« Nous deman­dons à être reçus par le maire »

Nous récla­mons avec force à la Ville de Grenoble et à son maire, Éric Piolle, la prise en compte de ce patri­moine his­to­rique, et donc la mise en place d’un pro­gramme d’intervention éta­bli dans la concer­ta­tion, et selon un ordre d’urgence défini par l’état des bâti­ments et des œuvres.

Si la Ville de Grenoble se défend en évo­quant le chan­tier de res­tau­ra­tion de la Tour Perret, les asso­cia­tions de pro­tec­tion du patri­moine cri­tiquent son action pour les autres monu­ments his­to­riques. © Martin de Kerimel – Place Gre’net

C’est non seule­ment de l’image de Grenoble qu’il s’agit, mais bien de son dyna­misme éco­no­mique et d’une meilleure prise en compte des rela­tions sociales, dont le patri­moine est le garant, voire le promoteur.

C’est pour­quoi nous demandons :
– à être reçus par le maire, pre­mier res­pon­sable du patri­moine de la ville, afin de lui expo­ser nos ana­lyses et nos solutions ;
– qu’un élu soit à nou­veau en charge du patri­moine historique ;
– qu’une réflexion concer­tée et ouverte soit enga­gée, afin de défi­nir ensemble un plan plu­ri­an­nuel de sau­ve­tage et de mise en valeur de notre patri­moine com­mun. Nous deman­dons pour cela l’organisation de ren­contres régu­lières per­met­tant de faire des points sur les sujets patri­mo­niaux : res­tau­ra­tions à venir, tra­vaux envi­sa­gés, ventes, mises à dis­po­si­tion de biens, par­ti­ci­pa­tion à des actions culturelles…

Gilles-Marie Moreau, pré­sident de l’Académie Delphinale, et Ingrid Caillet-Rousset, pré­si­dente de la Fédération des asso­cia­tions patri­mo­niales de l’Isère

Manuel Pavard

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