FOCUS — Après deux mois de (relatif) silence, Jean-Pierre Barbier prend la parole pour évoquer le déconfinement en Isère. Le président du Conseil départemental compte sur une reprise presque normal des services, qu’il s’agisse des transports, des collèges, de l’accueil du public ou des musées départementaux. Cela le plus vite possible et en gardant en tête les mesures de distanciation sociale et le port du masque obligatoire.
Un retour, non pas à la normale « mais à quelque chose qui s’en approche ». Tel est l’espoir qu’a exprimé Jean-Pierre Barbier à l’occasion d’un point presse organisé en visioconférence mercredi 6 mai. Après être resté (relativement) discret durant les deux mois de confinement, le président du Conseil départemental de l’Isère a ainsi souhaité faire le point sur les modalités de déconfinement. Malgré, déplore-t-il, des zones d’ombre des mesures gouvernementales.
Un motif d’agacement, tout d’abord : la “couleur” de l’Isère sur la carte de France du Covid-19. « Du point de vue de la circulation du virus sur le département, on est en vert. Par contre, c’est le critère d’occupation des lits en réanimation qui fait que nous restons en orange », a décrypté Jean-Pierre Barbier. Qui espère donc voir très vite l’Isère passer au vert. Non sans considérer que « la communication du gouvernement mériterait d’être plus claire »*.
Collèges et transports
Concernant les premières pistes de déconfinement, le président du Département réaffirme sa volonté de rouvrir les collèges aux sixièmes et cinquièmes dès le 18 mai. Avec des aménagements propres à la crise sanitaire : distanciation sociale, mise à disposition de gel hydroalcoolique ou de savon… Les repas froids seront quant à eux servis dans de la vaisselle jetable. Et si possible recyclable, alors que le Département a banni le plastique de ses cantines en début d’année.
La réouverture des collèges va de pair avec celle des transports scolaires. « Nous sommes en contact régulier avec l’Éducation nationale, avec l’ensemble des maires, pour évaluer les besoins et mettre à disposition le nombre de cars nécessaires », explique Jean-Pierre Barbier. Qui compte bien revenir le plus rapidement possible à un trafic normal.
Même objectif pour les lignes commerciales Transisère. Pas question pour le président du Département de limiter la circulation : à ses yeux, c’est précisément une offre abondante qui permettra de faciliter la distanciation sociale au sein des cars. Les règles seront strictes : un siège d’écart entre passagers et le port du masque obligatoire. Quant à la gratuité actuellement en place, elle restera de mise jusqu’à fin mai.
Les musées du département ouverts dès le 18 mai ?
Les règles de distanciation sociale, on les retrouve dans les services d’accueil du Département. Comme annoncé précédemment, ceux-ci devraient de nouveau recevoir le public à compter du lundi 11 mai, mais sur rendez-vous afin d’éviter des promiscuités trop importantes. Si les agents reprennent le chemin des guichets et des bureaux, 1 200 n’en restent pas moins en télétravail au moins jusqu’au début du mois de juin.
Pour les musées départementaux, une possible réouverture est maintenue pour le 18 mai. À condition que les préconisations du gouvernement ne s’y opposent pas. Une chose est sûre : le président du Département y tient. « Les gens ne vont pas pouvoir voyager comme ils le souhaitent. Si on ne leur donne pas la possibilité d’avoir une capacité à s’occuper sur leurs lieux de résidence, c’est dramatique ! », estime-t-il.
Aux yeux de Jean-Pierre Barbier, rien ne s’oppose réellement à cette réouverture. « Nous avons des musées relativement vastes sur lesquels la distanciation sociale est possible, sachant que l’on mettra du gel hydroalcoolique et que le port du masque sera obligatoire », insiste-t-il. Quid du musée Champollion ? Le président espère toujours son ouverture pour 2020… mais en décembre.
Les experts et les prophètes
Au-delà des aspects pratiques, Jean-Pierre Barbier n’a pas manqué de distiller une vision plus générale de la crise sanitaire. Et a moqué les « experts » qui mettent le coronavirus sur le dos du libéralisme et de la mondialisation. « Ce sont des raccourcis invraisemblables », pourfend le président du Département. Qui rappelle que la peste, même plus lentement, n’a pas eu besoin du libéralisme pour se répandre dans le monde au Moyen-Âge.
Est-ce à dire que rien n’est à remettre en question ? « Bien évidemment, il faudra se poser des questions », concède-t-il. Notamment sur des relocalisations en matière alimentaire ou pharmaceutique. Tout en considérant paradoxal de se plaindre aujourd’hui du prix des masques. « Il faut les fabriquer en Chine, alors ? Il faut faire attention à ce que l’on dit », tacle l’élu.
Et ce dernier de conclure en évoquant, outre les experts, les « prophètes qui vous disent que le monde de demain sera différent grâce au virus ». Sans pour autant relever de nouveauté dans le discours : chute du capitalisme, décroissance ou, d’un autre côté, fermeture des frontières ? « Tout ce qu’ils disent après, c’est ce qu’ils disaient avant. Simplement en instrumentalisant cette épidémie. »
Florent Mathieu
* Selon la carte présentée le jeudi 7 mai par le premier ministre, le département de l’Isère passe finalement au vert (note ajoutée le 7 mai à 16h40).