Le tri­bu­nal admi­nis­tra­tif déclare illé­gal l’ar­rêté anti-remise à la rue adopté par la Ville de Grenoble

Le tri­bu­nal admi­nis­tra­tif déclare illé­gal l’ar­rêté anti-remise à la rue adopté par la Ville de Grenoble

EN BREF — Porté devant la jus­tice par la pré­fec­ture de l’Isère, l’ar­rêté anti-remise à la rue adopté par la Ville de Grenoble au mois de mai 2019 a été sus­pendu par le tri­bu­nal admi­nis­tra­tif. Les magis­trats estiment que la muni­ci­pa­lité, en vou­lant assor­tir les expul­sions de l’o­bli­ga­tion d’une pro­po­si­tion de relo­ge­ment, outre­passe ses com­pé­tences et se met en posi­tion de faire obs­tacle à une déci­sion judiciaire. 

L’arrêté anti-remise à la rue adopté par la Ville de Grenoble est passé à l’é­preuve du tri­bu­nal admi­nis­tra­tif. Si le conseiller muni­ci­pal Alan Confesson le jugeait basé sur les dis­po­si­tions légis­la­tives de la loi Dalo (Droit au loge­ment oppo­sable), lors du conseil muni­ci­pal du 13 mai der­nier, la jus­tice en a décidé autre­ment. Et le tri­bu­nal admi­nis­tra­tif (TA) de Grenoble a signi­fié la sus­pen­sion du texte dans une déci­sion ren­due ven­dredi 29 juin.

Le maire de Grenoble Éric Piolle © Joël Kermabon - Place Gre'net

Le maire de Grenoble Éric Piolle. © Joël Kermabon – Place Gre’net

Le tri­bu­nal base sa déci­sion sur deux prin­cipes. D’une part, le maire n’a pas la com­pé­tence « pour défi­nir les condi­tions dans les­quelles le pré­fet doit accor­der le concours de la force publique pour pro­cé­der à une expul­sion loca­tive ». D’autre part, le texte cherche « à faire obs­tacle à l’exécution de déci­sions de jus­tice ». Pour ces deux rai­sons, les magis­trats émettent « un doute sérieux sur la léga­lité de l’ar­rêté », et demandent la sus­pen­sion de son exécution.

Un arrêté illé­gal… et imprécis

Le tri­bu­nal admi­nis­tra­tif n’a pas été sen­sible aux argu­ments de la Ville, pour qui le maire agis­sait « en vertu des pou­voirs de police géné­rale qui lui sont confé­rés par la loi », sans empié­ter sur les com­pé­tences pré­fec­to­rales ou judi­ciaires. Pour défendre son point de vue, la muni­ci­pa­lité met­tait aussi en avant les risques concer­nant la salu­brité et la tran­quillité publiques, ainsi que la pré­ven­tion des atteintes aux droits des enfants.

Le préfet de l'Isère Lionel Beffre aux côtés d'Éric Piolle © Yuliya Ruzhechka - Place Gre'net

Le pré­fet de l’Isère Lionel Beffre aux côtés d’Éric Piolle. © Yuliya Ruzhechka – Place Gre’net

Outre la ques­tion de la com­pé­tence et celle de l’en­trave à une déci­sion de jus­tice, la pré­fec­ture de l’Isère sou­li­gnait éga­le­ment de son côté l’im­pré­ci­sion de l’ar­rêté adopté par la Ville. Le texte « ne men­tionne pas à qui incombe l’obligation d’information qu’il impose », fait-elle ainsi valoir. Et de consi­dé­rer encore que l’ar­rêté est « enta­ché d’er­reur de droit », puis­qu’il a été pro­mul­gué « en l’absence de jus­ti­fi­ca­tion d’un trouble à l’ordre public ».

Un arrêté simi­laire déjà reto­qué à Vénissieux

La sus­pen­sion de l’ar­rêté par le tri­bu­nal admi­nis­tra­tif n’est qu’une demi-sur­prise, mal­gré l’as­su­rance affi­chée par la muni­ci­pa­lité gre­no­bloise. Un arrêté simi­laire adopté par la com­mune de Vénissieux avait en effet été reto­qué pour les mêmes motifs par le TA de Lyon au mois de mars 2019. Si inter­dire pure­ment et sim­ple­ment les expul­sions est illé­gal, il appa­raît donc que les condi­tion­ner à une obli­ga­tion de pro­po­si­tion de relo­ge­ment ne trouve guère plus grâce aux yeux des juges.

L'arrêté n'a pas trouvé grâce aux yeux du Tribunal administratif de Grenoble © Eléonore Bayrou - Place Gre'net

L’arrêté n’a pas trouvé grâce aux yeux du tri­bu­nal admi­nis­tra­tif de Grenoble. © Éléonore Bayrou – Place Gre’net

Adopté suite à la pré­sen­ta­tion d’un vœu du groupe d’op­po­si­tion Ensemble à gauche, l’ar­rêté était décrit par Éric Piolle comme « un pro­grès pour notre ter­ri­toire [et] pour l’ensemble des actions menées aujourd’hui autour du loge­ment, de l’hébergement, de l’accueil ». Et le maire de Grenoble de plai­der pour que des arrê­tés simi­laires puissent voir le jour sur d’autres com­munes de la Métro. La déci­sion du tri­bu­nal risque à pré­sent de refroi­dir bien des ardeurs.

FM

ÉRIC PIOLLE : « NOUS RÉFLÉCHISSONS AVEC NOS AVOCATS »

« Il est regret­table que le droit au loge­ment et à l’hébergement qui pour­tant existe ne soit pas érigé au même niveau que le Droit à la pro­priété. Les deux doivent être à consi­dé­rer sur le même plan ». Ainsi s’ex­prime le maire de Grenoble Éric Piolle dans un com­mu­ni­qué fai­sant suite à la déci­sion du Tribunal administratif.

Plusieurs dizaines de personnes, dont des familles avec enfants, logent dans des tentes à proximité du pont de l'Estacade en pleine canicule © Florent Mathieu - Place Gre'net

Plusieurs dizaines de per­sonnes, dont des familles avec enfants, logent dans des tentes à proxi­mité du pont de l’Estacade en pleine cani­cule © Florent Mathieu – Place Gre’net

« Aujourd’hui avec nos avo­cats, nous réflé­chis­sons à la meilleure façon de faire en sorte que l’État res­pecte les lois de la République », ajoute-t-il, non sans rap­pe­ler qu’à ses yeux le droit au loge­ment comme « fon­da­men­tal ». Et de prendre pour exemple la pré­sence, à nou­veau, de per­sonnes logeant dans des tentes sous le pont de l’Estacade.

« Elles viennent d’être mise à la rue alors qu’elles étaient jusqu’alors héber­gées par une struc­ture finan­cée par l’État. Aucune pro­po­si­tion d’hébergement ne leur a été faite alors qu’elles sont deman­deuses. Elles se retrouvent donc à la rue, en plein épi­sode cani­cu­laire. Au moins deux hos­pi­ta­li­sa­tions ont eu lieu du fait de la cha­leur », affirme ainsi le maire de Grenoble.

(Encadré ajouté le 28 juin 2019 à 18h30)

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Florent Mathieu

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