FIL INFO – En mai 2018, la justice annulait le budget 2016 de la Région Auvergne-Rhône-Alpes pour cause de défaut d’information. Si la décision ne changeait rien concrètement, elle imposait que le budget soit de nouveau validé de manière rétroactive. Par la Région, ou par le préfet ? Malgré des divergences d’interprétation entre opposition et majorité, la Chambre régionale des comptes a tranché.
Pour certains opposants à la politique de Laurent Wauquiez et de la Région Auvergne-Rhône-Alpes qu’il préside, c’est un « rappel à la loi » autant qu’à « l’ordre républicain ». Dans son avis rendu le 24 juillet, et publié le 14 août, la Chambre régionale des comptes (CRC) Auvergne-Rhône-Alpes a en effet indiqué la nécessité de procéder à l’adoption rétroactive… de son budget 2016. Mais sans l’imposer à la Région, contrairement à ce que laissent entendre les élus d’opposition.
Pourquoi revenir sur ce budget de la Région Auvergne-Rhône-Alpes ? Parce que le 22 mai 2018 le tribunal administratif de Lyon l’a annulé. Le groupe d’opposition Rassemblement citoyen, écologique et solidaire (RCES) avait en effet déposé un recours contre ce budget, pour « excès de pouvoir ». Motif ? Un défaut d’information sur la somme de 4,7 millions d’euros accordée au projet du Center Parcs de Roybon. La « transversalité » du dossier évoquée par Laurent Wauquiez avait été jugée par trop évasive.
Un budget fantôme ?
Dans les faits, la décision du tribunal n’avait rien changé : le budget 2016 avait d’ores et déjà été exécuté, et la victoire de l’opposition était avant tout symbolique. Pour autant, le préfet du Rhône s’est ému du fait que le budget en question n’ait, au final, jamais été validé par l’assemblée du Conseil régional. Et a saisi la Chambre régionale des comptes le 29 juin 2018 pour s’enquérir du sort de ce qui ressemble à un budget fantôme.
Pour l’ADES (Association démocratie écologie solidarité), soutien de la municipalité grenobloise, c’est « à la demande d’un citoyen » que la Chambre régionale des comptes a été ainsi saisie. Faux, répond la Région, qui affirme lettre à l’appui que cette saisie était demandée par Laurent Wauquiez en personne. Celui-ci indique en effet au préfet qu’une adoption du budget par voie de délibération « induirait un risque juridique important » et dit attendre de la CRC qu’elle autorise une régularisation par arrêté préfectoral.
Réponse de la CRC : « L’annulation de la délibération d’approbation du budget primitif 2016 de la région Auvergne-Rhône-Alpes a pour effet que cette décision est réputée n’être jamais intervenue ; dès lors, elle doit faire l’objet d’une régularisation rétroactive par l’autorité compétente », écrit-elle dans son avis. L’autorité compétente ici nommée n’est pas la Région, mais bien le préfet, invité donc à régulariser le budget 2016, conformément à l’article L1612‑2 du Code général des collectivités territoriales.
L’ire de l’opposition
C’est au nom de cet article que la Région, dit-elle, n’a pas organisé vote de régularisation durant sa séance plénière du 14 juin. Provoquant l’ire des “rouges-verts” de l’ADES, pour qui « [le] président du conseil régional s’est permis de refuser de saisir l’assemblée délibérante régionale pour que le budget primitif 2016 soit de nouveau soumis au débat ».
L’ADES souligne encore que l’avis de la CRC précise que la Région doit reprendre « les décisions accessoires au budget primitif 2016, qui ont été annulées par la décision du tribunal administratif du 17 mai 2018 », estimant dès lors que « l’assemblée plénière régionale doit être de nouveau saisie ». Mais la CRC mentionne bien que cette régularisation doit se faire « si nécessaire »… Et la nécessité n’est pas là, puisque la Chambre régionale des comptes ne remet en cause aucune des décisions accessoires.
En revanche, la Chambre régionale des comptes intime à la Région l’ordre de tenir informé son assemblée « dès sa plus proche réunion du présent avis », ainsi que de le publier par voie d’affichage ou dans un bulletin officiel, quitte à rappeler aux esprits l’annulation juridique du budget 2016. Certains ne manqueront donc pas de surveiller la prochaine assemblée plénière, prévue pour les 11 et 12 octobre 2018. Ainsi que le prochain numéro du magazine La Région Auvergne-Rhône-Alpes ? Sans doute pas, nous répond la Région : cette parution n’a pas valeur officielle.
FM
Article modifié le mardi 21 août 2018, suite à une erreur d’interprétation.