FOCUS – L’Université Grenoble-Alpes (UGA) a rendu publics les résultats de sa consultation en ligne sur les blocages de bâtiments universitaires. Si les trois quarts des voix exprimées se prononcent contre, les syndicats étudiants dénoncent un vote anti-démocratique et refusent d’en reconnaître la légitimité.
« Êtes-vous favorable à la liberté d’accès aux bâtiments des étudiants et des personnels permettant notamment la mise en œuvre des examens dans les conditions normales à l’Université Grenoble-Alpes ? » Telle était la question posée aux étudiants et au personnel de l’Université Grenoble-Alpes (UGA) dans le cadre d’une consultation électronique face aux mouvements de blocages sur le campus de Saint-Martin-d’Hères.
Résultat du vote, organisé les 24 et 25 avril ? « Près de 10 000 étudiants et personnels de l’Université Grenoble-Alpes ont répondu. 75,9 % se sont prononcés en faveur de la liberté de travail et d’accès aux bâtiments universitaires, 13,5 % contre, tandis que 10,6 % n’ont pas souhaité se prononcer », détaille l’UGA. Avant de dénoncer des attaques par déni de services qui ont, durant un temps, empêché l’accès à la plateforme Internet.
Le président Patrick Lévy appelle dans la foulée « tous les étudiants et tous les personnels à reconnaître cette expression démocratique et permettre rapidement le libre accès aux locaux d’étude et de travail ainsi que la bonne mise en œuvre des examens ». Une déclaration optimiste alors que les syndicats étudiants avaient par avance dénoncé cette consultation et contesté sa légitimité. À l’image de l’Unef ou de la Licorne, qui la juge « absurde et faussement démocratique ».
Un défaut de démocratie… et de confidentialité, selon plusieurs syndicats
Les raisons de ce refus ? Le vote serait dénué de tout contexte de débat et d’expression des opinions, contrairement aux assemblées générales quasi-quotidiennes sur le campus. De plus, les syndicats estiment que la présidence de l’UGA a mené un véritable travail de dénigrement du mouvement par courriel, tout en refusant aux militants d’user du même canal, autrement dit la mailing-list de l’Université. Dernier souci technique : cette consultation s’adressant à tous les étudiants de l’UGA, des Valentinois ont été invités à se prononcer sur des blocages ayant lieu à Grenoble.
La question de la confidentialité des données est également posée. La Licorne l’affirme sur les réseaux sociaux : « La Cnil, sollicitée par téléphone, vient d’informer les élus Licorne qu’aucune déclaration n’a été faite auprès de ses services ». « Fake News », réplique l’UGA, qui donne son numéro de déclaration Cnil (1016668) et affirme que l’application utilisée, Sphinx, garantit l’anonymat des répondants.
Pas de quoi convaincre les opposants au vote, à l’image de Jonas Costagliola, ancien vice-président étudiant à l’Université Grenoble-Alpes, qui a réagi sur Facebook…
Un succès pour l’Uni Grenoble et les Jeunes Républicains de l’Isère
De leur côté, l’Uni Grenoble et des Jeunes Républicains de l’Isère ne cachent pas leur satisfaction : « Avec près de 10 000 votants, dont plus de 75 % en faveur de la liberté d’étudier, la consultation organisée par l’Université Grenoble-Alpes est un succès et nous nous en réjouissons », affirment conjointement Mathieu Germain, responsable de l’Uni Grenoble, et
Clément Chappet, responsable des Jeunes Républicains de l’Isère.
« Nous avons bon espoir que les bloqueurs prendront acte de ce résultat et libéreront les bâtiments au plus tôt. Dans le cas contraire, nous espérons que l’Université usera des moyens nécessaires afin de permettre aux étudiants de passer leurs examens dans les meilleures conditions. L’ordre se doit d’être rétabli », affirment les représentants des deux mouvements.
En dehors d’Interasso Grenoble, qui a également appelé à participer au vote électronique, les autres organisations représentatives étudiantes semblent bien décidées à n’accorder de valeur démocratique qu’aux assemblées générales, auxquelles sont toutefois loin de participer tous les étudiants. Entre guerres de représentativités et querelles de légitimité, le dialogue apparaît bel et bien rompu. Le bras-de-fer, lui, ne fait-il que commencer ?
Florent Mathieu
NOUVELLES MOBILISATIONS D’ÉTUDIANTS… ET D’ÉLUS GRENOBLOIS
Vote électronique ou non, la mobilisation contre la loi Vidal redéfinissant les conditions d’accès aux universités ne faiblit pas. À Grenoble ce mercredi 25 avril, environ 300 lycéens et étudiants ont une nouvelle fois battu le pavé pour crier leur refus de la réforme. Tandis que sur le campus, le matin même, le bâtiment de Sciences-Po Grenoble était (de nouveau) bloqué.
Le bâtiment Sciences Po de nouveau bloqué sur le campus universitaire le 25 avril 2018. © Léa Raymond – Place Gre’net
Sans surprise, les forces politiques se mêlent au débat. Dans un communiqué relayé par les Jeunes Insoumis de Grenoble, les élus locaux de la France insoumise annoncent « soutenir les mobilisations contre la loi Vidal ». Parmi eux : l’adjointe de Grenoble en charge de la Tranquillité publique Élisa Martin, ainsi que les élus grenoblois Jérôme Soldeville, Catherine Rakose, Laëtitia Lemoine ou encore Alan Confesson.
Un Alan Confesson qui, sur Facebook, disait tout le bien qu’il pensait du président de l’UGA suite à l’intervention des forces de l’ordre sur le campus : « Saluons le courage de M. Lévy, qui envoie les CRS gazer et matraquer ses étudiants dans le plus pur esprit répressif et autoritaire de ce pitoyable gouvernement. C’est à ce genre de chose qu’on reconnaît les grands hommes. » L’ambiance entre l’UGA et la Ville de Grenoble s’annonce au beau fixe.