EN BREF – La Ville de Grenoble annonce avoir livré, ces 8 et 9 février, une centaine de repas aux migrants accueillis au Patio, sur le campus de Saint-Martin-d’Hères. Des dons alimentaires issus du surplus de la cuisine centrale de la Ville. Problème : les militants sur place affirment avoir préalablement émis un avis défavorable, jugeant cette nourriture « totalement inadaptée aux besoins du lieu ». Et y voient une opération de communication.
Que faire des surplus de la cuisine centrale de Grenoble, qui prépare chaque jour 11 000 repas pour les scolaires, les crèches et les personnes âgées de la commune ? Ces jeudi 8 et vendredi 9 février, la municipalité a décidé de les écouler en distribuant une centaine de repas aux migrants accueillis au Patio, sur le campus de Saint-Martin-d’Hères.
Cette distribution n’est pas une première, affirme la Ville de Grenoble dans un communiqué. Cette dernière indique ainsi livrer régulièrement les surplus de la cuisine centrale « aux associations locales qui soutiennent les personnes en situation de précarité », via le centre communal d’action sociale (CCAS).
Si « un important travail est fait pour limiter le gaspillage », la conseillère municipale en charge de la restauration Salima Djidel l’affirme : « Il est important que le surplus puisse être systématiquement adressé aux plus démunis ».
De nouvelles livraisons prévues dans les jours qui viennent
L’accueil de migrants au sein du Patio, devenu pour l’occasion “Patio solidaire“, a été prolongé jusqu’au 31 mars, soit jusqu’à la fin de la trêve hivernale, par le conseil d’administration de l’Université Grenoble-Alpes (UGA). La Ville de Grenoble, qui annonce de nouvelles livraisons alimentaires dans les jours qui viennent, promet également des frigos et des couvertures.
Un geste que les militants du Patio solidaire ont tenu à saluer dans un communiqué diffusé sur leur page Facebook… pour, dans la foulée, tacler sévèrement la municipalité. « Malgré l’avis défavorable et motivé des militant.e.s contacté.e.s, une demi-palette de nourriture totalement inadaptée aux besoins du lieu* a effectivement été livrée au Patio sur demande expresse de la mairie », dénoncent-ils.
Et d’ironiser : « Une bonne action comme celle-là vaut bien un communiqué, sans doute, à la gloire d’une mairie “allant bien au-delà de ses compétences”, comme le dit son maire ! » Avant de se faire carrément incisif en demandant aux institutions municipales « de cesser d’utiliser le Patio, actuellement au maximum de ses capacités d’accueil, pour se délester de la responsabilité des personnes qu’elles ne peuvent prendre en charge, d’autant plus sans [les] en prévenir ».
« Chacun doit faire sa part, il n’est jamais trop tard ! »
« Toutes [les] solutions possibles doivent être mises en œuvre pour lutter contre des situations intolérables et dénuées d’humanité », déclare, pour sa part, le maire de Grenoble Éric Piolle, dans la logique de ses précédentes prises de positions sur la politique migratoire mise en place par l’État.
La municipalité rappelle ainsi la mise en place du dispositif d’accueil du Rondeau, ou encore la plateforme “Grenoble terre d’accueil” qui aurait recueilli plus de 500 initiatives en deux ans.
Si les militants du Patio solidaire jugent “sincère” cet engagement en faveur des migrants, ils s’interrogent néanmoins au sujet du maire de Grenoble : « Ne peut-il pas nous assurer de son soutien dans la perspective du 31 mars prochain où les habitant.e.s du Patio, menacés d’expulsion, se retrouveront de nouveau sans le logement auquel ils ont droit ? Ne peut-il pas œuvrer pour leur permettre un accès effectif à leur droit au logement en dépit de ce qu’il n’a pas fait jusqu’ici ? “Chacun doit faire sa part”, il n’est jamais trop tard ! »
Florent Matthieu
- * L’un des militants évoque « des plats préparés en trop grand nombre avec peu de possibilité de stockage réfrigéré sur place […] La préparation de la nourriture se fait très bien sur place, puisqu’il y a une cuisine. Les besoins sont plutôt en termes de denrées : riz, huile, piment, légumes, conserves, etc. ». (note ajoutée dans la foulée de la publication de l’article)