EN BREF – Début octobre 2024, les policiers de l’Office de lutte contre le trafic illicite de migrants (Oltim) de l’Isère ont démantelé un vaste trafic de faux documents administratifs. Ils ont arrêté cinq Algériens âgés de 29 à 35 ans faisant partie d’une organisation en charge d’envoyer des documents volés vers des faussaires turcs. Tous ont été mis en examen.
À l’origine du démantèlement du trafic de faux documents administratifs ? L’interception par les douanes de l’aéroport Saint-Exupéry de colis expédiés depuis Grenoble vers la Turquie. « Ces colis renfermaient de nombreux documents d’identité français authentiques signalés volés en Isère, notamment 32 cartes d’identité et 9 passeports », a rapporté jeudi 17 octobre 2024, en fin d’après midi, Éric Vaillant, procureur de la République de Grenoble.
Les investigations opérées sous l’égide du parquet par les policiers du détachement isérois de l’Oltim, puis sur commission rogatoire d’une juge d’instruction, ont ensuite permis d’identifier les différents expéditeurs. Ces derniers « agissaient en suivant le même mode opératoire mais sous couvert de fausses identité », a relaté le procureur. Leur tâche essentielle : envoyer les documents volés vers des faussaires turcs, « leaders actuels de la falsification ou contrefaçon de documents d’identité ».
La poursuite de l’enquête au moyen d’écoutes téléphoniques et de surveillance de comptes bancaires a permis de démanteler un vaste réseau. Celui-ci rachetait les documents volés à de jeunes hommes majeurs français puis expédiait ces papiers dérobés. « Ce réseau réceptionnait par ailleurs des faux documents européens provenant de Turquie revendus à des étrangers en situation irrégulière sur le territoire », a expliqué le procureur.
Des comptes Uber Eats sous-loués une centaine d’euros par semaine
S’ajoutaient à cette double activité criminelle la création et la revente de comptes auprès de la société de livraisons de repas Uber Eats, monnayés entre 1 000 et 1 500 euros pièce. « Ces comptes étaient ouverts sur la base de faux documents sociaux (K‑bis, domiciliation) et identitaires par l’utilisation de documents d’identité faux ou volés, puisés dans la base documentaire dématérialisée constituée par la tête de réseau tenue par un Algérien de 35 ans en règle sur le territoire », a indiqué Éric Vaillant.
De quoi déjouer les systèmes de sécurité basés sur la reconnaissance faciale. L’Algérien à la tête du réseau a ainsi créé une soixantaine de comptes, sur lesquels étaient versés les montants des courses et viré de l’argent. « Il se rémunérait grâce à l’ouverture frauduleuse du compte Uber que lui et ses complices sous-louaient aussi pour leur usage moyennant une centaine d’euros par semaine », a précisé Éric Vaillant.
Le réseau rayonnait entre Grenoble, Lyon et les Alpes Maritimes
Cet homme s’appuyait sur un réseau de rabatteurs étrangers en situation irrégulière opérant sur Grenoble, Lyon et dans les Alpes Maritimes. « Ces derniers proposaient les différentes prestations aux clients, moyennant une rémunération en qualité de rapporteurs d’affaires », a poursuivi le procureur.
Cinq Algériens âgés de 29 à 35 ans ont comparu devant une juge d’instruction qui les a mis en examen le 10 octobre. Ce pour recel en bande organisée, aide à l’entrée et au séjour irréguliers d’étrangers en bande organisée et fourniture frauduleuse de documents administratifs constatant un droit, une identité ou une qualité, ou accordant une autorisation. Mais aussi pour détention et usage de faux documents d’identité et pour blanchiment (concours à une opération de placement, aide à la justification mensongère de l’origine des biens de l’auteur d’un délit d’aide à l’entrée et séjour irrégulier d’un étranger en bande organisée).
Quatre de ces individus sont désormais en détention provisoire tandis qu’un cinquième a fait l’objet d’un contrôle judiciaire.