FOCUS – La colère des agriculteurs – mobilisés contre les normes environnementales européennes, l’inflation ou encore l’insuffisance des revenus – a gagné une grande partie de la région Auvergne-Rhône-Alpes, mardi 23 janvier 2024. L’autoroute A7 est ainsi coupée dans les deux sens depuis le début de matinée, tandis que de nouveaux blocages et opérations « escargots » sont annoncés mercredi 24 janvier. Les autorités invitent donc les automobilistes à « différer tout déplacement ». Par ailleurs, une soixantaine de tracteurs vont converger vers Grenoble jeudi 25 janvier, à l’appel de la FDSEA.
Des Pays-Bas à la Roumanie, en passant par l’Allemagne et maintenant la France, la colère des agriculteurs ne faiblit pas et fait même tâche d’huile. Le mouvement – endeuillé par la mort d’une agricultrice, sur un barrage routier, en Ariège – a ainsi gagné une partie de la région Auvergne-Rhône-Alpes, mardi 23 janvier 2024, et devrait s’étendre au Sud-Isère dans les jours à venir, avec une action prévue jeudi 25 janvier à Grenoble, à l’appel du syndicat FDSEA.
Si leurs revendications sont multiples, et pour certaines différentes d’une région à l’autre, on retrouve néanmoins un socle commun. Les agriculteurs réclament ainsi, pêle-mêle, une meilleure rémunération, la non-suppression de la détaxation du gasoil, la simplification des normes environnementales européennes imposées dans le cadre de la Politique agricole commune (Pac), un accès facilité à l’eau…
Ils s’opposent également à l’interdiction des produits phytopharmaceutiques, sans pouvoir bénéficier en contrepartie de produits alternatifs, ainsi qu’à la multiplication des contrôles de la part de l’administration. Et plus globalement, ceux-ci dénoncent la stigmatisation visant leur profession, s’estimant notamment taxés injustement de « pollueurs ».
L’autoroute A7 coupée dans les deux sens de circulation
Des agriculteurs ont donc bloqué depuis 4 heures, mardi 23 janvier 2024, l’autoroute A7, coupée dans les deux sens de circulation entre Chanas (Isère) et Tain-l’Hermitage (Drôme). Des barrages étaient ainsi encore érigés peu avant 18 heures, selon la préfecture de région, « à hauteur de la sortie 12 (Saint-Rambert‑d’Albon) dans le sens nord / sud, et à hauteur de la sortie 15 (Valence sud) dans le sens sud / nord ».
Conséquences de cette action – qui devrait se poursuivre jusque tard dans la nuit de mardi à mercredi -, d’importantes perturbations ont été signalées sur l’ensemble des axes routiers du secteur. Dans un communiqué publié en milieu d’après-midi, mardi, la préfecture de l’Isère demandait ainsi aux automobilistes circulant sur l’A7 « d’emprunter les itinéraires conseillés en fonction de leur provenance ».
Les automobilistes invités à « différer tout déplacement »
De même, « les usagers des axes routiers comme l’A48 sur les secteurs Grenoble/Voreppe/Lyon sont invités à anticiper ou reporter leur déplacement en dehors des heures de forte affluence (avant 16 heures et après 19 heures) », a ajouté la préfecture, précisant que « le groupement de gendarmerie de l’Isère restait mobilisé sur le terrain pour sécuriser et organiser les manœuvres ».
Dans un communiqué diffusé à 17 h 45, la préfecture de région a de son côté mis en garde les automobilistes : « Les perturbations devraient s’accentuer ces prochains jours avec des opérations “escargots” et de nouveaux blocages supplémentaires annoncés demain, mercredi 24 janvier : A7 d’Orange à Montélimar, A47 à Givors, A49 en Drôme, A71/A75/A89 à Clermont-Ferrand, M6 à Limonest, N102 en Ardèche… »
Des agriculteurs vont converger sur Grenoble jeudi 25 janvier
La préfète de région demande donc aux automobilistes de « bien respecter les itinéraires conseillés (Bison Futé, radio 107.7, réseaux sociaux des préfectures…), de rester calme » et les invite surtout à « différer tout déplacement non indispensable ». Dans ce cadre, les employeurs sont quant à eux fortement incités à « faciliter, sans délai, le recours au télétravail de leurs salariés ».
La mobilisation des agriculteurs atteindra en outre la métropole grenobloise, jeudi 25 janvier. Dès 10 heures, une soixantaine de tracteurs vont ainsi converger, via les autoroutes, des différentes vallées entourant Grenoble, avant de pénétrer dans l’agglomération. Organisée à l’appel de la FDSEA, cette action doit aboutir à un rassemblement devant la Direction départementale des territoires (DDT), boulevard Joseph-Vallier.
La Confédération paysanne « solidaire du mouvement tout en défendant ses propositions »
Dans un communiqué publié mardi 23 janvier 2024, la Confédération paysanne Auvergne-Rhône-Alpes affiche sa solidarité avec le mouvement, pointant le « malaise agricole » palpable. Le syndicat demande ainsi à Emmanuel Macron « deux mesures concrètes et immédiates ».
Tout d’abord « l’arrêt définitif des négociations de l’accord de libre-échange UE-Mercosur, un moratoire sur tous les autres accords commerciaux en négociation et un réexamen de tous les accords en vigueur ». Mais également « une loi interdisant strictement l’achat de nos produits agricoles en dessous de leur prix de revient ».
La Confédération paysanne met toutefois en garde contre « deux mirages » proposés aux agriculteurs « par le gouvernement et d’autres syndicats agricoles ». D’une part, « le mirage d’une “suppression des normes” qui résoudrait tous les problèmes ». Le syndicat rappelle en effet : « Nous sommes les premières victimes du dérèglement climatique, nous devons donc arrêter de faire l’autruche et nous réapproprier les questions environnementales. »
D’autre part, « le mirage d’un revenu complémentaire issu de la production d’énergies », ajoute la Confédération paysanne. Laquelle lance aussi un avertissement « contre l’extrême droite qui instrumentalise les difficultés des agricultrices et agriculteurs ». Et le syndicat de souligner « qu’en novembre 2023, la majorité du groupe parlementaire d’extrême droite au Parlement européen a voté pour l’accord de libre-échange entre l’UE et la Nouvelle-Zélande ».