EN BREF – Interpellé mercredi 18 octobre 2023, le directeur de l’école de kundalini yoga de Saint-Michel-les-Portes (Isère), dans le Vercors, a été mis en examen pour « agressions sexuelles » et « travail dissimulé », vendredi 20 octobre, et placé sous statut de témoin assisté pour « abus de faiblesse dans un contexte de dérives sectaires ». Le célèbre maître yogi de 73 ans est notamment accusé d’attouchements par d’anciennes élèves ou employées de son ashram. Il a été placé sous contrôle judiciaire.
Dans une longue enquête publiée jeudi 19 octobre 2023, Le Monde avait révélé les lourdes accusations visant Jean-Louis Astoul, maître de kundalini yoga, interpellé et placé en garde en vue, la veille, par les gendarmes de La Mure. Le directeur de l’école Amrit Nam Sarovar, située à Saint-Michel-les-Portes, a été mis en examen, vendredi 20 octobre, pour « agressions sexuelles » et « travail dissimulé », et sous statut de témoin assisté pour « abus de faiblesse dans un contexte de dérives sectaires », indique le procureur de la République de Grenoble Éric Vaillant.
Le maître yogi Jean-Louis Astoul, mis en examen pour agressions sexuelles, enseigne à l’école Amrit Nam Sarovar, installé sur 20 hectares dans le village de Saint-Michel-les-Portes. © Jvillafruela, CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons
Véritable star de sa discipline, le maître yogi de 73 ans enseignait le kundalini yoga dans son ashram s’étendant sur près de 20 hectares, dans le petit village du massif du Vercors. Si cette école internationale, créée en 2000, rencontrait un succès grandissant, Le Monde a également recueilli des témoignages plus inquiétants d’anciennes élèves ou employées.
Cinq jeunes femmes dénoncent des agressions sexuelles
Des participants qui décrivaient des séances de yoga durant « jusqu’à cinq heures d’affilée », avec « très peu de nourriture » et « des états de transe pouvant conduire à des malaises », ainsi que des « des “quêtes de vision” nécessitant au moins vingt-quatre heures de jeûne, seul dans la forêt et sans encadrement ». Mais aussi des cas d’attouchements ou de baisers non consentis.
C’est d’ailleurs la plainte, en août 2022, d’une jeune femme dénonçant trois agressions sexuelles commises entre juillet 2020 et janvier 2022, qui a entraîné l’ouverture d’une enquête. Les investigations menées par la brigade de Monestier-de-Clermont ont alors « permis d’identifier quatre autres victimes de faits similaires commis à cette période, dont certaines résident en Allemagne et au Royaume-Uni », relate le procureur.
Créée en 2000, l’école de kundalini yoga accueille des centaines de stagiaires chaque année, au cœur du Parc naturel régional du Vercors. © Google Maps
« Le maître yogi aurait profité de séances de “guidance” personnelles pour attoucher sexuellement des jeunes femmes à un moment de leur vie où elles étaient psychologiquement vulnérables et dans un état de sidération », précise le magistrat.
Recours au travail dissimulé par le biais de bénévoles
L’enquête a par ailleurs mis à jour le « recours au travail dissimulé par le biais de bénévoles », système en vigueur depuis la création de l’école Amrit Nam Sarovar. « Il s’agit de stagiaires du centre qui décidaient d’y rester un certain temps en payant un loyer et rendant des services ménagers sans rétribution, hormis le gîte et le couvert (frugal) », explique Éric Vaillant.
Six à douze victimes ont été identifiées sur une période d’un an mais leur nombre est « potentiellement plus important », selon le procureur. Ces stages, dispensés à plusieurs centaines de personnes chaque année, sont facturés environ 1 500 euros en moyenne, logement non compris (entre 25 et 130 euros la nuit).
Plus de 60 000 euros en liquide retrouvés à son domicile
La perquisition menée au domicile de Jean-Louis Astoul par les gendarmes de la compagnie de La Mure, avec le Groupe interministériel de recherche (Gir) de Grenoble et un agent de la Direction départementale des finances publiques (DDFIP), a permis de découvrir plus de 60 000 euros en liquide et « d’ouvrir une procédure incidente ». Certains bénévoles avaient en effet directement participé à la rénovation de son domicile personnel.
Le maître de kundalini yoga a donc été déféré, ce vendredi 20 octobre, devant un juge d’instruction qui l’a mis en examen. « Il a été placé sous contrôle judiciaire, conformément aux réquisitions du parquet, avec obligation de ne pas entrer en contact avec les victimes, de verser une caution de 9 000 euros et de pointer régulièrement à la gendarmerie », détaille Éric Vaillant, ajoutant que le professeur s’est vu retirer son passeport.
[Photo de Une © Jaime Ramos, CC BY-SA 2.0, via Wikimedia Commons]