L'édition 203 des Envolées va permettre à trois compagnies émergentes de tourner dans plusieurs salles de la région, ainsi qu'au festival Textes en l'air, cet été. DR

Trois com­pa­gnies théâ­trales émer­gentes des Alpes sur le devant de la scène grâce aux Envolées

Trois com­pa­gnies théâ­trales émer­gentes des Alpes sur le devant de la scène grâce aux Envolées

REPORTAGE – Trois com­pa­gnies théâ­trales émer­gentes des Alpes par­ti­cipent à l’é­di­tion 2023 des Envolées, bien­nale de la jeune créa­tion théâ­trale. Elles béné­fi­cient ainsi d’un accom­pa­gne­ment pro­fes­sion­na­li­sant et de dates de repré­sen­ta­tion. Place Gre’net les a décou­vertes le 21 avril, aus­si­tôt après la pre­mière de leurs spec­tacles. La belle aven­ture se poursuit.

Bougier Toto à Annecy. Les Unes et les Autres à Grenoble. Belle Journée à Eybens. Ces trois jeunes com­pa­gnies théâ­trales, choi­sies parmi une qua­ran­taine, béné­fi­cient du dis­po­si­tif Les Envolées, bien­nale de la jeune créa­tion théâ­trale. Accompagnées par plu­sieurs struc­tures depuis l’au­tomne 2022, elles sont enfin mon­tées sur scène le ven­dredi 21 avril. Une pre­mière avant plu­sieurs autres repré­sen­ta­tions pour cha­cune d’entre elles (lire encadré).

LES PROCHAINES DATES

Pleure PAS papa : mer­credi 26 avril au Théâtre de Poche (Grenoble), samedi 29 avril à L’Autre Rive (Eybens), du 27 au 31 octobre au Théâtre des Clochards célestes (Lyon).

Vacances : ven­dredi 28 avril au Théâtre de Poche, dimanche 30 avril au Pot au Noir (Saint-Paul-lès-Monestier), du 18 au 22 octobre au Théâtre des Marronniers (Lyon).

La véri­table his­toire de la gor­gone Méduse : mardi 25 avril à L’autre Rive, jeudi 27 avril au Pot au Noir, du 7 au 11 novembre au Théâtre de l’Iris (Villeurbanne).

Les trois pièces iront éga­le­ment au fes­ti­val Textes en l’air (Saint-Antoine-L’Abbaye), du 26 au 30 juillet.

Cette année, Les Envolées fêtent leur sep­tième édi­tion et regroupent neuf par­te­naires. Le col­lec­tif Troisième Bureau, à Grenoble, s’ap­puie notam­ment sur les salles qui ont accueilli la pre­mière repré­sen­ta­tion des trois spec­tacles de ce mil­lé­sime 2023 : le Pot au Noir à Saint-Paul-lès-Monestier, l’Autre Rive à Eybens et le Théâtre de Poche à Grenoble.

En Isère, il fédère éga­le­ment le tan­dem Espace cultu­rel René-Proby et Heure Bleue à Saint-Martin-d’Hères, ainsi que le fes­ti­val Textes en l’air (Saint-Antoine-L’Abbaye). Autres théâtres asso­ciés, dans le Rhône cette fois : les Clochards célestes et les Marronniers à Lyon, mais aussi l’Iris à Villeurbanne.

Les Envolées conçues comme un pre­mier cadre professionnalisant

L’idée pre­mière des Envolées : « Croiser les géné­ra­tions et expé­riences ». « Nous pen­sons qu’il est impor­tant d’ac­com­pa­gner l’im­mer­sion de jeunes gens dans la pro­fes­sion en leur don­nant la pos­si­bi­lité d’ex­pé­ri­men­ter un pre­mier geste théâ­tral dans un cadre pro­fes­sion­na­li­sant », explique l’é­quipe de la biennale.

Les com­pa­gnies béné­fi­cient du sou­tien d’un direc­teur tech­nique, Karim Houari. Elles pro­fitent aussi de l’ap­port d’une dra­ma­turge, Pauline Noblecourt-Berjon, et d’une scé­no­graphe, Heidi Folliet.

Grâce aux Envolées, la compagnie Bougier TOTO, installée en Haute-Savoie, peut présenter pleure PAS papa, un spectacle notamment inspiré des écrits de Pasolini. © Martin de Kerimel - Place Gre'net

Grâce aux Envolées, la com­pa­gnie Bougier TOTO, ins­tal­lée en Haute-Savoie, peut pré­sen­ter Pleure PAS papa, un spec­tacle notam­ment ins­piré des écrits de Pasolini. © Martin de Kerimel – Place Gre’net

C’est cet accom­pa­gne­ment qui a per­mis à Bougier Toto de pré­sen­ter Pleure PAS papa, une pièce notam­ment ins­pi­rée des écrits de Pier Paolo Pasolini. Sur scène, Jules Benveniste, auteur et comé­dien, appa­raît avec Lucille Gallard, créa­trice sonore et saxo­pho­niste. Ensemble, ils donnent corps à la ren­contre for­tuite d’une femme et d’un étran­ger sur ce qui peut res­sem­bler à une plage d’Italie – la pièce est d’ailleurs bilingue.

Une évi­dence pour Jules Benveniste : « En sor­tant d’é­cole, en juillet 2019, je sou­hai­tais faire un tra­vail sur la tra­duc­tion, explique-t-il. J’avais très envie de trans­mettre les poèmes de Pasolini et de leur répondre aujourd’­hui. Une amie à moi parle de “poé­li­tique” : à tra­vers sa poé­sie, il est très engagé poli­ti­que­ment et cela me plai­sait. Je l’ai donc relu et, à par­tir de mon­tagnes de textes, petit à petit, je suis arrivé à ce texte-là. »

Le jeune homme sou­haite « sor­tir du car­can de la langue » et jus­ti­fie ainsi son choix d’un accom­pa­gne­ment musi­cal. « Une musique écrite en paral­lèle du tra­vail sur le pla­teau, sou­ligne Lucile Gallard. Tout est né d’im­pro­vi­sa­tions et de réfé­rences com­munes, en mélan­geant le tout avec des sons plus réa­listes ». Le résul­tat est évo­ca­teur et saisissant.

Trois spec­tacles à décou­vrir, très dif­fé­rents les uns des autres

L’atmosphère de Vacances est bien dif­fé­rente et plus oni­rique. Le public suit les pas d’une femme, Catherine, qui pose sa valise dans une chambre d’hô­tel… sans lit. Elle y ren­contre Caroline et Camille, l’oc­ca­sion de chan­ger de regard sur son envi­ron­ne­ment. Le cours de son séjour et celui de la pièce s’en trouvent sou­dain bouleversés.

L’origine de ce spec­tacle est pour le moins inso­lite. L’idée est venue d’une col­lec­tion de cartes pos­tales léguée par une vieille dame à sa petite-fille, la comé­dienne Zoé Vuaillat. « C’est de la mul­ti­pli­cité de ces images fan­tas­mées de voyages qu’est venue l’i­dée de navi­guer entre les lieux », indique Fanny Hermant, autrice et interprète.

Belle Journée, une compagnie d'Eybens, participe aux Envolées avec sa pièce Vacances. Elle évolue dans un décor changeant, à la lisière de l'onirisme. © Martin de Kerimel - Place Gre'net

Belle Journée, une com­pa­gnie d’Eybens, par­ti­cipe aux Envolées avec sa pièce Vacances. Elle évo­lue dans un décor chan­geant, à la lisière de l’o­ni­risme. © Martin de Kerimel – Place Gre’net

« Cela vient aussi de tout ce qu’on peut racon­ter quand on part en vacances », sou­ligne Angéla Kontis, char­gée de la dra­ma­tur­gie. L’équipe assume par­fai­te­ment la part de mys­tère et d’i­ma­gi­naire de ce qu’elle pré­sente sur scène. « On a fait beau­coup d’im­pro­vi­sa­tions, au départ, pré­cise Fanny Hermant. Le jeu est pré­ci­sé­ment de ne jamais savoir com­plè­te­ment où on se trouve. Nous déployons un uni­vers qui ne cesse de s’aug­men­ter. »

L’intention est aussi, pour la troupe, de faire vivre les espaces, quitte à débor­der de la scène et à offrir des points de fuite mul­tiples. La com­pa­gnie s’ap­puie sur la plu­ri­dis­ci­pli­na­rité de ses pra­tiques. Elle prend plai­sir à rendre étranges des choses très habituelles.

Une pro­gram­ma­tion qui s’ins­crit aussi dans une cer­taine contemporanéité

La com­pa­gnie Les Unes et les Autres, à l’in­verse, s’ins­pire de l’u­ni­vers des mythes pour par­ler d’un sujet réso­lu­ment contem­po­rain : celui des vio­lences faite aux femmes. Avec La véri­table his­toire de la gor­gone Méduse (une pièce de Béatrice Bienville), la troupe gre­no­bloise pro­pose un autre regard sur la créa­ture aux che­veux de ser­pent. Elle rap­pelle que, toute jeune fille, elle fut d’a­bord la vic­time d’une agres­sion du dieu Poséidon.

Avec son équipe, le met­teur en scène Nicolas Robinet explore ainsi les consé­quences de cet acte pre­mier. « On nous en parle comme s’il s’a­gis­sait d’une rela­tion amou­reuse mais, en réa­lité, cette rela­tion n’est que très peu consen­tie, indique-t-il. Elle nous est pour­tant pré­sen­tée par­tout comme un ima­gi­naire éro­tique classique. »

La compagnie grenobloise Les Unes et les Autres présente La véritable histoire de la gorgone Méduse. Un récit mythologique aux résonnances contemporaines. © Martin de Kerimel - Place Gre'net

La com­pa­gnie gre­no­bloise Les Unes et les Autres pré­sente La véri­table his­toire de la gor­gone Méduse. Un récit mytho­lo­gique aux réso­nances contem­po­raines. © Martin de Kerimel – Place Gre’net

« Au tra­vers d’une his­toire dont nous sommes tous impré­gnés, nous par­lons du rap­port au pou­voir, sou­ligne Léa Darmon-Raphoz, comé­dienne. Dans le mythe ori­gi­nel, Méduse n’a qu’en­vi­ron douze ou treize ans. Chaque étape de sa vie la dépasse. Le fait de tenir tête à tout le monde, y com­pris à son père et à ses sœurs, va lui per­mettre de rap­pe­ler une évi­dence : le viol est un crime. »

Une vérité que la troupe tient à sou­li­gner sur les planches, d’au­tant que la légende ori­gi­nelle res­tait appa­rem­ment inédite sous la forme d’une pièce de théâtre. C’est pré­ci­sé­ment l’un des inté­rêts des Envolées que de lui per­mettre d’exis­ter “autre­ment”.

LES ENVOLÉES : UN TREMPLIN SALUÉ PAR LE MONDE DU THÉÂTRE

Valère Bertrand, direc­teur du Pot au Noir :

« J’ai par­ti­cipé à la fon­da­tion des Envolées, un dis­po­si­tif né en 2012 après une conver­sa­tion avec le comé­dien Gilles Arbona. L’objectif est d’ac­com­pa­gner la jeune créa­tion théâ­trale et de faire en sorte que les équipes dis­posent des meilleures condi­tions pour leurs projets. 

L’idée est aussi que des pro­fes­sion­nels s’y inté­ressent, au niveau régio­nal, et que cette géné­ra­tion puisse trou­ver des lieux de dif­fu­sion. Au vu du résul­tat sur scène, on se dit qu’on ne se retrousse pas les manches pour rien. On retrouve par­fois cer­taines des com­pa­gnies rete­nues pour les Envolées avec un autre spec­tacle, quelques années plus tard. Et jus­qu’à la cour d’hon­neur du Festival d’Avignon ! »

Sarah Papet, direc­trice des Affaires cultu­relles de la ville d’Eybens :

« Nous avions pu décou­vrir une pre­mière forme de Vacances à l’au­tomne. Celle que nous avons vue lors des Envolées me paraît pro­met­teuse. Elle doit désor­mais se roder au cours des dif­fé­rentes dates pré­vues pour la tour­née. Ce dis­po­si­tif est pré­cieux. Accompagner les pre­miers gestes théâ­traux nous tient à cœur. 

Pouvoir le faire sur plu­sieurs dates et dans dif­fé­rents lieux est vrai­ment impor­tant pour nous. Je sens les com­pa­gnies dyna­miques et ambi­tieuses. Elles réin­ter­rogent le rap­port au public, osent prendre des risques et, sur­tout, ques­tionnent le monde qui les envi­ronne. C’est cela aussi, le rôle du théâtre. »

Delphine Gouard, direc­trice du Théâtre muni­ci­pal de Grenoble :

« Après avoir lu La véri­table his­toire de la gor­gone Méduse, je me deman­dais vrai­ment ce que la com­pa­gnie allait faire de ce récit foi­son­nant sur le pla­teau. J’ai trouvé que l’é­quipe s’en sor­tait très bien pour créer des images fortes et, en même temps, lais­ser de la place au spec­ta­teur. Le tra­vail sur les réfé­rences musi­cales et les cos­tumes ren­voie à la mytho­lo­gie, tout en rame­nant le sujet à notre époque. 

L’idée est que le spec­tacle, accueilli au Théâtre de Poche, puisse tour­ner dans d’autres salles. Le fait que les Envolées regroupent plu­sieurs par­te­naires per­met d’as­su­rer les com­pa­gnies sélec­tion­nées d’un cer­tain nombre de dates, dès la créa­tion. Cela leur per­met de se roder et, on l’es­père, de don­ner envie aux pro­fes­sion­nels de les pro­gram­mer par la suite. »

Doriane Thiéry, admi­nis­tra­trice de Troisième Bureau :

« Il y a beau­coup de choses, liées à la mise en scène, qu’il n’est pas pos­sible d’an­ti­ci­per au moment de la sélec­tion des dos­siers. Cette année, les spec­tacles sont extrê­me­ment dif­fé­rents les uns des autres, ce que nous n’a­vions pas for­cé­ment ima­giné. C’est un plus ! 

De nom­breuses troupes vou­draient se lan­cer et nous essayons d’être là pour les accom­pa­gner. Pour faire un choix, nous lisons toutes les pièces et les notes d’in­ten­tion des com­pa­gnies. Ensuite, les neuf par­te­naires confrontent leurs opi­nions, en se foca­li­sant vrai­ment sur l’é­mer­gence théâ­trale. »

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Martin de Kerimel

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