REPORTAGE – Après trois semaines d’audience et près de sept heures de délibéré, la cour d’assises de l’Isère a condamné, ce vendredi 18 février 2022, Nordahl Lelandais à la réclusion criminelle à perpétuité assortie d’une période de sûreté de 22 ans, pour l’enlèvement et le meurtre de Maëlys de Araujo, 8 ans, en août 2017, à Pont-de-Beauvoisin. Les jurés ont ainsi suivi les réquisitions de l’avocat général, lui infligeant la peine maximale encourue pour les faits reprochés. La défense de l’ancien maître-chien a indiqué que celui-ci ne ferait pas appel de la décision.
Il semble d’abord abattu et résigné, regardant la cour à l’énoncé du verdict, avant de fixer les jurés, un par un. À quoi pense-t-il alors ? À ce drôle de « cadeau » d’anniversaire, le jour de ses 39 ans ? Ou, plus sûrement, à la cellule l’attendant pour de très longues années ? Après trois semaines d’audience et près de sept heures de délibéré, Nordahl Lelandais a été condamné ce vendredi 18 février 2022, par la cour d’assises de l’Isère, à la réclusion criminelle à perpétuité assortie d’une période de sûreté de 22 ans. L’ex-militaire comparaissait depuis le 31 janvier pour l’enlèvement et le meurtre de Maëlys de Araujo, 8 ans, le 27 août 2017, à Pont-de-Beauvoisin.
Les jurés ont donc suivi les réquisitions de l’avocat général, infligeant à l’accusé la peine maximale encourue. Sans grande surprise, ceux-ci ont ainsi jugé l’accusé coupable de tous les faits qui lui sont reprochés, répondant « oui » à toutes les questions posées. Quinze questions au total, en lien avec l’enlèvement, la séquestration et le meurtre de Maëlys, mais aussi les agressions sexuelles de ses deux petites-cousines et la détention d’images pédopornographiques.
La défense avait demandé une peine de 30 ans pour Nordahl Lelandais
Pour la défense, le coup est rude. Car Me Alain Jakubowicz et ses collaborateurs ont longtemps espéré que la cour suivrait leur demande de (relative) clémence. Au terme de sa plaidoirie, la veille, l’avocat de Nordahl Lelandais avait en effet réclamé 30 ans de prison, estimant qu’il s’agissait de la peine « méritée » par son client.
Le suspense aura en tout cas duré près de sept heures. Invité à s’exprimer une dernière fois, ce vendredi matin, à la reprise de l’audience, l’accusé a « présenté [ses] excuses avec la plus grand sincérité » à la famille de Maëlys, assurant qu’il allait entreprendre un travail sur lui-même avec « une grande détermination ». Une ultime prise de parole, jugée par beaucoup plus opportuniste que sincère, qui n’aura donc pas permis de renverser les pronostics.
Il faut dire qu’outre la violence terrifiante du crime, l’attitude de Nordahl Lelandais durant l’instruction et au cours du procès ne jouait pas en sa faveur. De son obstination à nier tout mobile sexuel à ses multiples mensonges, en passant par son refus de reconnaître l’enlèvement et sa froideur apparente, l’ancien maître-chien avait tout fait pour susciter la répulsion de la cour.
« C’est l’odeur du sang et de la mise à mort », glisse Me Jakubowicz
Les jurés se sont ensuite retirés vers 9h30, avant de délibérer jusqu’en milieu d’après-midi. Une journée qui aura fait office de long compte-à-rebours pour les parties civiles et les très nombreux journalistes présents. L’impressionnante cohue observée à l’entrée de la salle d’audience, dans les minutes précédant le rendu du verdict, illustre d’ailleurs la médiatisation de ce procès hors-norme. « C’est l’odeur du sang et de la mise à mort », glisse en passant Me Jakubowicz, avec une pointe de provocation.
Après l’annonce de sa condamnation par la présidente, Nordahl Lelandais voit sa mère s’approcher du box des accusés. Pas d’étreinte possible dans ces circonstances mais un simple « check » qui en dit long. « Ça va aller », semble murmurer l’accusé à sa mère, avant de discuter un moment avec ses trois avocats, Maîtres Jakubowicz, Moutous et Pariat.
« Maëlys a mis un dangereux criminel en prison », affirme sa mère, « contente du verdict »
Du côté des parties civiles, c’est le soulagement qui paraît prédominer. La famille de Maëlys, venue en nombre, s’étreint en silence, certains embrassant Jennifer et Colleen, la mère et la grande sœur de la fillette. Beaucoup portent un tee-shirt à l’effigie de Maëlys. Pour eux, c’est la fin de trois semaines particulièrement éprouvantes et la possibilité, enfin, d’un deuil plus serein.
En sortant de la salle d’audience, Jennifer Cleyet-Marrel se dit ainsi « contente du verdict ». « La perpétuité, c’est ce qu’on a pris nous », souligne-t-elle, un portrait de Maëlys à la main. « Maëlys a mis un dangereux criminel en prison, il ne fera plus jamais de mal à personne », ajoute sa mère, très émue. « C’était mon objectif de lui rendre hommage, elle a été avec nous pendant tout le procès, elle nous a donné la force. »
« Ce verdict honore notre justice », estime Me Rajon
À ses côtés, Colleen reprend les mots de sa mère : « Je suis très contente du verdict », affirme la sœur de Maëlys. « Je suis malheureusement déçue par l’autre [Nordahl Lelandais] dans le box. Il aurait pu nous apporter plus de vérité. Mais je suis déjà contente pour ma sœur, qui est une guerrière. » Colleen tient aussi à « remercier toutes les personnes présentes » pour sa famille, espérant que « Maëlys restera dans les esprits de tous les Français ».
Très touché également, Me Fabien Rajon, avocat de la famille maternelle de Maëlys, affiche lui aussi sa « satisfaction ». « La justice est passée de manière sereine, implacable, intransigeante et impartiale », estime-t-il. « Dans un État de droit, avec des crimes d’une telle abjection, notre justice n’a pas été faible et a fait preuve de force. Ce verdict honore notre justice et notre institution judiciaire. »
Nordahl Lelandais ne fera pas appel de sa condamnation à perpétuité
Un satisfecit général qui inclut bien sûr Me Laurent Boguet, avocat du père de Maëlys, Joachim de Araujo. Mais le pénaliste toulousain exprime néanmoins une certaine déception, liée à l’attitude de l’accusé durant le procès. « Nous repartons avec l’insatisfaction importante de ne pas avoir eu les réponses essentielles », déplore-t-il ainsi. « Car finalement, Nordahl Lelandais emporte avec lui dans sa cellule certains éléments de compréhension. » À commencer par la question d’une possible agression sexuelle, qui restera malheureusement sans réponse.
De son côté, Me Jakubowicz indique que son client ne fera pas appel de sa condamnation à perpétuité. Avant de conclure, d’une brève déclaration qui semble clore définitivement l’histoire : « Son destin est maintenant entre ses mains. Il n’a plus besoin d’avocat, c’est à lui de travailler. »