FOCUS – Suite à l’annulation par le tribunal administratif de son dispositif d’interpellation et de votation citoyenne, la majorité d’Éric Piolle, maire EELV de Grenoble, remet le couvert. Et sort une nouvelle formule, très proche de la précédente, mais mieux bordée juridiquement, selon la Ville. Laquelle veut aussi expérimenter deux autres types d’outils d’interpellation citoyenne. L’intention derrière tout cela ? Améliorer la relation entre la Ville et les usagers et retisser de la confiance entre élus et citoyens.
La Ville de Grenoble vient de dévoiler la nouvelle formule de son dispositif d’interpellation et de votation citoyenne. À part les seuils, pas de réel changement avec l’ancienne formule.
Il faudra désormais réunir 8000 signatures, ce qui correspond peu ou prou à 5% de la population, pour déclencher une votation citoyenne. La marche est donc plus haute que dans l’ancien dispositif, où 2000 signatures suffisaient.
Par contre, pour remporter la votation, les pétitionnaires n’auront plus “que” 16 000 voix majoritaires à rassembler, ce qui correspondant à 10% de la population, au lieu des 20 000 auparavant. Comme dans le dispositif précédent, tous les résidents grenoblois, étrangers compris, à partir de 16 ans pourront voter.
Le maire « s’engage » auprès des pétitionnaires
En dépit de ces fortes similitudes, le dispositif ne pourra pas être attaqué, assure Annabelle Bretton, adjointe à la Démocratie ouverte. « La Ville est bien dans les clous du droit, et la préfecture a été consultée en amont », précise-t-elle.
La collectivité s’appuie, cette fois, sur la base juridique de la « consultation ouverte facultative ». « Ce n’est pas un Ric [Référendum d’initiative citoyenne, Ndlr], insiste Annabelle Bretton. On veut continuer à être dans la légalité. Le pouvoir de décision, c’est le maire qui l’a, et il s’engage à consulter les citoyens et à mettre en œuvre la décision qui sortira de la votation. »
D’aucuns ne manqueront pas d’objecter que le maire avait tenu la même promesse lors du lancement du précédent dispositif. Ce qui ne l’avait pas empêché de refuser de soumettre à la votation la question de la fermeture des trois bibliothèques.
Éric Piolle justifiait alors ce revirement par des concessions accordées par la Ville aux pétitionnaires et par la scission au sein du groupe des porteurs de la pétition, ce qui rendait la demande caduque, selon lui.
Nouvel outil d’interpellation citoyenne, la « médiation » s’enclenche avec 50 signatures
Toujours « pour améliorer la relation entre la Ville et les usagers », la Ville lance, par ailleurs, deux nouveaux outils d’interpellation citoyenne. Le premier, baptisé « médiation d’initiative citoyenne », vise à proposer un « cadre serein qui oblige les citoyens à être clairs et aux élus à leur répondre », indique Annabelle Bretton.
Activer ce dispositif nécessite qu’au moins deux résidents grenoblois de plus de 16 ans portent une réclamation ou une proposition, et que celle-ci revête un intérêt collectif et soit en lien avec les compétences de la Ville.
Il leur faut ensuite réunir au moins 50 signatures pour décrocher un rendez-vous avec un ou des élus et le service concerné au cours du mois suivant le dépôt de la pétition.
Les élus s’engagent quant à eux à examiner la demande et à rencontrer à nouveau les pétitionnaires dans les deux mois après la première rencontre.
À partir de 1000 signatures, c’est la constitution d’un atelier de projet
Si la requête est plus complexe, les deux pétitionnaires ont désormais intérêt à réunir 1000 signatures, en vue de déclencher la mise en place d’un « atelier d’initiative citoyenne ».
Le principe est calqué sur le fonctionnement des ateliers de projet, mis en œuvre à plusieurs reprises à Grenoble. Notamment lors de la gestion de la crise sanitaire.
Vingt-cinq personnes tirées au sort planchent sur le sujet, au cours de trois séances minimum. Elles font appel à des experts, au besoin.
Ces ateliers se tiennent durant trois mois. In fine en ressortent des préconisations présentées, débattues et votées en conseil municipal.
« Continuer à être pionniers »
Le nouveau dispositif d’interpellation et de votation citoyenne, la médiation d’initiative citoyenne et l’atelier d’initiative citoyenne feront tous trois l’objet d’une délibération soumise au vote lors du conseil municipal du lundi 14 juin 2021.
« On veut continuer à être dans cette culture citoyenne chère à Grenoble, à être pionniers et à prendre en compte l’avis des habitants », affirme Annabelle Bretton.
« Il s’agit aussi de combler le fossé entre les élus et les citoyens qui nourrissent beaucoup de méfiance envers la démocratie représentative, observe, inquiète, l’adjointe. Et celle-ci d’étayer ses propos par quelques chiffres sortis du baromètre Cevipof.
Avant de conclure, sur une note optimiste : « Le point positif étant que les citoyens sont aussi très nombreux à penser qu’ils peuvent changer la société, en particulier à l’échelon local ».