FOCUS – Si le confinement a sévèrement mis à mal l’industrie du tourisme, la période qui a suivi n’a pas forcément arrangé la situation d’une grande partie des entreprises du domaine. Exemple type de ces acteurs en difficulté : Barroud’âne en Vercors. La petite structure qui propose une activité « agritouristique » a, aujourd’hui encore, bien du mal à entrevoir un retour à la normale. Et craint pour sa pérennité.
Pas moins de 80 %. Tel est le pourcentage de sociétés touristiques en Isère qui ont dû arrêter leur activité durant le confinement. Soit, sur le département, 256 millions d’euros de perte de chiffre d’affaires, selon une note de conjoncture publiée par Isère attractivité le 1er juillet 2020.
Une situation catastrophique qui s’est quelque peu améliorée en juin dernier, en particulier grâce à des pics sur certains week-ends, et les appels à un « tourisme de proximité ».
Malgré cela, la situation semble critique pour nombre de petites structures ayant commencé à planifier des réservations dès décembre 2019. C’est le cas de Barroud’âne, au cœur du Parc naturel régional du Vercors, pour qui l’objectif est avant tout de ne pas finir l’été en liquidation judiciaire.
Barroud’âne en Vercors, une activité fragilisée
Sylvie Grand travaille bénévolement à l’exploitation agricole de Nathalie Hild qui gère Barroud’âne en Vercors. De l”« Agritourisme », comme elle le définit elle-même.
Le concept ? Proposer des ânes à la location en vue d’effectuer des randonnées pédestres dans le respect des besoins de ces animaux. Mais également un service de bivouac sous des tipis aménagés dans les montagnes du Vercors.
Si le charme de ce programme a profité à l’exploitation les années précédentes, la crise du coronavirus est bel et bien venue gripper la machine avec une chute vertigineuse des réservations prévues pour cet été.
« D’habitude, dès décembre et ce jusqu’à juin, le planning est rempli sur juillet et août. Mais cette année, nous n’avons pas eu de réservations. Pour donner une idée, cela représente 95 % de perte de chiffre d’affaires par rapport à la même période l’année dernière. »
Et en dehors du fonds de soutien qui a permis de « garder la tête hors de l’eau » durant cette période difficile, Barroud’âne n’a pu bénéficier d’aucune aide publique. « Quand on exerce une activité agricole qui ne produit pas de viande, pas de légumes, on n’est ni considéré comme des agriculteurs, ni comme une société touristique », se désole Sylvie.
Il en va de même pour les aides prévues par la Région Auvergne – Rhône-Alpes aux centres équestres. L’entreprise ne relevant pas de cette activité, elle ne peut compter sur aucune subvention.
Vers une campagne de dons pour sauver l’activité ?
Autre grande difficulté économique que rencontrent Sylvie et Nathalie : la rénovation des bâtiments. « Nous sommes soumis à un permis de construire qui nous oblige à remettre les bâtiments aux normes. Tout ce qu’on avait est parti dans ces rénovations et dans les ânes », s’exaspère Sylvie Grand.
Une dépense qui vient entamer les maigres économies de l’exploitation en cette période difficile. « On pense peut-être à faire une campagne de dons pour sauver notre activité, et puis pour nous aider à financer la rénovation des bâtiments. »
Quand on demande à Sylvie son état d’esprit quant au futur de l’exploitation, sa réponse est mitigée. « J’ai pris un peu de recul… Je pense que Barroud’âne ne va pas pouvoir perdurer sans changement de stratégie, estime-t-elle. Je souhaiterais ainsi accueillir un public handicapé avec des sorties pédagogiques. »
Mais en attendant, il faut serrer les dents… « L’important, maintenant, c’est de continuer à travailler. On ne peut pas se permettre de tomber malade ou de se blesser aujourd’hui. Sinon, on devra mettre la clé sous la porte. »
Corentin Bemol