En Isère, des élus dénoncent l'aberration et l'incohérence du maintien de l'installation des nouveaux maires dans leurs fonctions. Et refusent de siéger.

Contestée par les élus qui refu­saient de sié­ger, l’ins­tal­la­tion des nou­veaux maires est reportée

Contestée par les élus qui refu­saient de sié­ger, l’ins­tal­la­tion des nou­veaux maires est reportée

FOCUS – En Isère, des élus dénon­çaient l’a­ber­ra­tion et l’in­co­hé­rence du main­tien de l’ins­tal­la­tion des nou­veaux maires dans leurs fonc­tions en rai­son des mesures de confi­ne­ment. Et refu­saient de sié­ger. À quelques heures de la mise en route du dis­po­si­tif, le gou­ver­ne­ment a fini par faire volte-face. Les nou­veaux maires ne siè­ge­ront pas avant le mois de mai. Dans le meilleur des cas…

Installation des nouveaux maires est reportée. Une Grenobloise relate le parcours du combattant pour les électeurs souhaitant voter pour une petite liste dépourvue de bulletins de vote dans les bureaux

Après le vote le 15 mars, l’ins­tal­la­tion des nou­veaux maires devait se faire d’ici le 20 mars.

En Isère, la grogne était pal­pable à quelques heures de l’ins­tal­la­tion des maires et de leurs adjoints dans les com­munes où un seul tour a per­mis de bou­cler le scru­tin, le 15 mars der­nier. Ces ins­tal­la­tions devaient se tenir du 20 au 22 mars.

Dans le dépar­te­ment, 441 com­munes devaient ainsi dési­gner, d’ici dimanche, qui serait aux manettes pour les six années à venir. Un dis­po­si­tif à huis clos, réduit au strict néces­saire, imposé par l’État au risque d’une inva­li­da­tion des élec­tions muni­ci­pales, ce qui a fait bon­dir des élus.

De fait, plu­sieurs ont annoncé refu­ser de se plier à la convo­ca­tion. À Gières comme à Claix, la liste d’op­po­si­tion, mino­ri­taire, n’en­ten­dait ainsi pas sié­ger. Pas ques­tion pour ces élus de « prendre un risque inutile ».

« Des règles de confi­ne­ment très strictes sont impo­sées pour toute la popu­la­tion et nous sommes sur­pris que la pré­fec­ture auto­rise la tenue de conseil muni­ci­paux, ce qui ne revêt aucun carac­tère de néces­sité abso­lue », poin­tait Nathalie Cotte qui en avait avisé le maire sor­tant réélu Christophe Revil, dans un courrier.

À Saint-Martin-d’Hères, deux des trois listes ont fait le choix de ne pas siéger

À Saint-Martin-d’Hères où la cam­pagne puis le vote ont été par­ti­cu­liè­re­ment ten­dus, deux des trois listes d’op­po­si­tion, celles de Mohamed Gafsi et de Georges Oudjaoudi, avaient éga­le­ment fait connaître leur absence samedi 21 mars au matin.

L'installation des nouveaux maires est reportée.Nombre de personnalités sont présentes. Ici et de gauche à droite : Jean-Pierre Barbier, Éric Piolle, Jean-Claude Peyrin, et Lionel Beffre. © Joël Kermabon - Place Gre'net

Le maire de Grenoble Eric Piolle comme le pré­sident du Département de l’Isère dénoncent une aber­ra­tion et une inco­hé­rence au vu des consignes sani­taires impo­sées par l’Etat. Ici aux côtés du pré­fet de l’Isère (à droite) © Joël Kermabon – Place Gre’net

Politique poli­ti­cienne ? Ou urgence sani­taire ? Le refus de ou des oppo­si­tions de sié­ger n’au­rait pas chan­ger grand chose au résul­tat final. Car pour que le vote soit validé, le conseil muni­ci­pal ne doit pas néces­sai­re­ment être au com­plet. En la matière, c’est la règle du quo­rum, à la majo­rité, qui s’impose.

Or, la liste ayant rem­porté les élec­tions en un tour ayant au mini­mum la majo­rité abso­lue – et au moins les trois-quarts des sièges au vu du cal­cul de répar­ti­tion –, impos­sible dans la pra­tique que l’ab­sence de ou des oppo­si­tions puisse empê­cher l’ins­tal­la­tion du nou­veau maire.

À moins de condi­tions excep­tion­nelles, comme celle de l’é­pi­dé­mie de coro­na­vi­rus et du néces­saire épi­sode de confi­ne­ment que tra­verse la France ?

Une « aber­ra­tion » pour Éric Piolle, une « inco­hé­rence » pour Jean-Pierre Barbier

Le maire de Grenoble a été le pre­mier en Isère à mon­ter au cré­neau. Grand favori au terme du pre­mier tour, Éric Piolle ne voyait pas les réunions d’ins­tal­la­tion des conseils muni­ci­paux d’un très bon œil, comme il en a fait part au Dauphiné libéré. « Une aber­ra­tion », selon lui.

Devant les urgences du CHU de Grenoble, 18 mars 2020. © Anissa Duport-Levanti - Place Gre'net

Devant les urgences du CHU de Grenoble, 18 mars 2020. © Anissa Duport-Levanti – Place Gre’net

« Il faut que les règles de Monsieur et Madame tout le monde s’ap­pliquent aux élus. Ce sont 30 000 com­munes et 500 000 élus qu’on va faire sor­tir ! On est dans une situa­tion de guerre. Le confi­ne­ment doit mar­cher pour tout le monde ! »

Il n’est pas le seul à être monté au cré­neau. Une fois n’est pas cou­tume, le pré­sident Les Républicains du Département de l’Isère a abondé dans son sens. « En main­te­nant l’ins­tal­la­tion des conseillers muni­ci­paux élus, l’État ne fait pas res­pec­ter sciem­ment la règle qui est de limi­ter à son maxi­mum les inter­ac­tions sociales », dénon­çait Jean-Pierre Barbier.

« Il n’y a aucune urgence et je consi­dère qu’il est urgent d’attendre »

« Il faut être cohé­rent et ne pas rajou­ter de la confu­sion à la confu­sion », pour­sui­vait le chef de l’exé­cu­tif dépar­te­men­tal qui jugeait « irres­pon­sable » telle déci­sion. « Il n’y a aucune urgence et je consi­dère qu’il est urgent d’attendre. »

Une urgence que le gou­ver­ne­ment a fini par recon­si­dé­rer ce 19 mars au soir, dans la plus grande impro­vi­sa­tion. Et une volte-face de der­nière minute. Dans la pra­tique, les équipes sor­tantes sont donc main­te­nues en place jus­qu’à la mi-mai et la remise du pro­chain rap­port du conseil scien­ti­fique. Pour être calées sur le second tour des élec­tions lui aussi reporté au plus tard en juin ?

Aura-t-il seule­ment lieu ? L’installation des nou­veaux maires comme le second tour sont plus que jamais sus­pen­dus à l’é­vo­lu­tion de l’é­pi­dé­mie. Comme le résume un élu isé­rois : « Le pre­mier tour des élec­tions n’au­rait tout sim­ple­ment jamais dû avoir lieu ».

Patricia Cerinsek

Patricia Cerinsek

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