FOCUS – La question des publics précaires et fragiles continue d’inquiéter sur fond de confinement pour cause d’épidémie de coronavirus. Après Médecins du monde et Solident, c’est au tour du Dal 38 de dénoncer l’absence de prise en charge des personnes les plus en difficultés, en attaquant tour à tour la préfecture de l’Isère et la Ville de Grenoble. Cette dernière répond en détaillant les actions mises en place.
Après l’appel lancé par Solident et Médecins du monde, c’est au tour du Dal 38 (Droit au logement) d’alerter sur les conditions de « confinement » des plus précaires. « Le préfet de l’Isère Lionel Beffre n’a rien fait, comme attendu, pour les personnes sans abris et les mallogéEs, premières victimes de l’épidémie », dénoncent ainsi les militants dans un communiqué en date du 17 mars. Non sans appeler à l’adoption urgente de mesures sociales.
Les publics concernés ? Les SDF en premier lieu. « Les sans-abris vont […] continuer à dormir sous les fenêtres de logements vacants et se faire dresser des PV de 38 euros toutes les heures », redoute le collectif. Autres personnes en situation précaire : les locataires redoutant une procédure d’expulsion de leurs logements ou une coupure d’électricité. « Et que dire de celles et ceux qui vont vivre le confinement comme une torture, dans des logements insalubres ou exiguës ? », ajoute encore le Dal.
Un appel à réquisitionner les logements vides
Face à la « guerre » contre le coronavirus, Droit au logement pose trois revendications. Tout d’abord, « un moratoire sur la part du loyer supérieure à 20 % du revenu de chaque locataire ». Ensuite, « le rétablissement intégral des APL et leur renforcement, couplé à une vraie baisse des loyers ». Et enfin, « un moratoire sur les factures impayées d’énergie, d’eau, de téléphone et d’internet pour cause de revenus ».
Les jeunes majeurs étrangers et leurs soutiens “investissaient” l’Hôtel de Ville de Grenoble lundi 16 mars pour demander des solutions de logement. © Grenoble en lutte – Facebook
Si le préfet est mis en accusation, les maires le sont tout autant. « Ils ont la possibilité d’agir, en qualité d’officier de police judiciaire en charge de l’ordre public, et le pouvoir de réquisitionner », estime le Dal. Qui rappelle que des jeunes majeurs étrangers se sont manifestés lundi 16 mars à l’Hôtel de Ville de Grenoble dans l’espoir d’obtenir des solutions de logement. « Le maire de Grenoble Éric Piolle n’a rien fait, tout comme la présidente de l’établissement public foncier local, Christine Garnier », juge le collectif.
« Les réponses données n’ont pas du tout été à la hauteur de la crise sanitaire, chacun se défaussant de ses responsabilités comme d’habitude, et pourtant le maire se pavane dans les médias nationaux, assurant qu’il “pense aux SDF et aux personnes qui vivent dans les squats” », lance sans ménagement le Dal. En appelant, une fois encore, à la réquisition des logements vides pour « contribuer à enrayer la propagation de la pandémie ».
La Ville de Grenoble conteste toute inaction
Inactive, la Ville de Grenoble ? Celle-ci répond à Place Gre’net avoir « interpellé la préfecture et la DDCS [Direction Départementale de la Cohésion Sociale, ndlr] » sur la situation des plus précaires. « La Ville de Grenoble est en attente des consignes, elle est prête à soutenir l’État dans l’indispensable prise en charge de ces personnes », indique-t-elle. Avant de détailler des actions d’ores et déjà mises en place, « souvent avec les associations d’aide aux plus fragiles ».
Le maire de Grenoble Éric Piolle a interpellé les services de l’État sur la question des plus fragiles en situation de confinement. © Raphaëlle Denis – Place Gre’net
Au programme ? Les agents libérés de leur fonction habituelle seront déployés en renfort « pour venir en aide aux Grenobloises et aux Grenoblois qui en ont le plus besoin ». Par exemple ? Dans les Ehpad, explique la Ville. Ou encore depuis leur domicile, en appelant les habitants figurant dans le fichier des personnes âgées et fragiles de la municipalité, également actif durant les périodes de canicule.
Malgré la fermeture des écoles, la Ville maintient par ailleurs l’activité de la cuisine centrale « pour cuisiner et livrer les repas pour les plus fragiles ». L’accès aux douches municipales est également renforcé et gratuit, tandis que des équipes du CCAS sont en charge de distribuer des produits d’hygiène. Enfin, toujours dans le registre des publics fragilisés, la Ville annonce dans les prochains jours « des actions avec les acteurs du territoire contre les violences conjugales ».
Florent Mathieu
LES HÉBERGEMENTS EN HÔTEL DÉNONCÉS PAR LES ASSOCIATIONS
La Cisem, le Dal 38 et La Dourbiee font état du « transfert imminent de 14 familles hébergées dans le cadre du plan hivernal à Pont-de-Claix vers des hôtels ». Un transfert que les associations de défense des mal-logés ne s’expliquent pas : EDF, société propriétaire du site d’hébergement, aurait donné son accord pour une ouverture du centre jusqu’au 31 mai.
Le préfet de l’Isère lors d’une visite du centre d’hébergement de Comboire. © Florent Mathieu – Place Gre’net
Souvent décrié, le logement dans les hôtels l’est encore plus en période de confinement. « Les personnes se retrouveront confinées dans des espaces plus petits, donc avec plus de promiscuité, sans cuisine, sans espace extérieur, sans accompagnement social ou médical adapté », dénoncent les militants. Et de citer l’exemple de l’Hôtel Voreppe, où « 140 personnes se partagent une cuisine de 20 m2 et une salle à manger de 40 m2 depuis des mois ».