EN BREF – À partir de ce lundi 4 novembre, la cour d’assises de l’Isère jugera de jeunes parents adeptes de l’islam salafiste, après la mort de leur petite fille de quinze mois. Le procès devrait durer deux semaines.
Dans la salle 6 du palais de justice de Grenoble, il sera question dans les jours à venir de la mort d’un bébé, d’islam salafiste, mais aussi, beaucoup, comme souvent dans les salles d’audience, de l’humain et de sa complexité.
Les jurés vont devoir se plonger dans un huis-clos familial, avec deux jeunes parents accusés de violences volontaires sur leur petite fille ayant entraîné sa mort sans intention de la donner, privation d’aliments ou de soins, et violences volontaires et habituelles. Ils risquent trente ans de réclusion criminelle.
Ni eau, ni électricité dans l’appartement
L’histoire devient publique le 1er mars 2017, alors que Sami Bernoui appelle des passants à l’aide, au pied de son immeuble de la rue André-Argouges à Grenoble. Sa fille, qu’il porte dans ses bras, est inanimée, son ventre est fortement gonflé, ses lèvres cyanosées, ses pupilles dilatées non réactives. Elle a une ecchymose, aussi, sur la joue gauche. À l’arrivée des secours, il est déjà trop tard, la petite Hafsa ne vit plus.
Sami Bernoui, 26 ans aujourd’hui, a rencontré Noémie Villard, 22 ans, à la fin de l’année 2014. Ils se sont installés, puis mariés religieusement en février 2015. Très vite, naît Hafsa en novembre 2015, puis un autre enfant en octobre 2016. Il n’y a ni eau, ni électricité dans l’appartement, et des cartons s’empilent un peu partout, comme en prévision d’un déménagement, qui n’a jamais eu lieu. La jeune femme y vit recluse avec l’obligation de rester voilée lors des rares visites d’étrangers.
Parcours de vie tumultueux
Les deux jeunes parents ont eu, chacun de leur côté, un parcours de vie tumultueux. Sami Bernoui a un père tyrannique, maltraitant, et une mère absente. À l’adolescence, il a tenté de se réfugier dans la danse, sa passion, mais a dû y renoncer du fait de l’arrêt du financement de ces activités. À l’âge de 20 ans, son nouveau refuge est alors devenu l’islam, plus encore le salafisme.
Noémie Villard a, elle, toujours été tiraillée entre les deux cultures de ses parents, à ne pas savoir comment se construire du fait des éternels conflits que cela provoquait dans son entourage. Son père a grandi dans une famille aux traditions catholiques. Sa mère est d’origine algérienne et musulmane.
Après s’être longuement tu, la jeune femme a finalement fait un choix, radical, pour l’islam salafiste, en portant notamment le voile intégral que sa mère avait pourtant toujours refusé.
Dès ses deux mois, leur fille Hafsa leur avait été retirée par la justice et confiée aux services sociaux. Sami Bernoui et Noémie Villard l’avaient de nouveau accueillie en octobre 2016, alors qu’ils attendaient leur deuxième enfant et dans le cadre d’une mesure d’assistance éducative. Cinq mois plus tard, Hafsa Bernoui est décédée.
Fanny Hardy