REPORTAGE VIDÉO – Ce dimanche, des femmes musulmanes soutenues par l’Alliance citoyenne se sont de nouveau baignées en burkini dans une piscine municipale à Grenoble. L’action de « désobéissance citoyenne » s’est cette fois déroulée à la piscine découverte Jean-Bron dans le centre-ville. Mais à la différence de leur première incursion à la piscine des Dauphins, les militantes devraient écoper d’une amende… de 30 euros.
Bis repetita, à Grenoble, une petite dizaine de femmes musulmanes ont violé le règlement des piscines municipales à Grenoble, et se sont baignées en maillot de bain couvrant – le fameux burkini –, ce dimanche 23 juin, à la piscine découverte Jean Bron.
Celles-ci étaient accompagnées de quelques hommes ainsi que de femmes en maillot autorisé. Plus nombreuses que lors de la première opération du même genre à la piscine des Dauphins, les militantes sont restées également plus longtemps dans l’eau, environ une heure.
Un événement très couvert par la presse. De fait, celle-ci avait été prévenue en amont par un communiqué lui demandant de ne pas diffuser l’information avant la tenue de cette action. L’intitulé de ce dernier ? « Action des Rosa Parks musulmanes à la piscine du 23 juin » du nom de la figure emblématique de la lutte contre la ségrégation raciale aux États-Unis. Une instrumentalisation selon leurs détracteurs, tels le militant féministe laïc Naëm Bestandji qui y voit « une insulte à sa mémoire ».
La police municipale est intervenue… après leur baignade
« Cela s’est bien passé, commente l’un des participants à l’action, qui se montre satisfait du déroulement des opérations. Le personnel de la piscine a préféré l’apaisement à la tension. Les femmes en burkini ont pu côtoyer des femmes avec un bikini, et tout le monde a passé un bon moment. »
Les choses se sont toutefois un peu gâtées par la suite pour les protagonistes. Les femmes en burkini n’étant pas sorties de l’eau malgré la mis en garde de la responsable de l’établissement, celle-ci a prévenu la police municipale.
Peu après, une dizaine d’agents sont arrivés, escortés par des CRS restés à l’extérieur de la piscine. Les policiers ont patiemment attendu que les personnes sortent de l’eau.
Postés devant les vestiaires, les agents municipaux ont alors demandé aux femmes en burkini de décliner nom, prénom et adresse, dans le but de leur adresser une amende pour avoir enfreint le règlement. En signe de solidarité, des militantes en maillot de bain ont tenu, elles aussi, à donner leurs coordonnées.
Les contrevenantes devraient recevoir une amende de 30 euros… mais ne la paieront pas forcément. Et pour cause : L’Alliance citoyenne compte organiser une collecte pour les soutenir.
Une opération burkini « plus stressante que la première »
Avant de se séparer en toute fin d’après-midi, les militants ont passé en revue l’opération du jour. Avec des appréciations mitigées sur l’événement. Ils semblent d’abord agréablement surpris d’avoir pu se baigner aussi facilement.
« L’effet de groupe protège, analyse Taous Hammouti, l’une des leaders du groupe, qui a participé à la précédente action à la piscine des Dauphins*. Toute seule, j’ai déjà par le passé tenté de me baigner à Échirolles, mais ça n’a pas marché ».
En revanche, les militants ne s’attendaient pas à l’intervention de la police municipale. À tel point que deux femmes en burkini n’avaient sur elles aucun papier d’identité à présenter.
L’une d’elles a, durant quelques instants, paniqué à l’idée de se retrouver au poste. « Cela aurait été disproportionné » juge Adrien Roux, directeur de l’Alliance citoyenne de l’agglomération grenobloise. Au final, les policiers ont simplement demandé aux personnes accompagnant les deux militantes de confirmer leur identité.
La vue des CRS a aussi choqué certaines d’entre elles. Et globalement, les participantes ont trouvé cette opération « plus stressante que la première ». L’un d’elle qui s’est baignée en burkini redoute que « la prochaine fois, ce soit encore plus difficile ».
Sur place, des nageurs globalement bienveillants
« Préparez-vous maintenant à du cyberharcèlement », a lancé Léa Gallois, coordinatrice à l’Alliance citoyenne, s’adressant aux femmes en burkini, un peu avant que le groupe ne se sépare. Force est en effet de constater que les photos de femmes en burkini se baignant à la piscine suscitent beaucoup de réactions d’internautes sur les réseaux sociaux, le plus souvent hostiles.
A contrario, ceux qui ont assisté en direct à la baignade des femmes en burkini se sont montrés plutôt indifférents, si ce n’est bienveillants.
« À partir du moment où cela ne dérange pas l’ordre public, pourquoi les priver de la piscine ? », interroge une dame d’environ cinquante ans ; son mari et ses enfants, partageant son avis.
Quelques personnes se sont mêmes déclarées choquées d’apprendre que les femmes en burkini n’avaient pas le droit de se baigner à la piscine. « Je ne me rends pas bien compte de ce qui pose problème, déclare pour sa part un jeune trentenaire. Je suis plutôt pour. Il y a des sujets plus graves que celui-là. »
Une sexagénaire et sa fille ont tout de même manifesté leur désapprobation. « Ces femmes n’ont pas à être là. Le règlement, c’est le règlement. C’est comme les shorts pour les hommes, ils sont interdits. »
Séverine Cattiaux
* Suite à quoi des internautes avait rendu publics plusieurs de ses posts Facebook justifiant notamment l’attentat contre Charlie Hebdo ou à teneur complotiste.