EN BREF — Du lundi 3 au samedi 8 juin, avec en point d’orgue un stand dédié durant la Fête de Tuiles, la Ville de Grenoble organise une collecte de serviettes hygiéniques à l’intention des femmes en situation de précarité. L’occasion, estime le maire Éric Piolle, de porter dans le débat public le tabou sociétal autour des menstrues, au-delà des clichés ou des non-dits.
Pour la Ville de Grenoble, l’initiative est aussi pratique que symbolique. Du lundi 3 au samedi 8 juin, la municipalité et des associations partenaires (l’Amicale du nid, l’Appart, Femmes SDF et le Planning familial) procède à une grande collecte de serviettes hygiéniques en faveur des femmes en situation de précarité.
L’Hôtel de Ville, le CCAS et les Maisons des habitants seront ainsi équipés d’urnes où les citoyens pourront déposer ces articles d’hygiène relativement coûteux.
Point d’orgue de l’opération : un stand spécialement dédié à la question durant la Fête des Tuiles du samedi 8 juin. Car, souligne le maire de Grenoble Éric Piolle, la volonté de la Ville est « clairement de percer un tabou », en portant la question des menstrues dans l’espace public. Et de contredire les représentations édulcorées des publicités ou les idées reçues. Autrement dit, « faire un vrai travail culturel sur cette question », juge l’élu.
« Ce n’est que le début »
Les règles, un facteur de discrimination ? « C’est une inégalité pour toutes les femmes, mais en particulier pour les plus fragiles », souligne encore Éric Piolle. En France, une femme sur trois n’aurait pas les moyens de se procurer des serviettes périodiques.
Le Planning familial a fait les comptes : « Une personne menstruée dépensera au cours de sa vie entre 3 000 et 20 000 euros », écrit-il. La somme englobe aussi les médicaments anti-douleurs, l’achat de nouveaux sous-vêtements, les arrêts de travail en lien avec les douleurs menstruelles, etc.
« Personne menstruée », c’est en effet le terme que préfère employer le Planning familial, qui juge visiblement le mot « femmes » trop restrictif. Une manière encore pour ses représentantes d’insister sur la dimension politique comme sociétale de la question.
Pour Pauline Coiffard et Pilar de Bernardy, il n’est pas normal de « payer pour saigner ». Le Planning familial attend ainsi de l’État la gratuité des protections périodiques et des distributeurs dans les lieux publics… mais aussi la transparence sur la composition des protections.
Éric Piolle abonde : pour lui, l’initiative de la Ville de Grenoble vient en réponse à un manquement de l’État sur la question du coût des menstrues. Et le maire de Grenoble d’assurer que cette collecte de serviettes hygiéniques préfigure d’autres actions.
« Cette semaine-là c’est une première étape, c’est très important de passer par là ! », confirme pour sa part Alexia Choquet.
Des coupes menstruelles au lieu de serviettes hygiéniques ?
La directrice de Femmes SDF espère par la suite voir naître des solutions plus pérennes, notamment via le groupe de réflexion constitué par sa propre association.
Des solutions plus pérennes et peut-être plus écologique ou confortable ? Si les préoccupations environnementales pèsent (parfois) peu face à la précarité, les serviettes hygiéniques n’en représentent pas moins des tonnes de déchets. Et de plus en plus de femmes se tournent vers des techniques alternatives, comme les coupes menstruelles, réputées plus saines et plus confortables.
« Si on demande en priorité des serviettes, c’est parce qu’on s’adresse, dans un premier temps, à un public de personnes qui vivent dans la rue », explique Pauline Coiffard. Envisager des coupes menstruelles pour les femmes SDF ? Pourquoi pas… à condition que ces personnes aient également accès à la possibilité de les nettoyer et les stériliser tous les jours. Soit, encore une fois, une nouvelle étape à franchir.