FOCUS – Le laboratoire Lemon a lancé GreenZenTag II, une nouvelle campagne de mesure du taux de particules fines sur l’agglomération grenobloise. Depuis ce 23 janvier, vingt bus équipés de microcapteurs « reniflent » ainsi la qualité de l’air sur la ligne Chrono C1. L’objectif ? Affiner la connaissance de la pollution atmosphérique sur une zone géographique donnée. Mais aussi compléter les dispositifs de surveillance actuels avec des mesures géolocalisées fournies en temps réel.
« Nous ne sommes pas un territoire plus pollué que d’autres mais nous avons encore beaucoup à faire pour reconquérir la qualité de l’air et respecter la réglementation européenne ».
C’est ainsi, à bord d’un bus de la ligne C1, que Yann Mongaburu, président du SMTC, a introduit, ce 23 janvier, la présentation de l’expérimentation GreenZenTag II. Un anglicisme pour désigner une nouvelle campagne de mesure du taux de particules fines (PM10, PM2,5 et PM1) présentes sur l’agglomération de Grenoble. Un test à grande échelle porté par Lemon1Lemon est un laboratoire au sein duquel le SMTC et Transdev, le partenaire industriel et commercial de la Sémitag, travaillent sur les problématiques de la mobilité., le Laboratoire d’expérimentation des mobilités de l’agglomération.
Des bus « renifleurs de pollution »
Après les toits des tramways de la ligne A pour GreenZenTag, première expérimentation avec des capteurs mobiles, les bus de la ligne Chrono C1 sont donc mis à contribution. Vingt véhicules « renifleurs de pollution » circulent ainsi avec des capteurs sur l’axe Grenoble-Meylan pour GreenZenTag II.
Ces derniers fournissent, toutes les dix secondes depuis ce 23 janvier, près de 65 000 données journalières géolocalisées et horodatées. Le tout jusqu’à la fin mars. De quoi compléter les dispositifs actuels mis en œuvre pour la surveillance de la qualité de l’air de la métropole. Mais aussi enrichir la connaissance de la pollution régnant sur cette zone multimodale, urbaine et périurbaine.
Mesurer le taux de particules et d’autres paramètres en temps réel
« Rendre visible ce qui est invisible », telle est bien la finalité de cette expérimentation GreenZenTag II, réalisée à l’aide de capteurs développés par Atmotrack, une jeune pousse nantaise « Nous avons conçu ces capteurs pour qu’ils soient utilisés en mobilité », explique Romain Scimia, l’un des fondateurs de la société. De fait, ces derniers répondent à un cahier des charges très strict et leurs mesures ont été comparées avec celles des stations fixes d’Atmo Auvergne Rhône-Alpes.
Outre leur capacité à mesurer les particules lors du déplacement des bus en temps réel, ces détecteurs vont également enregistrer d’autres types de paramètres.
Notamment la température et l’humidité de l’air, la pression barométrique et les niveaux sonores. L’intérêt de ces autres mesures complémentaires ?
« Encore mieux caractériser les données de qualité de l’air ainsi remontées. Elle seront ensuite transmises à Atmo AuRA pour y être traitées et analysées », précise Romain Scimia. Mais ce n’est pas tout. Ce dispositif comprend également un capteur d’Atmotrack supplémentaire implanté dans une station fixe d’Atmo AuRA située boulevard Foch. Son rôle ? Comparer et valider la fiabilité des données recueillies tout au long des trente-deux minutes du parcours.
Réussir à intégrer de la donnée mobile en temps réel dans l’observatoire d’Atmo AuRA
« Nous disposons d’un réseau de 90 stations fixes de mesures à l’échelle de la région. Il permet de cartographier l’ensemble des polluants atmosphériques », enchaîne Camille Rieux, référent territorial d’Atmo AuRA. Autant dire que cet observatoire de surveillance de la qualité de l’air est un partenaire clé dans la chaîne de traitement des mesures.
Camille Rieux l’affirme, l’expérimentation GreenZenTag II va lui permettre d’améliorer son optimisation. « Une des pistes clairement identifiée pour l’optimiser est de réussir à intégrer de la donnée de mesures mobiles en temps réel », expose le référent.
Ce dernier évoque quelques applications opérationnelles sur lesquelles pourrait déboucher GreenZenTag II : pouvoir investiguer des zones mal caractérisées par l’observatoire seul, ou pouvoir intégrer cette donnée mobile directement dans l’observatoire. Une idée « complexe et intéressante » qui permettrait d’augmenter sa résolution spatio-temporelle.
Enfin, poursuit le référent, « sur les territoires où il y a peu d’outils d’observation, cela pourrait autoriser la création d’un observatoire de préfiguration “low cost” ».
Afin de ne pas générer de confusion dans les esprits, Camille Rieux tient à marquer la différence entre l’expérimentation de capteurs citoyens et GreenZentag II. « GreenZenTag c’est de la capture de données techniques pour alimenter l’observatoire. Les capteurs mobiles citoyens, c’est plus pour de l’appropriation et de la compréhension », précise-t-il.
La ligne Chrono C1 choisie pour sa fréquence et son amplitude horaire
Pourquoi avoir choisi la ligne Chrono C1 pour cette expérimentation ? « Il y avait une pertinence à être sur une ligne Chrono à haute fréquence », répond Yann Mongaburu. Or, toutes les lignes de bus ne répondant pas à cette exigence, la C1 s’est imposée avec sa fréquence de 7 à 10 minutes et son amplitude de service de vingt heures par jour.
Autre facteur qui a joué en faveur de la C1 : cette ligne qui relie la Presqu’île de Grenoble au technopole Inovallée à Meylan explore une zone géographique diversifiée. Avec des territoires allant de l’urbain dense au périurbain des communes de La Tronche ou de Meylan. De surcroît, ces vingt bus empruntent des axes de circulation multimodaux.
Une configuration intéressante, estime le laboratoire Lemon. Et pour cause. « En côtoyant des véhicules motorisés, les bus sont de fait confrontés à la réalité de la pollution de l’air. » Un contexte dont GreenZenTag II tient bien évidemment compte. « Nous prenons en considération les aléas de la circulation. Tels des embouteillages, des travaux ou la présence d’un véhicule particulièrement polluant », assure Lemon. Autant d’épiphénomènes qui resteront à identifier lors de la phase d’analyse de l’expérience.
Une campagne de communication « qui a du chien »
« Nous allons entamer une campagne de communication “qui a du chien” pour accompagner cette démarche à travers l’humour », déclare Christine Chary, responsable des partenariats chez Transdev. Affiches, habillage des bus, relais digitaux… Dès le 12 février, les arrêts et bus de la ligne C1 mettront en scène ces « renifleurs de pollution ».
Les objectifs visés ? « Faire connaître l’expérimentation et concrétiser l’engagement environnemental des partenaires du projet », explique Lemon. Mais aussi sensibiliser le public à la qualité de l’air et de valoriser « le comportement vertueux des usagers de la ligne C1 ».
Pour compléter le tout, des écrans embarqués vont équiper les bus de la ligne C1. Ces moniteurs diffuseront une équation convertissant le nombre de passagers des bus en tonnes de CO2 non rejetées dans l’air.
L’idée ? Valoriser les usagers n’ayant pas utilisé leur voiture et les inciter à convertir leurs amis et collègues. Une manière de prouver « que la somme des actions individuelles au quotidien participe à maintenir une bonne qualité de l’air ».
Joël Kermabon