FIL INFO – Le groupe d’analyse métropolitain s’est constitué partie civile dans la plainte qu’il vient de déposer pour faux et usage de faux en écriture publique, détournement de fonds publics en réunion et blanchiment dans l’affaire du rachat du bâtiment de la caisse régionale du Crédit agricole à Grenoble. Objectif : pousser à la désignation d’un juge d’instruction alors que le parquet, saisi à deux reprises, n’a jamais donné suite aux plaintes jusque-là déposées.
Le rachat du siège de la caisse régionale du Crédit agricole à Grenoble vient de faire l’objet d’une plainte pour faux et usage de faux en écriture publique, détournement de fonds publics en réunion et blanchiment auprès du doyen des juges d’instruction*.
À l’origine de cette plainte contre X avec constitution de partie civile, déposée concomitamment à celle sur les marchés de la fête des Tuiles, le groupe d’analyse métropolitain (Gam).
À plusieurs reprises, le Gam s’était ouvertement étonné des conditions du rachat fin 2015 du bâtiment Claudel par la Ville de Grenoble. Ses deux plaintes, auprès du procureur de la République de Grenoble et du parquet national financier – lequel avait alors renvoyé sur Grenoble – n’ont jamais donné lieu à une suite judiciaire.
Procédures irrégulières, manœuvre frauduleuse ?
Les magistrats financiers, eux, y ont trouvé à redire. Dans son rapport sur la gestion de la Ville de Grenoble, et sur lequel s’appuie le porte-parole du Gam, la chambre régionale des comptes pointe de graves irrégularités sur le dossier du Crédit agricole. Et notamment des décisions prises rapidement, de manière peu transparente, à la demande de la banque et à des conditions financières peu avantageuses pour la collectivité.
Car le bâtiment a été racheté par la Ville de Grenoble 8 millions d’euros, mobilier compris. Un rachat bien en-deça du prix du marché comme nous l’écrivions en décembre 2016 et comme l’appuie la CRC, pour qui le coût d’acquisition effectif (prix d’acquisition et baisse de loyer consentie) aurait dû être à minima de 9,2 millions d’euros.
Le temps que le Crédit agricole déménage dans ses nouveaux locaux, le bâtiment lui a en effet été reloué 300 000 euros par an, là aussi nettement en-dessous du prix du marché. La CRC estime qu’il aurait dû être loué 1,1 million d’euros. Quand bien même la collectivité fait supporter à la banque la taxe foncière (400 000 euros), la Ville a‑t-elle fait une fleur au Crédit agricole ?
En consentant à diminuer le prix de location pour faire baisser le prix d’acquisition, la chambre considère que la Ville a octroyé un avantage concurrentiel indu. Une procédure « irrégulière puisqu’elle conduit à contracter dépenses et recettes et qu’elle a pour effet de dissimuler le prix réel de l’acquisition ».
Une « manœuvre frauduleuse » juge le porte-parole du Gam, Pascal Clérotte, pour qui l’acte de vente, en ne mentionnant que la seule somme de 8 millions d’euros, a permis de « gommer » la remise de loyer.
« La remise de loyer ne figure de ce fait ni dans les comptes de la Ville de Grenoble ni dans ceux de Caisse régionale du Crédit agricole Sud Rhône-Alpes, souligne Pascal Clérotte dans sa plainte. Cette remise de loyer est par conséquent noircie, ce qui relève du même délit que le blanchissement. »
PC
* La plainte contre X avec constitution de partie civile permet de passer outre le parquet. Le doyen des juges d’instruction peut, s’il le juge nécessaire, désigner un juge d’instruction qui ouvrira alors une information judiciaire.