TRIBUNE LIBRE – Michel Savin, sénateur de l’Isère, s’offusque du hashtag #BalanceTonMaire diffusé sur les réseaux sociaux par des militants En marche pour dénoncer les maires ayant augmenté leur taxe d’habitation. Des attaques délétères pour l’esprit républicain et injustes, selon l’élu, dans un contexte de baisse des dotations de l’État.
Depuis vingt-quatre heures, les élus locaux et les maires de nombreuses communes ont été livrés au tribunal de l’opinion publique. Alors que de nombreux Français se plaignaient de la hausse de leur taxe d’habitation (contraire à l’engagement de suppression du Président Macron), le gouvernement a trouvé bon de nommer précisément les communes où le taux de la taxe d’habitation a augmenté. Étrangement, il n’a pas réussi à rendre aussi lisible et accessible le nom des communes pour lesquelles les dotations de l’État diminuent…
Les militants marcheurs, soutenus par le gouvernement, ont alors trouvé de bon goût de lancer le hashtag #BalanceTonMaire sur les réseaux sociaux. Les maires et les élus locaux sont aujourd’hui les derniers élus auxquels les Français font encore confiance. Ce sont eux qui chaque jour sont sur le terrain, répondent aux inquiétudes et agissent pour l’intérêt général, dans des conditions de plus en plus précaires. Comme le dit si bien le président du Sénat Gérard Larcher, les maires sont « à portée d’engueulades ».
Face au nombre de compétences déléguées par l’État en croissance continue, ils font face à des budgets toujours plus contraints, l’État oubliant souvent de déléguer les budgets en même temps que les compétences.
Un moyen de faire oublier le niveau record d’impopularité ?
Finalement, face à l’adversité et sans autres moyens, de nombreuses communes, qui souhaitent maintenir des services de proximité et de qualité et face au retrait massif du soutien de l’État, n’ont d’autres choix que d’augmenter la taxe d’habitation.
L’application du principe du name and shame (nommer et faire honte) envers les élus locaux abîme un peu plus notre contrat républicain. Peut-être est-ce là un moyen pour le gouvernement et sa majorité de faire oublier le niveau record d’impopularité auquel ils font face ? Une telle pratique ne peut en tout cas que renforcer le sentiment de défiance des citoyens envers les élus, renforcer la réponse populiste.
Alors que de plus en plus d’élus locaux démissionnent en raison de leur impossibilité d’agir dignement pour les citoyens et de leur sentiment d’impuissance face à la technocratie étatique, il m’est insupportable de les voir désormais livrés à une vindicte populaire orchestrée sur les
réseaux sociaux.
Après #BalanceTonMaire, #Balancetongouvernement ?
Aussi, face au bon goût du hashtag #BalanceTonMaire, pourquoi ne pas lancer le hashtag #Balancetongouvernement ?
#Balancetongouvernement qui a rompu le lien de confiance entre les élus locaux et l’État ;
#Balancetongouvernement qui annonce la suppression de la taxe d’habitation sans trouver de moyen viable d’assurer la compensation des 26 milliards d’euros annuels manquants ;
#Balancetongouvernement qui oblige les collectivités à limiter à 1,2 % la croissance des coûts de fonctionnement quand celui de l’État s’envole ;
#Balancetongouvernement qui envisage potentiellement de supprimer 50 000 postes de fonctionnaires mais qui demande aux collectivités d’en supprimer 70 000 ;
#Balancetongouvernement qui a supprimé la réserve parlementaire qui été fléchée pour 100 millions d’euros vers les projets des collectivités (et ne compense partiellement qu’à hauteur de 50 millions d’euros) ;
#Balancetongouvernement qui demande des efforts et des économies aux collectivités mais qui creuse chaque année son déficit ;
#Balancetongouvernement qui délègue toujours plus de compétences mais qui oublie de déléguer les financements et de les maintenir.
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