FIL INFO – La loi Élan, une loi en défaveur des plus précaires pour favoriser les sociétés privées et les marchands de sommeil ? C’est le portrait que dresse l’association Droit au logement 38 (Dal 38) dans une lettre ouverte adressée aux six parlementaires En marche de l’Isère, à l’occasion de la journée de mobilisation nationale qui s’est tenue le 1er septembre.
Dans le cadre de la mobilisation nationale contre la loi Élan (évolution du logement et aménagement numérique) le samedi 1er septembre, le Dal 38 adresse une lettre ouverte aux huit députés En marche de l’Isère*. Objet de la missive ? Dresser un plaidoyer contre une loi jugée « anti-pauvres » et vouée au profit « des groupes immobiliers et des grands propriétaires ». Et rappeler que, pour les militants, « le logement doit rester un droit fondamental ».
Les habitants sans titre « criminalisés »
Le Dal énumère ses motifs de rejet du texte de loi, qui devrait être adopté sous peu par l’Assemblée nationale. En premier lieu, la volonté de « criminaliser les habitants sans titre », autrement dit les squatteurs, les sous-locataires ou encore les personnes ayant reçu une notification de jugement d’expulsion. « La loi veut pénaliser l’occupation de logements vides […] sans délai et sans jugement, alors même que la loi de réquisition n’est pas appliquée et que 160 000 personnes sont à la rue en France », dénonce l’association.
Et le Dal de prendre pour exemple les bâtiments occupés de Grenoble. Autant de squats « menacés par ces mesures, alors qu’ils constituent des solutions de logements pour des dizaines de ménages que les pouvoirs publics ne prennent pas en charge », écrit-il. Des solutions toutefois insalubres, comme dans les locaux désormais emblématiques situés au 6 rue Jay, où l’électricité a été de nouveau coupée.
Un loi pour les « marchands de sommeil », juge le Dal
Autres griefs : la création d’un « bail mobilité » de trois à neuf mois, qui obligerait les publics précaires comme les étudiants ou les ménages modestes à accepter des baux de location temporaires, « au mépris du besoin essentiel de stabilité de vie et de loyers adaptés aux revenus ». En somme, une disposition qui avantagerait les « marchands de sommeil » louant des logements dégradés, comme l’association dit en avoir visité dans certains quartiers de Saint-Martin-d’Hères.
De plus, en instaurant des “périodes probatoires” de deux ans pour les locataires sous le coup d’une procédure d’expulsion, la loi Élan renforcerait « la menace d’une expulsion locative » des publics en CDD ou en intérim, estime le Dal. Qui prend l’exemple de la Villeneuve, où des rénovations occasionnent une hausse du coût du logement. Certains foyers seraient ainsi plus rapidement expulsables avant d’avoir pu trouver un lieu adapté à leurs revenus, jugent les militants.
Menace sur les logements sociaux ?
Enfin, le Dal s’inquiète de la situation du logement social. La loi Élan prévoit de rapporter l’obligation de 25 % de logements sociaux au niveau des intercommunalités, « permettant à certaines communes de rester en dessous des 25 % ». Les bailleurs sociaux seront par ailleurs dans l’obligation de vendre au moins 1 % de leur parc. Si la loi parle de revente aux locataires afin de faciliter l’accès à la propriété, le collectif voit surtout une opportunité offerte aux sociétés privées.
Une appropriation du logement social par des acteurs privés, au détriment des organismes locaux, qui pourrait peser lourd sur les réalités de terrain, estime l’association. « Les décisions se prendront toujours plus loin, au mépris des concertations et de la proximité avec les locataires », écrit ainsi le Dal. Qui prend une nouvelle fois la Villeneuve pour exemple, où les habitants du 10 – 20 de l’Arlequin « peinent à se faire entendre par le bailleur CDC habitat ».
FM
* Olivier Véran, Jean-Charles Colas-Roy, Émilie Chalas, Catherine Kamowski, Cendra Motin, Monique Limon (orthographiée « Lomin » dans le courrier), Caroline Abadie et Marjolaine Meynier-Millefert.