FOCUS – Le déblocage du Centre de langues vivantes (CLV) sur le campus de Saint-Martin-d’Hères n’a pas été sans mauvaises surprises. Les tags et destructions de matériel pourraient représenter plus d’un million d’euros de dégâts, estime l’Université Grenoble-Alpes. Des dégradations coûteuses qui suscitent indignation et condamnations.
« Plus que 20 m2 de dégradations et BFM fait le déplacement », proclame l’un des (très) nombreux tags figurant sur les murs du bâtiment occupé durant plusieurs semaines du Centre de langues vivantes (CLV), sur le campus de Saint-Martin-d’Hères. Message lucide s’il en est : de BFMTV au Parisien, en passant par Valeurs actuelles ou Libération, la presse nationale a largement relayé les dégâts constatés… quitte parfois à citer en boucle la même dépêche AFP.
« Ces tags ne sont pas du fait de l’assemblée générale, ce sont des personnes qui ont pris individuellement cette initiative », a insisté auprès de Place Gre’net Jean-Loup de Saint-Phalle, du syndicat Solidaires Étudiants. Et le syndicaliste de regretter que les dégradations passent avant le message politique porté par les étudiants bloqueurs. Avant d’accuser, comme d’autres récemment, le président de l’Université Grenoble-Alpes (UGA) Patrick Lévy de les instrumentaliser.
Les dégradations n’en sont pas moins bien réelles, comme en témoignent les nombreuses photographies ou vidéos qui circulent dans la presse autant que sur les réseaux sociaux. Murs et sol tagués, matériel informatique vandalisé… Les dégâts sont estimés à plus d’un million d’euros et le CLV ne devrait pas être en mesure de rouvrir avant 2019. Quelle prise en charge des assurances ? Sollicitée, l’Université Grenoble-Alpes n’a pas donné suite à notre demande d’entretien.
Condamnation du Conseil régional
Les réactions n’ont, elles, pas tardé. À commencer par celle du Conseil régional Auvergne-Rhône-Alpes, qui condamne dans un communiqué les dégradations, qualifiées de « saccage systématisé » et « spectaculaire ». « Sous couvert d’une vision romantique de l’opposition au projet de loi Vidal, c’est en réalité une intolérable politique du chaos qui s’est organisée à l’intérieur des locaux », juge ainsi le Conseil régional.
Signifiant son engagement auprès des universités, qui « participent au rayonnement et à l’attractivité du territoire », la Région affirme encore qu’elle se « tient prête pour étudier les modalités afin d’aider les étudiants grenoblois à retrouver le plus rapidement possible un cadre d’enseignement décent ». Tout en appelant à ce que les responsables des dégradations constatées soient « retrouvés et punis avec la plus sévère rigueur ».
« Les sales connards des partis de gauche et d’extrême gauche »
Sans surprise, les étudiants opposés aux blocages expriment leur colère sur les réseaux sociaux. Le groupe Facebook Contre les blocages à l’UGA moque ainsi le mouvement de mobilisation : « Rappelons que ces révolutionnaires du dimanche font de la hausse du budget de l’enseignement supérieur leur priorité. Admirez l’estime qu’ils ont pour le bien public », écrit-il. Avant d’attendre une « fermeté totale » de l’UGA à la rentrée universitaire.
La charge la plus violente provient probablement du directeur du DLST (Département Licence Sciences et Technologies) de l’UGA. Sur sa page Facebook, sans restriction d’accès, ce dernier n’a jamais ménagé ses insultes, souvent réciproques, contre les étudiants bloqueurs.
Il s’exclame face aux dégradations du CLV : « J’attends maintenant de voir ce que les sales connards des partis de gauche et d’extrême gauche et des syndicats non réformistes qui ont pleinement soutenu cette occupation […] vont pouvoir nous dire. » Avant de décrire en commentaire « une bande de porcs et de voyous » au sein du mouvement étudiant… et des syndicats jugés complices.
Les Jeunes insoumis se désolidarisent des dégradations
Si le ton est évidemment différent, la condamnation n’est pas moins sans équivoque du côté des Jeunes Insoumis de Grenoble. Sur Facebook à son tour, le mouvement écrit ainsi « condamner résolument les dégradations commises dans et autour du CLV par une poignée de libéraux-libertaires ». Des agissement que les jeunes insoumis veulent clairement distinguer du mouvement de contestation contre la loi Vidal.
Une prise de position qui ne manque pas de susciter des débats entre insoumis dans les commentaires mêmes du statut Facebook. « Pour l’union de la gauche, on repassera », s’agace ainsi une internaute. Suscitant une réponse sans appel : « L’unité a été rompue par ceux qui ont dégradé en ignorant les décisions collectives ». Alors que le mouvement doit reprendre à la rentrée sur le campus, le débat sur les modes d’action et de représentativité semble destiné à perdurer.