Le rapport du médiateur Édouard Couty sur la situation que traverse le CHU Grenoble Alpes est accablant. Les cas de souffrance au travail et de maltraitance se multiplient dans les services. La direction de l’hôpital était convoquée le 5 janvier à Paris pour présenter un plan d’actions.
Le rapport du médiateur national Édouard Couty sur la situation que traverse le CHU Grenoble Alpes est accablant : les cas de maltraitance et de souffrance au travail se multiplient, que ce soit en neurochirurgie, où un jeune praticien a mis fin à ses jours le 2 novembre dernier, en néphrologie, en réanimation, en neurologie, en biologie, en pharmacie ou encore au sein du service qualité et odontologie.
C’est ce qui ressort du rapport remis à la ministre de la Santé et dont le Quotidien du médecin a eu une copie. Alors que la direction de l’hôpital grenoblois était convoquée à Paris vendredi 5 janvier pour remettre à Agnès Buzyn un plan d’actions basé sur les recommandations de l’expert, le constat est sans appel.
« Rudesse » et « violence »
Édouard Couty a auditionné une trentaine de personnes. À chaque fois, c’est peu ou prou le même scénario qui se dessine sur fond d’enjeux de pouvoir. Le médiateur évoque un affrontement générationnel et une mésentente entre praticiens déjà en poste et nouveaux arrivants.
En néphrologie, une jeune praticienne est ainsi en arrêt maladie depuis mai 2017*, relève la publication médicale. Ce qui lui est reproché ? « Sa rigidité et son manque de dialogue, tout en se comportant avec elle d’une manière qu’on pourrait qualifier de maltraitance », d’après le rapport Couty.
En réanimation, les tensions ont pris une telle dimension qu’elles ont paralysé tout un service, quatre médecins ayant donné leur démission il y a bientôt deux mois, d’après nos informations.
Dans ce service, le médiateur Édouard Couty parle sans détours de « rudesse », de « violence » et, plus grave, d’une situation qui « rejaillit sur la prise en charge des malades ».
Simples différents entre personnes ? Les tensions sont visiblement exacerbées par une situation économique devenue inextricable pour le CHU et, derrière, tous les hôpitaux en France. A Grenoble, la pression sur les services pour engranger plus d’activité, et donc plus de rentrées d’argent sans créer plus de postes, a conduit les deux endocrinologues du service de diabétologie pédiatrique, en burn-out, à se mettre en arrêt-maladie. Dans son audit, le médiateur pointe d’ailleurs un « management très orienté vers les problématiques budgétaires ».
« Il manque une attention particulière aux difficultés et aux souffrances des personnels médicaux, un accompagnement et une gestion personnalisée des personnes en grande difficulté, une meilleure articulation entre médecine du travail, CME [commission médicale d’établissement, ndlr] et direction », ajoute l’expert missionné par le gouvernement.
La semaine dernière, un ancien chirurgien professeur d’université au CHU a annoncé avoir porté plainte contre X pour harcèlement moral.
PC
- * Mesure « punitive » prise par le CHUGA, la praticienne a été mutée avec son poste dans un autre établissement.