REPORTAGE VIDÉO – Le réseau Tag mène actuellement une campagne de communication de lutte contre la fraude qui vient renforcer le dispositif Tous en règle ! déployé depuis deux ans par la Sémitag. L’opération reprend sur un ton humoristique les excuses “bidons” fournies aux contrôleurs par les contrevenants pris sur le fait à bord des rames de tramway ou des bus. Car la fraude, bien qu’en diminution, coûte très cher à la collectivité, avec un manque à gagner de l’ordre de 2 millions d’euros.
« Ah bon, c’est payant ? », « C’est ma tante qui a ma carte de transport ! » ou encore « Moi qui pensais avoir un ticket avec la Tag ! »
Telles sont, parmi toutes les excuses récurrentes et souvent farfelues entendues lors de leurs contrôles, les trois qu’ont choisies les 54 contrôleurs du réseau Tag pour coproduire avec la Sémitag et le SMTC une nouvelle campagne de lutte contre la fraude.
Collant à la réalité du terrain, ces phylactères inspirés de ceux des bandes dessinées fleurissent depuis le 20 octobre et jusqu’au 22 novembre sur les 900 affiches apposées sur les 300 stations de tram et 600 arrêts de bus du réseau Tag. L’objectif de cette campagne ? Alerter de manière positive et humoristique sur le coût de la fraude, tout autant que la réduire et prévenir la verbalisation.
« Sans ticket, le tramway est au prix de l’avion »
Toujours est-il que cette première campagne de communication n’est pas complètement le fruit du hasard. Elle coïncide avec le changement de tarif des amendes forfaitaires qui sanctionnent les infractions pour défaut de titre valide. Sachez que, depuis le 20 octobre, il pourra vous en coûter jusqu’à 111 euros, au lieu de 89,50 euros, si vous vous faites pincer à circuler sans ticket et que vous payez votre amende en retard. Pour ne pas prendre les voyageurs au dépourvu, un message dissuasif est déployé à l’intérieur des tramways, les avertissant que « sans ticket, le tramway est au prix de l’avion ».
Retour en images sur le lancement de cette opération au cours duquel, outre une rencontre avec Jean-Paul Trovero le président de la Sémitag, nous avons pu suivre, discrètement, une équipe de contrôleurs dans l’exercice de leurs fonctions.
Reportage Joël Kermabon
La fraude, bien qu’en baisse, continue à coûter cher à la collectivité
Qu’elle soit intentionnelle, accidentelle ou fortuite, la fraude coûte cher et a un impact économique et sociétal important sur la collectivité, même si elle est en recul sur l’agglomération. Imaginez : ce sont pas moins de 2 millions d’euros qui s’évaporent. De quoi acheter cinq bus ! Les lignes les plus concernées ? La ligne de tram A, suivie de la ligne C avec, en bas du podium, la ligne de bus 11. Quant au taux de fraude moyen, il se situe dans la fourchette de 12 à 13 % des 88 millions de voyages enregistrés sur le réseau Tag en 2016.
Pour endiguer la fraude, tous les jours, 32 agents de prévention et 54 contrôleurs-voyageurs assermentés vérifient les titres de transport de plus de 15 000 voyageurs sur les 400 000 qui circulent sur le réseau Tag. Des contrôles inopinés qui, malgré des techniques de fraude variées, portent leurs fruits.
Notamment grâce au dispositif « Tous en règle ! » Lancé il y a deux ans, celui-ci a vu le taux de fraude diminuer de 0,7 point entre 2014 et 2016 pour s’établir à 10,9 %. Les raisons de ce succès ? De nouvelles méthodes de management ainsi qu’une douzaine de méthodes de contrôle mises à la disposition des agents « pour surprendre et casser les habitudes de fraude », indique le transporteur. Qui précise que des contrôles renforcés mis en place en 2016 ont fait passer le taux de fraude de 13,7 % en 2014 à moins de 10 % sur la ligne B, à travers 158 opérations portant sur 190 000 voyageurs dont 9 500 ont été verbalisés.
Contrôler mais aussi rassurer, informer et aider les voyageurs
La méthode infaillible pour coincer les fraudeurs ? Mobiliser simultanément de 25 à 30 contrôleurs sur une rame de tramway pour marquer les esprits. « L’intervention en nombre permet de contrôler tous les usagers d’une rame en moins de deux minutes. L’intérêt est double : le tramway n’est pas ralenti et l’effet est percutant », se félicite Philippe Chervy, le directeur général de la Sémitag. Qui précise, s’appuyant sur les retours clients que ces opérations coup de poing confortent en outre les usagers en règle.
Pour preuve, 85 % d’entre eux se déclarent favorables à une multiplication des contrôles. Ajoutez à cela des contrôles de nuit renforcés – y compris en fin de soirée – qui permettent de maintenir une présence rassurante à bord des véhicules. Ils ont permis de contrôler près de 190 000 personnes et de procéder à 9 500 verbalisations en un an et demi.
Dire que la verbalisation est un acte facile serait mentir. Le maître mot ? Le dialogue avec les contrevenants. Discuter avec les fraudeurs, rester calme pour régulariser la situation. « Si on peut faire en sorte que l’usager parte en ayant le sourire, c’est gagné », explique un contrôleur. D’autant plus, ajoute-t-il « que l’usager fraudeur est aussi un client potentiel ». Pour autant, si sanctionner les fraudeurs reste la tâche principale des contrôleurs-voyageurs, leur métier intègre aussi une dimension plus commerciale. Rassurer, informer, aider et contribuer au sentiment de sécurité des voyageurs sont, au quotidien, les autres volets qui complètent leur mission.
Une alternance entre conduite et contrôle
Au titre des nouvelles méthodes de management des agents, le système expérimental mis en place par la Sémitag. Le principe ? Un roulement mixte entre conduite et contrôle permettant aux agents de basculer sur l’un ou l’autre poste chaque trimestre. Quatre agents volontaires à double compétence participent à cette expérience depuis juillet 2016 et apprécient cette opportunité d’alterner entre des fonctions répressives et commerciales.
L’occasion d’éviter de s’enfermer dans une routine, mais aussi de diminuer les risques de maladie professionnelle. C’est du moins ce qu’estime Karine, 49 ans. « À la conduite, on reste assis toujours dans la même position, les mêmes mouvements avec les risques associés. Au contrôle, on est sans arrêt actif, toujours debout dans des véhicules qui bougent », décrit-elle.
Plus besoin de ticket ou de monnaie pour monter à bord d’un tramway ou d’un bus
Reste que la lutte contre la fraude ne passe pas par la seule répression. Des solutions « faciles et innovantes » sont déployées de concert par la Sémitag et le SMTC « pour simplifier et fluidifier l’accès aux transports en commun et ainsi éviter les files d’attente ». Plus besoin de ticket ou de monnaie pour embarquer à bord d’un tramway ou d’un bus.
Fonctionnant sur le même principe que le télépéage, l’application Tag&Pass permet de valider les titres de transport depuis des smartphones [Androïd ou iOS, ndlr]. À charge pour le client de payer en fin de mois les trajets effectués.
Le plus de la solution ? Un tarif privilégié à 1,43 euro au lieu de 1,60 euro le ticket. Quant au paiement par carte bancaire sans contact, il est actuellement expérimenté sur la ligne C1 reliant Grenoble à Meylan.
La cible visée par ces nouveaux moyens de paiement ? Les voyageurs non réguliers dont l’accès au réseau ainsi facilité permettra du même coup de réduire la fraude occasionnelle. Du moins le transporteur l’espère-t-il… Enfin, il est également possible de recharger sa carte d’abonnement vingt-quatre heures sur vingt-quatre à partir de dix guichets automatiques bancaires de la Caisse d’épargne, répartis dans sept communes de l’agglomération.
Joël Kermabon