FOCUS – Les salariés du CHS de Saint-Égrève, qui se mobilisent bruyamment auprès de leur direction depuis une dizaine de jours, comptent se faire entendre de nouveau ce jeudi 23 mars, à l’occasion de la visite de la sénatrice de l’Isère Annie David. Motif de leur courroux : la baisse de dotation de l’Agence régionale de santé, conduisant à une dégradation de leurs conditions de travail. Mais l’ARS conteste cette baisse si décriée…
Lundi 13 mars, les casseroles et les tambours donnaient de la voix au Centre hospitalier spécialisé (CHS) de Saint-Égrève. À l’appel du syndicat majoritaire CGT, près de 300 salariés s’étaient réunis devant la direction de l’hôpital psychiatrique pour dénoncer bruyamment la dégradation de leurs conditions de travail. Une dégradation liée, selon eux, à la baisse de dotation de l’Agence régionale de santé (ARS).
Une “sérénade” syndicale à laquelle a succédé le lendemain un jour de grève, moins suivi toutefois, quand bien même la CGT considère que la direction a volontairement minimisé le nombre de salariés grévistes. Dans tous les cas, ce coup de gueule ne sera pas le dernier.
Fermetures de lits, baisses de RTT, la faute à l’ARS ?
Marine Azzopardi, infirmière à l’hôpital de Saint-Égrève et membre du bureau syndical, décrit des annonces de fermetures de lits durant les vacances d’hiver et d’été, des agents réaffectés dans des unités de soin qu’ils ne connaissent pas, ou encore des temps de travail modifiés entraînant des baisses de RTT.
Et c’est donc après l’ARS et sa baisse supposée de dotation que les salariés en ont. « Pourquoi les directeurs d’hôpitaux ne se battent pas, ne se rassemblent pas pour dire qu’on ne peut pas continuer à travailler dans ces conditions, qu’on ne peut pas faire tourner l’hôpital avec si peu ? Ils n’ont pas cette démarche d’aller interpeller leur tutelle pour demander de l’argent ! », se désole l’infirmière.
Des fermetures au détriment des patients, juge la CGT
Marine Azzopardi explique que la direction envisage également des fermetures de structures extra-hospitalières, tels que des Centres médico-psychologiques (CMP), toujours durant les périodes de vacances. « Ce sont des structures qui permettent aux patients, après une hospitalisation, de pouvoir continuer un suivi avec un psy, un infirmier, un assistant social, des psychologues… Et qui est gratuit ! »
Ces fermetures de lits ou de structures se feront-elle au détriment des patients ? Elle en est convaincue.
« Cela veut dire qu’on ne va pas pouvoir faire hospitaliser les patients correctement l’été. Que quand un patient sera en crise, on ne pourra pas l’hospitaliser dès qu’il en aura besoin, mais que l’on devra attendre, peut-être jusqu’à une semaine… », estime-t-elle.
Et d’ajouter : « Il y a surtout cette volonté de dire que nous sommes là pour les patients, et que ce n’est pas aux patients de trinquer parce que l’ARS donne moins d’argent ! »
L’ARS conteste les baisses de dotation
Comment l’ARS Auvergne – Rhône-Alpes justifie-t-elle les baisses de dotation ? Elle ne les justifie pas : elle en conteste l’existence, ou du moins la relativise grandement. C’est peu dire que ses services donnent l’impression de tomber de l’armoire en découvrant les assertions de la CGT.
Plus précisément, les services de l’ARS admettent une baisse de 0,5 % du budget des établissements psychiatriques sur l’année 2016. Le CHS de Saint-Égrève a été concerné par celle-ci comme tous les autres, mais rien n’indique qu’il le sera encore en 2017. Ce serait même tout le contraire.
« Les dotations seront revues légèrement à la baisse, comme l’année dernière. Une baisse à répartir sur un certain nombre d’établissements dans la région, en fonction de ceux qui sont sur-dotés ou sous-dotés. Or, le CHS de Saint-Égrève ne fait pas partie de la liste des établissements sur-dotés et ne fera probablement pas l’objet d’une baisse de dotation », nous explique-t-on côté ARS.
Mieux encore, l’Agence régionale de santé nous indique que « des crédits supplémentaires vont être alloués en 2017 au Centre hospitalier Alpes Isère [auquel appartient le CHS de Saint-Égrève, ndlr] pour créer une équipe mobile de gérontopsy ».
Silence de la direction, mobilisation des salariés
Malgré tout, la CGT juge bel et bien que l’ARS est responsable de ses déboires. Les délégués syndicaux l’ont-ils entendu de leurs directeurs ? « L’ARS leur donne moins d’argent, mais ils ne le disent pas aussi ouvertement que cela. Ils disent qu’ils ont fait des études, qu’il faut réorganiser les soins… »
Contactée à plusieurs reprises, la direction du CHS n’a pas donné suite à nos demandes d’entretien. Pourtant, le malentendu entre les causes et les conséquences semblent profond, et le malaise comme la mobilisation du syndicat n’en demeure pas moins réel.
Ainsi, les salariés comptent se faire entendre de nouveau ce jeudi 23 mars, à l’occasion d’une visite au CHS de la sénatrice de l’Isère Annie David, accompagnée de Laurence Cohen, sénatrice du Val-de-Marne, et de Dominique Watrin, sénateur du Pas-de-Calais. Les trois élus du groupe Communiste, républicain et citoyen (CRC) effectuent en effet un déplacement autour de la question de la psychiatrie.
« On profite de leur venue pour appeler à une mobilisation, appeler de nouveau à la grève et à un rassemblement devant l’administration. Et sans doute que sera décidée une nouvelle journée d’action. Parce qu’on ne compte pas en rester là ! », conclut Marine Azzopardi, bien remontée… Mais contre qui ?