Reportage à Alpexpo Grenoble pour la soirée de premier tour de la primaire de la gauche. Pas de défilé des élus, quelques sourires, et beaucoup d'amertume.

Primaire de la gauche : ambiance de soir de pre­mier tour, entre bonne humeur et amertume

Primaire de la gauche : ambiance de soir de pre­mier tour, entre bonne humeur et amertume

REPORTAGE – Dimanche 22 jan­vier, l’heure était aux dépouille­ments et aux résul­tats de la pri­maire, tant pour le Parti socia­liste rue Solférino à Paris que pour sa Fédération isé­roise réunie à Alpexpo, à Grenoble. Une soi­rée où les sou­rires et la bonne humeur n’ont pas suffi à cacher les divi­sions et les désac­cords, entre amer­tume des uns et jubi­la­tion des autres.

Les jeunes socialistes suivent le discours de Benoît Hamon à l'issue du premier tour de la primaire de la gauche. © Florent Mathieu - Place Gre'net

Les jeunes socia­listes en train d’é­cou­ter le dis­cours de Benoît Hamon. © Florent Mathieu – Place Gre’net

Ils ne sont pas tous venus, ils ne sont pas tous là. Organisée à Alpexpo, la soi­rée de dépouille­ment du pre­mier tour de la pri­maire de la “Belle alliance” n’aura pas été mar­quée par un inces­sant défilé de som­mi­tés socia­listes locales. Il est vrai que la plu­part s’é­taient mani­fes­tées en faveur de Manuel Valls, donné bon second – au niveau natio­nal comme dépar­te­men­tal – dès les pre­mières esti­ma­tions, à 20 heures.

Michel Destot a ainsi fait une brève appa­ri­tion, un aller-retour en début de soi­rée, au moment où les cou­loirs du local étaient encore lar­ge­ment déserts. Quant à Jérôme Safar, per­sonne ne l’a vu. En revanche, l’an­cienne ministre et dépu­tée de l’Isère Geneviève Fioraso était bien fidèle au poste auprès de ses cama­rades, de même que le pré­sident de la Métro Christophe Ferrari.

Réalisation : JK Production.

La jubi­la­tion du camp Hamon

Les socia­listes pré­sents étaient par ailleurs bien divi­sés, même si l’am­biance était à la bonne humeur et aux sou­rires, au moins de façade, selon les “clans”. Les sou­tiens à Benoît Hamon, le Mouvement des jeunes socia­listes (MJS) en tête, ont eu bien du mal à dis­si­mu­ler une cer­taine jubi­la­tion. Ils seront les seuls à suivre avec atten­tion l’al­lo­cu­tion de leur can­di­dat, sur le grand écran de la salle de récep­tion qui ne comp­tait, au final, que quelques groupes épars.

Pour Hugo David, ani­ma­teur fédé­ral des MJS, Benoît Hamon est bel et bien le seul à incar­ner les valeurs de gauche d’au­jourd’­hui, « face à une droite décom­plexée et une extrême droite de plus en plus raciste ». Et le jeune homme d’es­ti­mer que la pri­maire a mobi­lisé le peuple de gauche, et tout par­ti­cu­liè­re­ment les jeunes.

« Gauche prag­ma­tique » contre « rupture »

Un peu plus de monde devant l’é­cran pour écou­ter Manuel Valls, dont le dis­cours pour le moins com­ba­tif se retrouve dans la bouche de ses par­ti­sans. « Moi, je pré­fère une gauche cou­ra­geuse, prag­ma­tique, qui assume le fait d’être au pou­voir !, nous confie Geneviève Fioraso. Le bilan du quin­quen­nat n’est pas si mau­vais et les résul­tats com­mencent à se faire sen­tir. On est très influen­cés par un cer­tain état d’es­prit défai­tiste et, moi, je pré­fère voir une gauche qui parle vrai. Je ne me satis­fais pas d’une gauche qui veut res­ter dans l’op­po­si­tion ! »

Soirée dépouillement premier tour primaire gauche © Florent Mathieu - Place Gre'net

Christophe Ferrari, sou­tien affi­ché d’Arnaud Montebourg. © Florent Mathieu – Place Gre’net

Soutien affi­ché d’Arnaud Montebourg, Christophe Ferrari est loin de cette ligne. « Il n’y a pas d’ambiguïté : j’ap­pelle à voter pour Benoît Hamon au second tour. Il faut savoir écou­ter les élec­teurs de gauche : en pla­çant Benoît Hamon en tête, ils ont mar­qué une direc­tion très claire et c’est à nous de l’ac­com­pa­gner. C’est une forme de rup­ture. Cette pri­maire a per­mis de faire émer­ger quelque chose d’i­nat­tendu : cela prouve que l’é­lec­to­rat de gauche a encore envie d’y croire ! »

Le cas Jean-Luc Bennahmias

Et puis, il y a les sou­tiens aux “petits” can­di­dats, res­tés en des­sous de 8 %, de 5 %… ou même de 2 %. C’est le cas de Jean-Luc Bennahmias, sou­tenu par le conseiller muni­ci­pal de Saint-Martin-d’Hères Philippe Charlot, qui assure que le but n’a jamais été de « faire un score ».

Philippe Charlot, conseiller municipal de Saint-Martin d'Hères © Florent Mathieu - Place Gre'net

Philippe Charlot, conseiller muni­ci­pal de Saint-Martin-d’Hères. © Florent Mathieu – Place Gre’net

« La can­di­da­ture de Jean-Luc Bennahmias a été bien remar­quée dans les médias. C’est impor­tant, dans ce monde où l’on sent un conser­va­tisme lourd, que les pro­gres­sistes tra­vaillent sur ce qui nous ras­semble plu­tôt que sur ce qui nous sépare. »

Et Philippe Charlot d’é­vo­quer le revenu uni­ver­sel, « un sou­tien pour les gens qui veulent se lan­cer dans la créa­tion d’en­tre­prise », selon lui, ou encore la dépé­na­li­sa­tion du can­na­bis, « pour lut­ter contre les tra­fics, pour la santé des Français, et par inté­rêt fis­cal ».

Le faible nombre de voix recueillies par Jean-Luc Bennahmias ? Tout sauf un désa­veu, en somme :

« On est venus sur cette cam­pagne pour pré­sen­ter des idées et les défendre. Il y a de la place pour une for­ma­tion pro­gres­siste et éco­lo­giste ! »

Des bureaux de vote au dia­pa­son de la ten­dance nationale

Pendant que les idées s’é­chauffent et cir­culent, petit à petit les dif­fé­rents res­pon­sables de bureaux de vote de l’Isère viennent faire la queue devant la salle d’en­re­gis­tre­ment des résul­tats. Dans leurs bras, ou à leurs pieds, des sacs emplis de bul­le­tins et les pro­cès-ver­baux qui les accom­pagnent. Au fur et à mesure, tous ne font que confir­mer la ten­dance géné­rale : les pour­cen­tages oscil­lent, mais les rap­ports de force demeurent les mêmes.

Les responsables des bureaux de vote font la queue © Florent Mathieu - Place Gre'net

Les res­pon­sables des bureaux de vote en train de faire la queue. © Florent Mathieu – Place Gre’net

Hosni Ben Rejeb est le pré­sident du bureau de vote Arlequin-Villeneuve. Il a observé dès le matin une « fré­quence conti­nue très impor­tante » de votants. « Un tiers des jeunes sont venus voter. Beaucoup de per­sonnes âgées se sont mobi­li­sées, mal­gré le froid… On peut dire qu’il y a eu une forte mobi­li­sa­tion. Et, au niveau des résul­tats, à une courte tête, nous avons Benoît Hamon et Manuel Valls, suivi d’Arnaud Montebourg », décrit-il ainsi.

Bonne humeur… et amertume ?

Si la bonne humeur, tou­jours, pré­do­mine dans la petite foule qui s’ac­cu­mule – et se res­taure même debout en atten­dant de pou­voir remettre ses pro­cès-ver­baux –, il demeure tou­jours chez cer­tains comme un fond d’a­mer­tume. Un mili­tant passe le nez dans la salle de presse : « Dépêchez-vous !, nous dit-il. Il ne vous reste plus que trois mois pour dire du mal de la gauche ! » Et comme il garde tou­te­fois le sou­rire, nous ne pou­vons que lui pro­mettre en retour de mettre les bou­chées doubles…

Un échange aussi cour­tois qu’a­cide qui, peut-être, en dit long sur l’é­tat d’es­prit de cette soi­rée pas comme les autres pour les socia­listes. L’exercice déli­cat d’une pri­maire où s’af­frontent plu­sieurs visions de la gauche, qui devront cepen­dant s’u­nir pour por­ter le parti durant l’é­lec­tion pré­si­den­tielle. Et faire contre mau­vaise for­tune bon cœur face à une droite en ordre de bataille, mal­gré ses propres divisions.

Florent Mathieu

LES RÉSULTATS DU PREMIER TOUR EN ISÈRE

Benoît Hamon : 37,57 % (12 688 suffrages)

Manuel Valls : 31,63 % (10 683)

Arnaud Montebourg : 16,90 % (5 706)

Vincent Peillon : 6,94 % (2 345)

François de Rugy : 4,02 % (1 359)

Sylvia Pinel : 1,96 % (662)

Jean-Luc Bennahmias : 0,98 % (330)

Blancs : 0,84 % (288)

Nuls : 0,56 % (1 920)

Florent Mathieu

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