REPORTAGE VIDÉO – Les 28e Rencontres du jeune théâtre européen se sont ouvertes samedi 2 juillet 2016 à l’Hôtel de ville de Grenoble. L’occasion de présenter l’ensemble des compagnies de théâtre qui vont faire vibrer Grenoble au rythme de nombreux spectacles jusqu’au dimanche 10 juillet. Mais aussi de revenir sur les enjeux de cette édition, a fortiori après le vote britannique en faveur du Brexit le 24 juin dernier.
Inauguration des Rencontres du jeune théâtre européen à l’Hôtel de ville. © Joël Kermabon – Place Gre’net
« Un feu d’artifice de jeunesse et d’Europe » attend cette semaine les Grenoblois, assure Romano Garnier, directeur du Centre de création de recherche et des cultures (Créarc).
À l’occasion de l’ouverture des 28e Rencontres du jeune théâtre européen, près de 200 jeunes comédiens d’Europe et d’ailleurs se sont réunis samedi 2 juillet 2016, à l’Hôtel de ville de Grenoble. Avec un objectif : marquer le coup d’envoi de cette édition placée sous le signe de la « tolérance, du partage, de la solidarité et de la liberté ».
« Je rêve que tous les pays puissent venir ici »
Parmi eux, Simonas Dovidauskas du Mažoji Teatro Akademija de Vilnius (Lituanie) ne cache pas son enthousiasme de participer une nouvelle fois aux Rencontres : « C’est un très grand honneur d’être là, de représenter notre pays, notre théâtre. Il y a une très bonne ambiance. » Et d’ajouter : « Je rêve que tous les pays puissent venir ici. […] Le théâtre est un lieu où tous les problèmes disparaissent pour ne laisser place qu’à l’humanité, aux émotions, aux sensations. »
Nous avons capté quelques uns des temps forts de cette inauguration et de la parade d’ouverture qui s’est déroulée en fin d’après-midi. L’occasion pour nous d’interroger Romano Garnier quant à la thématique de cette 28e édition ainsi que sur l’impact du vote sur le Brexit sur le devenir des rencontres.
Reportage Joël Kermabon et Alexandra Moullec
« L’avenir de la culture et des artistes, c’est l’unité »
Au programme de cette semaine de festival, de nombreux temps forts dont une journée spéciale, le mercredi 5 juillet, organisée par le collectif Migrants en Isère et l’association Alliance Grenoble-Oxford qui fera la part belle aux compagnies anglaises, la Mandala Theatre Company et la Pegasus Theatre Company.
Alors que 52 % des Britanniques ont voté en faveur du Brexit pour sortir de l’Union européenne, les compagnies anglaises ont renouvelé leur soutien et leur amour à l’Europe, notamment en entonnant « One love » de Bob Marley lors d’un interlude.
« Le Royaume-Uni est bouleversé, divisé, assure, Yasmin Sidhwa, directrice artistique du Théâtre Mandala d’Oxford. L’avenir de la culture et des artistes, c’est l’unité ». Et de rappeler que « la ville d’Oxford a voté à 70 % le maintien dans l’Union européenne ».
Reportage Alexandra Moullec et Joël Kermabon
Une Europe à la dérive
Fernand Garnier, chargé de mission au sein du Créarc et porte-parole du Réseau du jeune théâtre européen dresse un constat alarmiste et décrit une Europe à la dérive : « L’Europe risque de se perdre car elle s’est construite sur une vision économique de la société et une vision de concurrence et de compétitivité. »
Les chanteuses du Mažoji Teatro Akademija de Vilnius, Lituanie. © Joël Kermabon
Et d’ajouter : « Les valeurs qui fondent une société humaine, et en particulier la culture européenne, ce sont les valeurs de solidarité, de vivre-ensemble, de partage, de tolérance et tout ça est en train de voler en éclats. Le risque pour nous est d’assister à un phénomène de désagrégation et d’opposition, comme on a pu en vivre dans les années 30. »
Un « Grand-Débat » sera également organisé le 9 juillet par le Réseau du jeune théâtre européen. Au cœur de cette réunion : crise grecque, crises économique et Brexit, afin de déterminer leurs incidences sur les échanges culturels de jeunes comédiens.
« Un projet culturel humaniste »
L’inauguration était également l’occasion de rendre hommage à Renée Samson, ancienne professeure de philosophie au lycée Champollion de Grenoble et « collaboratrice infatigable des Rencontres du jeune théâtre européen », décédée en mars 2016.
De gauche à droite : Jocelyne Jolibert, secrétaire du Créarc et Fernand Garnier, porte-parole du Réseau du jeune théâtre européen. © Joël Kermabon – Place Gre’net
Fernand Garnier parle avec émotion de cette actrice déterminante des Rencontres du jeune théâtre européen.
« Renée Samson avait en particulier un tissu de relations en Angleterre […] en Allemagne […] et en Europe centrale. Elle a apporté tout cela avec elle et elle l’a toujours fait avec une très grande discrétion, une grande modestie et, pour moi, c’était une amie extraordinaire.
Pendant vingt-huit ans, on a travaillé ensemble. » Et d’ajouter : « C’était une passionnée de la Grèce […], une citoyenne d’Europe, une citoyenne de la Grèce […] Elle a toujours éclairé ce que nous faisions de la lumière de la culture grecque. »
Fernand Garnier décrit une militante de l’Europe, au sens où le projet européen était un projet de solidarité, de dialogue, de partage et un projet culturel humaniste : « Elle s’est toujours placée dans une perspective de transmission. Elle avait reçu un héritage culturel […] et elle se donnait pour mission de le partager avec les plus jeunes. […] Or les jeunes qui ont entre 18 et 30 ans aujourd’hui auront, un jour, à transmettre ce qu’ils ont reçu et, d’une certaine manière, à rappeler le souvenir de Renée Samson. »
Au premier plan Tereza Avzevdo – La Batook. © Joël Kermabon – Place Gre’net
Un peu plus tard dans la journée, les percussionnistes et les danseuses de la compagnie La Batook ont présenté le spectacle « La fille de l’air ».
Emmenée par la charismatique et énergique Tereza Azevedo, la parade a débuté place Notre-Dame, mettant littéralement le feu dans les rues du centre-ville de Grenoble, avant de rejoindre le Jardin de ville.
Le ciel sporadiquement grisâtre n’aura pas eu raison de la fête. La bonne humeur contagieuse des artistes a séduit passants et commerçants, certains se mettant même à danser dans la rue avec la parade.
Le « feu d’artifice de jeunesse et d’Europe » a bien eu lieu avec cette première journée et il est loin d’être terminé. Seul petit bémol de la journée, la pièce de la compagnie grenobloise le Contre PoinG « Avec Jérôme Legrand » n’a pu avoir lieu, une des comédiennes ne pouvant se présenter pour raison médicale.
Alexandra Moullec avec Joël Kermabon