Actualité

Affiche Chemins de fer Lyon Méditerranée. Exposition internationale de la Houille blanche et du Tourisme, maioctobre 1925, signée Roger Broders, Paris 1925, coll. Musée dauphinois

La tour Perret res­tau­rée… dans les mémoires en atten­dant les travaux

La tour Perret res­tau­rée… dans les mémoires en atten­dant les travaux

DÉCRYPTAGE – Le Musée dau­phi­nois et, dans une moindre mesure, la Maison Bergès – Musée de la Houille blanche refont actuel­le­ment vivre l’his­toire de la tour Perret. Ou, plus lar­ge­ment, de l’Exposition inter­na­tio­nale de la houille blanche et du tou­risme de 1925, à l’o­ri­gine de son érec­tion. L’occasion de faire le point sur l’a­ve­nir de la célèbre tour gre­no­bloise avec Martine Jullian, conseillère muni­ci­pale délé­guée au Patrimoine his­to­rique et à la Mémoire. Un plan de res­tau­ra­tion serait “dans les tuyaux”…

Vue générale de l'Exposition internationale, gouache sur carton signée Léon Jaussely, architecte en chef de l'Exposition, juin 1924. Coll. Musée dauphinois

Vue géné­rale de l’Exposition inter­na­tio­nale, gouache sur car­ton signée Léon Jaussely, archi­tecte en chef de l’Exposition, juin 1924. Coll. Musée dauphinois

1925 est à l’hon­neur cette année à Grenoble ! Le Musée dau­phi­nois et la Maison Bergès – Musée de la houille blanche ont ouvert au public deux expo­si­tions com­plé­men­taires autour de cette année char­nière dans l’évolution de la ville. Il y a 90 ans se tint en effet, de mai à octobre, l’Exposition inter­na­tio­nale de la houille blanche et du tou­risme. Un évé­ne­ment conçu pour faire de Grenoble la capi­tale incon­tes­tée des Alpes françaises.

Il faut dire que débu­tait l’expérience des régions éco­no­miques. Dans ces condi­tions, pour­quoi ne pas être au centre de celle alors appe­lée à s’étendre de « Nice au Léman » ?

La fée élec­tri­cité et la houille blanche : véri­tables stars de l’exposition

Les allégories féminines de la Houille blanche et de la fée électricité se confondent dans cette affiche dédiée à l'Exposition internationale de la Houille blanche et du Tourisme, signée Andry-Farcy. Coll. Musée dauphinois

Les allé­go­ries de la houille blanche et de la fée élec­tri­cité se confondent dans cette affiche signée Andry-Farcy. Coll. Musée dauphinois

Pour mettre en branle un pro­jet aux dimen­sions aussi colos­sales que l’Exposition inter­na­tio­nale de la houille blanche et du tou­risme, le maire socia­liste Paul Mistral s’associe aux élites éco­no­miques et indus­trielles du bas­sin local. Une façon d’accélérer encore l’essor de la ville. Laquelle compte bien tirer pro­fit d’une nou­velle manne éco­no­mique, le tou­risme, tout en jouis­sant déjà de beaux suc­cès tech­niques et indus­triels. Parmi eux, l’exploitation de la houille blanche a le vent en poupe.

C’est l’industriel pape­tier et ingé­nieur Aristide Bergès – à l’o­ri­gine du nom du Musée de la houille blanche de Villard-Bonnot – qui bap­tisa ainsi cette éner­gie issue de la force des tor­rents, des ruis­seaux et des chutes d’eau, en oppo­si­tion à la noir­ceur du charbon.

La blan­cheur de la péri­phrase, houille blanche, per­met d’asseoir cette indus­trie hydrau­lique sur une allé­go­rie de pureté qui s’associe fort bien à celle de la fée élec­tri­cité. Condition sine qua non du pro­grès, pen­sait-on alors. En témoignent les affiches dévoi­lées au Musée de la houille blanche, dont l’exposition assume le ver­sant « moder­niste » de cette aven­ture. Le Musée dau­phi­nois, lui, s’at­tache plu­tôt à explo­rer les muta­tions de tous ordres que l’évènement a impri­mées sur la ville.

Les fontaines lumineuses à l'avant du palais de la Houille blanche illuminé, carte postale A. Mollaret, Edition grenobloise, 1925. Coll. Maison Bergès-Musée de la Houille blanche

Les fon­taines lumi­neuses à l’a­vant du palais de la houille blanche illu­miné, carte pos­tale A. Mollaret, Edition gre­no­bloise, 1925. Coll. Maison Bergès-Musée de la Houille blanche

L’Exposition inter­na­tio­nale : une manœuvre pour étendre la ville ?

Au début des années 1920, Grenoble est encore ceinte de rem­parts mili­taires, ce qui freine consi­dé­ra­ble­ment son déve­lop­pe­ment. En 1923, Paul Mistral com­mande à l’architecte-urbaniste pari­sien Léon Jaussely un plan d’expansion et d’embellissement de la ville. Le « cor­set de pierre », comme le maire appelle alors les for­ti­fi­ca­tions, ne fait pas par­tie du tableau.

Certains his­to­riens sug­gèrent ainsi que l’emplacement de l’Exposition n’est pas dû au hasard. On était forcé de détruire un pan de la for­te­resse pour jouir des 20 hec­tares néces­saires à l’é­rec­tion des palais, stands, vil­lages et fon­taines (sur l’emplacement de l’actuel Parc Paul Mistral)… Commode.

Vue panoramique de l'Exposition depuis la tour d'orientation (ou tour Perret), photo A. Mollaret, 1925, coll. Archives municipales de Grenoble

Vue pano­ra­mique de l’Exposition depuis la tour d’o­rien­ta­tion, photo A. Mollaret, 1925, coll. Archives muni­ci­pales de Grenoble

L’Exposition inter­na­tio­nale a donc accom­pa­gné le consi­dé­rable chan­ge­ment de phy­sio­no­mie qu’a connu la ville à cette époque. De fait, Léon Jaussely, res­pon­sable du plan d’expansion et d’embellissement, fut aussi l’ordonnateur de l’Exposition et l’architecte de cer­tains pavillons.

L'illumination de la tour d'orientation et de l'entrée monumentale de l'Exposition,photo anonyme, 1925, coll. Archives départementales de l'Isère

L’entrée monu­men­tale de l’Exposition, photo ano­nyme, 1925, coll. Archives dépar­te­men­tales de l’Isère

Jadis, la tour Perret

L’édifice qui, aujourd’hui, sym­bo­lise le mieux ce délire de gran­deur reste la tour Perret, seul ves­tige de l’Exposition inter­na­tio­nale de 1925. Afin de par­faire la mise en scène que la ville don­nait d’elle-même, il fal­lait s’élever jusqu’aux nues.

Le béton armé per­met­tait cela, sans entraî­ner de trop grands frais. Ce qui tom­bait bien puisque Grenoble sou­hai­tait pro­mou­voir ce nou­vel “or gris” en vue de l’ur­ba­ni­sa­tion des faubourgs.

Aussi Auguste Perret fut-il chargé de la construc­tion d’une tour d’orientation située à l’entrée du site. Sa seule pres­crip­tion : aller le plus haut pos­sible. Ce qu’il fit en éri­geant alors la tour la plus haute d’Europe : 90 mètres.

Depuis la table d’orientation, culmi­nant à 60 mètres, le visi­teur pou­vait embras­ser du regard les trois chaînes de mon­tagnes qui sanglent la ville. Une manière de rap­pe­ler la situa­tion géo­gra­phi­que­ment idéale de la “capi­tale des Alpes françaises”.

La tour Perret, bien­tôt restaurée ?

Du faste de l’Exposition inter­na­tio­nale de 1925, il ne reste plus que cette tour dont le béton armé a fina­le­ment assez mal vieilli. Pour cette rai­son, l’édifice est fermé au public depuis 1960, ce qui sou­lève régu­liè­re­ment des cri­tiques. En 2013, la pré­cé­dente muni­ci­pa­lité sous le man­dat de Michel Destot avait d’ailleurs annoncé un plan de res­tau­ra­tion pour 2014. Avorté.

Martine Jullian, conseillère municipale déléguée au Patrimoine historique et à la Mémoire. © Adèle Duminy - Place Gre'net

Martine Jullian, conseillère muni­ci­pale délé­guée au Patrimoine his­to­rique et à la Mémoire. © Adèle Duminy – Place Gre’net

Martine Jullian, conseillère muni­ci­pale délé­guée au Patrimoine his­to­rique et à la Mémoire, rap­pelle que « la res­tau­ra­tion de la tour Perret était un des enga­ge­ments de la cam­pagne muni­ci­pale de 2014 [dans la liste Grenoble, une ville pour tous menée par le maire actuel Éric Piolle, ndlr]. »

Avant de concé­der néan­moins que « le pro­blème [a été laissé] de côté jusqu’à main­te­nant parce qu’il y avait d’autres urgences, comme le plan école, extrê­me­ment ambi­tieux ».

Quid de ce pro­jet de res­tau­ra­tion ? « Ce n’est pas encore offi­ciel mais le maire Éric Piolle a donné son accord, nous confie Martine Jullian. Nous avons donc la volonté de tra­vailler sur ce chan­tier-là, qui sera sans doute long. Mais l’important, c’est que ça se fasse. »

« La ques­tion finan­cière est cruciale »

Au départ, la double expo­si­tion consa­crée à l’Exposition inter­na­tio­nale de la houille blanche et du tou­risme devait être « un mar­queur pour faire démar­rer, non pas les tra­vaux, mais le point de départ d’une réflexion puis d’une action concer­nant la tour Perret », confie Martine Jullian. De fait, l’ex­po­si­tion du Musée dau­phi­nois a été pen­sée en col­la­bo­ra­tion avec la Ville et le dépar­te­ment de l’Isère.

Martine Jullian © Adèle Duminy - Place Gre'net

Martine Jullian. © Adèle Duminy – Place Gre’net

Ce qui a freiné le début de la réflexion ? La ques­tion finan­cière bien sûr. D’après Martine Jullian, « les tra­vaux se mon­te­raient, à la louche, à 8 mil­lions d’eu­ros ». Elle rap­pelle cepen­dant que la tour étant clas­sée « monu­ment his­to­rique » depuis 1998, sa réha­bi­li­ta­tion serait éga­le­ment prise en charge par l’État, à hau­teur de 40 %.

« Et puis le Département nous a dit être prêt à finan­cer une par­tie des tra­vaux. À quelle hau­teur ? Je n’en sais rien encore, mais ce sera à discuter. 

Par ailleurs, deux autres sources de finan­ce­ment existent. Le mécé­nat, d’a­bord. D’ores et déjà, les ciments Vicat sont d’accord pour par­ti­ci­per. Et puis, on vou­drait mon­ter une sous­crip­tion à l’échelle de la ville de Grenoble mais pas seule­ment. Il y a une asso­cia­tion natio­nale Perret basée à Paris. La ville du Havre, via Perret, a été clas­sée à l’Unesco. On voit que le pro­jet dépasse la limite de la ville », déclare Martine Jullian, confiante.

Les tra­vaux ne sont donc pas pour demain mais la réflexion est amor­cée. « Il n’y a rien d’acté pour l’instant mais j’espère qu’il y aura bien­tôt une déli­bé­ra­tion et que ça pas­sera au bud­get l’année pro­chaine ; enfin, au moins en par­tie. Il fau­dra ensuite qu’on fasse les pre­mières études tech­niques pour éva­luer le prix que ça coû­tera exac­te­ment avant de lan­cer les appels d’offres. » Affaire à suivre, donc.

Adèle Duminy

Infos pra­tiques 

La Grande Mutation

Au Musée dau­phi­nois, à Grenoble

Du 18 décembre 2015 au 19 sep­tembre 2016

Éloge de la modernité

Maison Bergès – Musée de la houille blanche à Lancey – Villard-Bonnot

Du 21 jan­vier au 25 sep­tembre 2016

AD

Auteur

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

A lire aussi sur Place Gre'net

Le Hero Festival de retour à Grenoble les 11 et 12 mai avec Holly Marie Combs en invitée d'honneur
Le Hero Festival de retour à Grenoble les 11 et 12 mai avec Holly Marie Combs en invi­tée d’honneur

ÉVÉNEMENT - Le Hero Festival annonce son retour à Grenoble pour une sixième édition toujours placée sous le signe des imaginaires pop et geek. Au Lire plus

Joan Miró, Bleu II, 4 mars 1961 © Succession Miró / ADAGP, Paris 2024 © Collection Centre Pompidou, Musée national d’art moderne - Crédit photo : Centre Pompidou, MNAM-CCI/Audrey Laurans/Dist. RMN-GP
“Miró, un bra­sier de signes” : 130 chefs‑d’œuvre du peintre cata­lan, dont le trip­tyque des Bleu, expo­sés au musée de Grenoble

FOCUS - L'artiste catalan Joan Miró est à l’honneur au musée de Grenoble du 20 avril au 21 juillet 2024 avec une grande exposition temporaire Lire plus

Le Club alpin français Grenoble-Isère fête ses 150 ans... et celui de Grenoble-Oisans ses 30 ans
Le Club alpin fran­çais Grenoble-Isère fête ses 150 ans… et celui de Grenoble-Oisans ses 30 ans

FLASH INFO - Le Club alpin français (Caf) Grenoble-Isère fête ses 150 ans en 2024. Un anniversaire qui coïncide avec les 30 ans du Caf Lire plus

Le festival de cirque Courts-CIRCuits revient pour une 5e édition à Seyssinet-Pariset du mardi 16 au dimanche 28 avril 2024. Présenté par l’école de cirque grenobloise, Vit’amin, il aura lieu dans un chapiteau dans le parc Lesdiguières. ©FB Vit'anim
Seyssinet-Pariset : le fes­ti­val de cirque Courts-Circuits lance sa 5e édition

ÉVÉNEMENT - Le festival de cirque Courts-Circuits revient pour une 5e édition à Seyssinet-Pariset du mardi 16 au dimanche 28 avril 2024. Présenté par l’école Lire plus

Domène : l’élu RN Quentin Feres s’op­pose à une lec­ture théâ­trale, qua­li­fiée de « pro­mo­tion du wokisme », à la médiathèque

EN BREF - Le conseiller municipal Rassemblement national de Domène Quentin Feres, membre de la majorité, s'oppose à l'organisation d'une lecture théâtrale du livre La Lire plus

Action symbolique de la CGT Spectacle devant la vsque Olympique de l'allée des Justes du parc Paul-Mistral à Grenoble. © Joël Kermabon - Place Gre'net
Grenoble : action sym­bo­lique de mili­tants de la CGT Spectacle en lutte contre « l’aus­té­rité cultu­relle »

FOCUS - Quelques militants de la CGT Spectacle en lutte contre « l'austérité culturelle » ont organisé une brève action symbolique devant la vasque olympique Lire plus

Flash Info

|

21/04

20h48

|

|

21/04

18h12

|

|

19/04

20h52

|

|

19/04

20h24

|

|

18/04

17h28

|

|

17/04

23h47

|

|

17/04

15h53

|

|

17/04

12h58

|

|

17/04

0h06

|

|

16/04

19h57

|

Les plus lus

Société| Après Un Bon Début, le gre­no­blois Antoine Gentil pré­sente sa méthode édu­ca­tive « star­ter » avec son livre Classe réparatoire

Société| Grenoble, sixième ville « où il fait bon vivre avec son chien », selon 30 mil­lions d’amis

Politique| Le groupe Société civile d’Alain Carignon édite un livret sur les 10 ans de man­dat d’Éric Piolle

Agenda

Je partage !