Manifestation des agriculteurs à Grenoble. © Joël Kermabon - placegrenet.fr

Les agri­cul­teurs en colère contre les normes et les charges “exces­sives”

Les agri­cul­teurs en colère contre les normes et les charges “exces­sives”

REPORTAGE VIDÉO – Après une opé­ra­tion “escar­got”, une cin­quan­taine de trac­teurs ont ral­lié la Direction dépar­te­men­tale des ter­ri­toires à Grenoble, ce mer­credi 5 août. Contrairement aux mobi­li­sa­tions du mois de juillet met­tant notam­ment en cause la grande dis­tri­bu­tion, les agri­cul­teurs pro­tes­taient contre un empi­le­ment des normes et des charges jugées excessives.

Incendie d'une boîte à lettres de la DDT. © Joël Kermabon - Place Gre'net

Incendie d’une boîte à lettres de la DDT. © Joël Kermabon – Place Gre’net

Il ne fai­sait pas bon ten­ter de cir­cu­ler sur l’A48, ce mer­credi matin. Partis vers 8 heures du péage de Voreppe, une cin­quan­taine de trac­teurs accom­pa­gnés d’une ving­taine de voi­tures ont blo­qué la cir­cu­la­tion, pro­vo­quant d’im­por­tants bou­chons et… l’ire des auto­mo­bi­listes, pris au piège. C’est ensuite devant le siège de la Direction dépar­te­men­tale des ter­ri­toires (DDT) qu’en­vi­ron quatre-vingts éle­veurs et pro­duc­teurs se sont ras­sem­blés pour expri­mer avec vigueur leur grand mécontentement.

Une fois ache­vée la construc­tion d’un mur de par­paings devant l’en­trée, la ten­sion est sou­dai­ne­ment mon­tée d’un cran. Bilan : une ou deux vitres bri­sées par des jets de pierre, une boîte aux lettres incen­diée, des papiers dis­per­sés, des pou­belles ren­ver­sées, des jets d’œufs et d’encre noire sur fenêtres et murs…

Après avoir dis­persé de la paille et du four­rage sur le par­vis, comme le relate France Bleu Isère, les mani­fes­tants y ont mis le feu, pro­vo­quant un début d’in­cen­die vite maî­trisé par les CRS qui pro­té­geaient les abords et avaient pris posi­tion à l’in­té­rieur du bâtiment.

Réalisation Joël Kermabon

« Les tré­so­re­ries sont à sec ! »

Les rai­sons de la colère ? L’avis de la Fédération natio­nale des syn­di­cats d’ex­ploi­tants Agricoles (FNSEA), d’une part. Celle-ci a jugé peu ambi­tieux le plan de sou­tien à l’é­le­vage fran­çais pré­senté le 22 juillet par le gou­ver­ne­ment, ce qui a contri­bué à ravi­ver la mobi­li­sa­tion. Les éle­veurs et pro­duc­teurs sou­haitent que soit relevé le prix de leur production.

© Joël Kermabon - Place Gre'net

© Joël Kermabon – Place Gre’net

« La situa­tion éco­no­mique des exploi­ta­tions est aujourd’hui très dif­fi­cile. Il faut savoir qu’un grand nombre de per­sonnes n’ont plus de rému­né­ra­tion depuis plus de six mois ! », s’in­surge Jean-Michel Bouchard, res­pon­sable lait à la Fédération dépar­te­men­tale des syn­di­cats d’ex­ploi­tants agri­coles de l’Isère (FDSEA). Et de pour­suivre : « C’est entre quinze à vingt-mille euros que les gens auront en moins sur leurs exploi­ta­tions. C’est insup­por­table ! Ça fait aujourd’­hui vingt ou trente ans que les pro­duits agri­coles n’augmentent pas ! ».

Des pro­pos par­ta­gés par Françoise Soulier, pré­si­dente du Centre dépar­te­men­tal des jeunes agri­cul­teurs de l’Isère. « Les tré­so­re­ries sont à sec, les exploi­tants ne par­viennent plus à vivre de leur métier, du fait que les pro­duits ne sont plus rému­né­rés et que les charges sont de plus en plus consé­quentes », s’in­quiète la présidente.

« Le mur de l’incompréhension »

Autre pomme de dis­corde : l’empilement des normes. Qu’elles soient natio­nales ou euro­péennes, elles étaient au centre des pré­oc­cu­pa­tions des mani­fes­tants. « Nous avons choisi de venir aujourd’­hui mani­fes­ter devant la DDT parce que, cette année, les dos­siers admi­nis­tra­tifs concer­nant la poli­tique agri­cole com­mune sont arri­vés très en retard dans les exploi­ta­tions », explique Dominique Barrau, secré­taire géné­ral de la FNSEA.

Les manifestants dispersent des papiers et lancent des projectiles divers. © Joël Kermabon - Place Gre'net

Manifestants devant la DDT. © Joël Kermabon – Place Gre’net

« Ces docu­ments étaient basés sur le calen­drier des cultures et on va venir contrô­ler, alors que l’a­gri­cul­teur ne connaît pas les règles du jeu ! », s’exaspère-t-il.

« On ne tient plus compte des réa­li­tés de l’ex­ploi­ta­tion. On décide à Paris com­ment on doit appli­quer sur le ter­rain. Ça devient insup­por­table ! Ce mur que nous avons construit, c’est le mur de l’in­com­pré­hen­sion ».

Dominique Barrau revient sur les deux points prin­ci­paux de la mobilisation.

Réalisation JK Production

Pas d’ho­mo­gé­néité européenne

Pour Françoise Soulier, la situa­tion est tota­le­ment aber­rante et incom­pré­hen­sible. Cette der­nière estime que les contraintes impo­sées aux exploi­tants ne sont pas cor­ré­lées avec celles du terrain.

Manifestation de jeunes agriculteurs en tracteur sur le cours Jean Jaurès à Grenoble, le 5 août 2015, avec la FNSEA. © Muriel Beaudoing - placegrenet.fr

Manifestation d’a­gri­cul­teurs sur le cours Jean-Jaurès à Grenoble, le 5 août 2015. © Muriel Beaudoing – pla​ce​gre​net​.fr

En effet, la nor­ma­li­sa­tion envi­ron­ne­men­tale, le res­pect de la direc­tive nitrates et la mise aux normes des bâti­ments agri­coles se révèlent très coû­teuses et grèvent lour­de­ment les trésoreries.

Sans comp­ter la règle­men­ta­tion. « Les règles du jeu changent en per­ma­nence ! Il n’y a pas d’ho­mo­gé­néité euro­péenne au niveau des charges. De plus, la France n’ar­rête pas de rajou­ter des couches sup­plé­men­taires. L’administration a pris beau­coup de retard et nous devons contrac­tua­li­ser sans connaître les termes du contrat ! », s’in­digne la pré­si­dente. « Du coup, on s’en­gage au risque d’être sanc­tion­nés der­rière, du fait que nous ne sommes pas en capa­cité de répondre aux attentes du contrat. »

En début d’a­près-midi, les agri­cul­teurs ont pu ren­con­trer la direc­trice dépar­te­men­tale de la DDT, ainsi que le secré­taire géné­ral de la pré­fec­ture de l’Isère. Un peu mal­me­nés, ces der­niers leur ont donné l’as­su­rance de les avoirs enten­dus et qu’ils pren­draient toutes les dis­po­si­tions néces­saires à leur niveau. Des pro­messes qui n’ont guère convaincu les mani­fes­tants qui ont plié bagage vers 15 h 30 avant un baroud d’hon­neur par le cours Jean-Jaurès.

Joël Kermabon

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