FOCUS – Après les incendies des locaux de l’Ajav et du théâtre Prémol, les habitants des quartiers Vigny-Musset et du Village olympique avaient manifesté leurs inquiétudes. Et interpellé le maire sur les questions de la vidéosurveillance dans les quartiers et de la reconstruction des équipements. Éric Piolle a fait le point lors du conseil municipal de ce lundi 27 avril.
Après les récents incendies des locaux de L’Aja Villeneuve et du théâtre Prémol, la municipalité se devait de réagir. D’autant plus suite à la lettre ouverte des habitants de Vigny-Musset adressée au maire de Grenoble, et aux griefs d’une opposition municipale en embuscade sur la vidéosurveillance.
L’occasion lui en a été donnée, ce lundi 27 avril, lors de la séance du conseil municipal. L’équipe municipale a notamment répondu à deux questions orales, posées respectivement par Jérôme Safar, président du groupe Rassemblement de gauche et de progrès, et Matthieu Chamussy, président du groupe UMP/UDI et Société civile.
« On s’est attaqué à des symboles ! »
Pour Matthieu Chamussy, c’est clair : on s’est attaqué à des symboles de la vie de ces quartier : « Ce ne sont pas seulement des bâtiments publics qui ont été détruits mais bel et bien des lieux de vie, de partage et de culture. Bref, ce sont des outils au service du mieux vivre ensemble qui ont été atteints ».
Si l’élu se félicite des solutions de court terme mises en place par la Ville pour que les activités perdurent, il s’inquiète de « la volonté de cette dernière d’engager au plus vite les travaux de reconstruction des deux équipements ». Le conseiller municipal s’étonne, en effet : « Rien n’empêchait de convoquer en urgence une conférence des présidents de groupes [du conseil municipal, ndlr] pour inscrire à l’ordre du jour une délibération de principe témoignant la solidarité et prenant l’engagement solennel de la reconstruction ! ». C’est en ce sens qu’il a interpellé le maire dans sa question orale.
Sur ce point, une fois n’est pas coutume, les préoccupations de l’opposition de gauche rejoignent celles de la droite. Se faisant l’écho de la voix des habitants, Jérôme Safar a notamment demandé au maire « de préciser les mesures effectives prises depuis une semaine pour permettre la poursuite des activités de ces structures. […] Nous vous demandons aussi de nous informer sur les démarches et solutions envisagées pour permettre la reconstruction du théâtre Prémol et celle des locaux de L’Aja Villeneuve ».
« Les activités n’ont pas connu d’interruption »
De fait, concernant la poursuite des activités sur les deux sites incendiés, Éric Piolle, balayant les accusations d’attentisme, a rappelé que la Ville avait rapidement engagé des actions, dans un premier temps sur l’Ajav « dont les activités n’ont pas connu d’interruption ».
Et l’élu d’énumérer. « Dès le mardi matin, l’eau et l’électricité étaient rétablies. La Ville a mis à disposition du club du matériel, notamment des ballons et du mobilier […] L’accès aux vestiaires a été rendu possible et les lieux ont été sécurisés pour éviter toute intrusion ». Quant aux locaux du siège endommagés par l’incendie, « plusieurs pistes ont été rapidement évaluées par nos services mais nous allons les présenter au club pour analyser avec eux la pertinence des solutions envisagées », a‑t-il précisé.
Quid du dojo de Prémol ? Eric Piolle s’est voulu rassurant : « Ici aussi, les activités pendant le temps scolaire ont été maintenues et réorientées vers les gymnases des Trembles et de la Rampe. Nous espérons pouvoir rouvrir le dojo à la fin du mois […] Si toutefois, cela n’était pas possible, les services des sports effectueront un point sur les créneaux possibles dans l’ensemble des gymnases et centres sportifs de la ville, voire des écoles ».
Pas d’interruption des activités non plus pour la MJC, où l’électricité a été rétablie vendredi matin. Par ailleurs, la MJC travaille avec la Ville à un projet d’installation du foyer dans une salle située au rez-de-chaussée pour début juillet. En attendant, il sera installé dans la salle polyvalente, non touchée par l’incendie.
Enfin, si la bibliothèque a dû fermer pour rouvrir vendredi, la maison de l’enfance a pu accueillir tous les enfants dès le lundi, jour où l’électricité à été rétablie. L’activité normale du CCAS n’a, quant à elle, pu reprendre que vendredi dernier toujours en raison de la coupure d’électricité. Bref, Éric Piolle l’assure, « la mobilisation des services de la Ville est totale ».
Théâtre Prémol : assurer la fin de la saison en priorité
Pour ce qui est du théâtre Prémol, la cause est entendue. La priorité d’assurer la fin de la saison – d’avril à juillet – dans d’autres lieux sous la forme d’un « hors les murs » est actée.
« Par l’action de Corinne Bernard, adjointe aux cultures, la Ville s’est proposée, dès le dimanche [suivant l’incendie, ndlr] pour mettre à disposition les équipements municipaux et mettre en relation la direction du théâtre et les équipements culturels de la ville et de l’agglomération », a souligné Éric Piolle.
Concrètement, une réunion avec tous les acteurs est programmée le 6 mai. Le but ? Réaliser un bilan des premières dispositions qui permettraient de poursuivre le travail jusqu’à la saison 2015 – 2016. « Cela nous a permis de maintenir les ateliers de l’Axe de création et les représentations prévues la semaine dernière. Ceux-ci se sont déroulés à la MC2 », se félicite l’élu.
Autres illustrations de ce dispositif, le spectacle Danse et chant Gnawa, programmé pour samedi dernier, a pu avoir lieu dans la salle Stekel du conservatoire, tandis que les représentations de la pièce de Koltès se tiendront à la MC2 du 28 au 30 avril. La chorale des habitants viendra, quant à elle, répéter au conservatoire le 29 mai. Au final, une seule représentation a été annulée, sur décision de la directrice du théâtre.
La compagnie In Mobile au centre de l’attention
Pour ce qui est de l’information du public sur les changements de lieux, elle sera relayée par les sites internet de la Ville et de la MC2. Mais aussi par des banderoles “Théâtre hors les murs”, placées sur le bâtiment.
Quant à la compagnie In Mobile de Benoît Kopnaieff, qui jouait dans le théâtre le soir de l’incendie, elle fera l’objet d’une attention particulière. En effet, cette troupe ne peut plus présenter son spectacle Life Experience(s), suite à la perte de son outil de travail. La compagnie, les services culturels et le théâtre municipal travaillent ainsi de concert pour voir quel soutien pourrait lui être apporté, afin de lui redonner de la visibilité dès la rentrée prochaine.
Quid des reconstructions ?
Pour ce qui est des contours d’une éventuelle reconstruction, ils ont à peine été esquissés. Pas de quoi satisfaire la demande d’engagement solennel réclamée avec force par Matthieu Chamussy.
« Une semaine après les drames, tout le monde est à pied d’œuvre pour bâtir des perspectives pour l’avenir », a tenté de rassurer Éric PIolle. Et d’annoncer : « Dans la première quinzaine de mai, la Ville va réunir l’État, la région, le département et la métropole, bien sûr, afin d’établir un plan d’actions pour maintenir la présence d’un équipement culturel et structurant pour le quartier et la ville ». Dont acte.
Une longue série d’incidents
Autres pommes de discordes, la vidéosurveillance et la sécurité dans les quartiers. Un cheval de bataille que n’ont pas manqué d’enfourcher les opposants politiques mais aussi les habitants du Village Olympique et Vigny-Musset, à travers leur union de quartier.
Dans leur lettre ouverte au maire, ceux-ci exprimaient avec une certaine amertume leur désappointement devant les conséquences de l’arrêt de la vidéosurveillance. « Nous ne pouvons que constater une forte dégradation du climat depuis l’annonce de l’abandon de la vidéoprotection au Village olympique, une annonce qui a largement contribué à favoriser le sentiment d’impunité de certains », affirmaient-ils.
Selon eux, l’incendie du théâtre est dans la continuité d’une longue série d’incidents qui, tous, ont été systématiquement signalés en leur temps. L’association se plaint, en l’occurrence, que ses interpellations soient restées vaines et déclarent avec colère se sentir abandonnés.
“Des populations qui souffrent”
Jérôme Safar estime, quant à lui, que l’heure est grave. « Derrière ces événements, ce sont des populations qui souffrent et surtout une politique publique qui, finalement, parce qu’elle est très conservatrice, fait en sorte que rien ne bouge, préserve les Grenoblois qui s’en sortent le mieux et ne s’occupe plus, ou mal, de ceux qui ont besoin de la vidéo, d’une politique publique et de solidarité ».
On le voit, l’ancien adjoint à la tranquillité met en cause la réactivité de l’équipe en place en s’appuyant, affirme-t-il, « sur des remontées du terrain ». Et de s’indigner, corroborant les termes de la lettre ouverte : « On ne répond pas aux courriers ni aux demandes de réunions des habitants. Il y a là un réel problème de méthode et de fond ! ».
Faisant référence à sa très vive réaction, publiée le 24 avril suite à la lettre que l’Union de quartier Village olympique Vigny-Musset avait adressé au maire, l’élu assume. « Oui, j’ai réagi fortement à ce courrier, parce qu’il me semblait totalement légitime, en tant qu’ancien premier adjoint en charge des questions de tranquillité et de culture, de pouvoir réagir ». L’élu avait effectivement tiré à boulets rouges sur « la légèreté et le manque de professionnalisme de l’équipe municipale » mettant en cause sa manière d’aborder les questions de tranquillité publique.
La présence d’une caméra n’a pas dissuadé les malfrats
Réagissant sur ce thème, et comme on pouvait s’y attendre, le maire de Grenoble est resté droit dans ses bottes et n’a pas changé d’avis. « Concernant la vidéosurveillance, et pour mettre un terme à toutes les tentatives d’instrumentalisation, il existe un dispositif de vidéosurveillance sur le site, à l’initiative de la municipalité précédente. La caméra qui surveille le théâtre Prémol est tout à fait opérationnelle », a expliqué Éric Piolle. Et ce dernier d’asséner : « Force est de constater que la présence de cette caméra n’a pas dissuadé le, ou les, malfrats… qui, par ailleurs, n’ont toujours pas été interpellés… ». Un argument qui aura peut-être fait mouche ?
L’élu a aussi rappelé que l’enquête toujours en cours risquait de s’avérer longue et compliquée, et que la ville avait bien évidemment accédé à la demande de réquisition des images de vidéosurveillance de la police. « Je demande la plus grande retenue dans les propos de chacun. C’est par la mobilisation commune que nous répondrons au mieux à l’intérêt des habitants du quartier et de toute la ville » a conclu le premier magistrat.
Joël Kermabon
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