REPORTAGE – La photonique fait son chemin à Grenoble. Cette technologie du CEA encore méconnue du public aura bientôt sa plate-forme dédiée, avec, en ligne de mire, des créations d’emplois et des retombées économiques. La pose de la “première pierre” symbolique de ce bâtiment a réuni, le 15 avril dernier, les représentants des collectivités locales ayant apporté leur soutien financier au projet.
Jour après jour, le complexe scientifique Minatec continue de grandir. De nouveaux bâtiments fleurissent derrière ceux déjà visibles depuis l’arrêt Cité internationale de la ligne B du tramway. En construction depuis quatre mois, le tout prochain doit accueillir très prochainement la future plate-forme photonique du CEA.
L’enjeu ? Réunir, en un même lieu, tous les ingénieurs qui travaillent sur cette technologie en pleine croissance. Et ainsi encourager l’innovation, rester compétitif dans le secteur et soutenir une dynamique de création d’emplois.
Vous avez dit photonique ?
Le mieux placé pour en parler est encore Jean Therme, le directeur du CEA Grenoble et de CEA Tech*. Celui-ci décrit cette technologie comme une science « qui exploite les potentialités de la lumière, qu’elle soit visible ou non ». Plus précisément un couplage des sciences de l’optique et de l’électronique. Jean Therme en est convaincu, cette technologie est celle du XXIe siècle, celle qui « prendra le relais de la micro-électronique ».
Jean Therme, directeur de CEA Tech – « On réinvente le futur en permanence »
Le nouveau bâtiment qui concentrera la R&D de la photonique comptera pas moins de 13 000 m² de salles blanches, des bureaux de recherche, des laboratoires et, cerise sur le gâteau, un grand belvédère donnant sur le Vercors.
Cette « boîte communicante », selon l’expression de l’architecte Cédric Morel, servira avant tout à accueillir les « très grands clients », affirme Jean Therme. Mais surtout à convaincre les industriels qu’à Grenoble « on fait du bon boulot » et que, la recherche peut déboucher sur des applications concrètes et porteuses.
Il est vrai qu’en matière de photonique, le CEA Tech de Grenoble est déjà le premier pôle européen et parmi les trois premiers mondiaux. L’idée est donc plutôt de « conforter son leadership » dans le domaine.
Cédric Morel, architecte du bâtiment
Encourager l’effet cocktail
Ce rassemblement des experts en photonique sur une seule plate-forme est pour Jean-Jack Queyranne, président de la région Rhône-Alpes, le moyen d’encourager ce qu’il appelle « l’effet cocktail » ou « l’effet cafétéria ». C’est-à-dire « la rencontre parfois aléatoire des scientifiques qui peuvent imaginer de nouveaux projets ». Une dynamique créatrice d’emplois – pour les ingénieurs, mais aussi pour les architectes et les ouvriers du bâtiment – qu’il veut continuer de porter sur le long terme.
Le président de région va jusqu’à mettre en garde « toute forme de doute » qui « serait un renoncement dangereux pour l’avenir de la métropole grenobloise ». Et de préciser, comme inquiet pour l’avenir, « qu’une société qui tournerait le dos à une idée de progrès serait une société […] probablement menacée de mort ».
Des applications concrètes pour la photonique
Lors de la matinée de présentation du 15 avril, quelques stands présentaient de l’imagerie infrarouge, de nouveaux éclairages à base de Led, des détecteurs de gaz… Chacun d’entre eux étant supervisé par un ingénieur du CEA chargé de vulgariser les technologies auprès du public.
Plusieurs startups accompagnent déjà ces nouvelles technologies comme Aledia ou Microoled. D’autres se positionnent pour des détecteurs de CO₂ qui pourront être embarqués sur des smartphones. L’idée ? Ne renouveler l’air intérieur que quand c’est utile afin d’éviter une trop grande consommation d’énergie. Une application de bien-être qui pourrait aussi être exploitée pour éviter les itinéraires urbains trop émetteurs de CO₂.
Ludovic Chataing
* Pôle « recherche technologique » du CEA, CEA Tech a pour mission de produire et de diffuser des technologies au profit de l’industrie, et ainsi d’établir un « pont » entre mondes scientifique et économique.