DÉCRYPTAGE – Pour un hectare de zone humide détruite par le Center Parcs, deux hectares doivent être “compensés” ailleurs. Loin. Pierre & Vacances est allé chercher jusqu’en Haute-Savoie et en Ardèche de quoi verdir sa bulle tropicale. Mais les mesures compensatoires sont contestées. Et la question de la réelle protection des zones humides, ces réservoirs de biodiversité régulateurs du cycle de l’eau, toujours posée…
Voilà des décennies qu’une telle superficie de zone humide n’a pas été détruite en Rhône-Alpes. Pour construire le Center Parcs des Chambarans en Isère, combien d’hectares de ces espaces protégés devraient finalement passer à la trappe ? 76, comme l’avance son promoteur Pierre & Vacances et comme l’a arrêté le préfet ? Ou bien 120, comme l’estiment les opposants, associations de protection de l’environnement en tête, sur la base d’un rapport accablant du commissaire-enquêteur ?
Une chose est sure : si le projet – pour l’heure suspendu par le juge des référés – aboutit, ce sera l’une des plus grosses destructions de zones humides en France. A titre de comparaison, le barrage de Sivens entraînerait la destruction de 13 hectares…
Alors que l’on célébrait, ce 2 février, la journée mondiale des zones humides, protégées au niveau international depuis la signature de la convention de Ramsar en 1971, qu’en est-il réellement ? En trente ans, la moitié d’entre elles ont disparu dans l’Hexagone, victimes de l’aménagement et de l’urbanisation du territoire.
Compenser une zone humide ? Impossible…
On peut, en réalité, encore détruire ces zones protégées. A titre dérogatoire, sous couvert d’intérêt général, et à la faveur de mesures compensatoires à géométrie et intérêts variables.
« D’un point de vue comptable et juridique, on peut compenser, argue Nicolas Gourdin, conseiller juridique à la Frapna Isère. Du point de vue scientifique, c’est plus compliqué. Comment compenser à l’égal un service rendu du point de vue hydrologique ? » Comment reconstruire la biodiversité détruite ?
D’autant que les compensations se font parfois à des centaines de kilomètres. Pour compenser son Center Parcs en Isère, Pierre & Vacances a dû appliquer la règle du “un pour deux” : pour un hectare de zone humide détruite, deux doivent être restaurés. Mais les zones humides se faisant rares, le groupe immobilier a dû aller grappiller 152 hectares dans cinq départements, en Isère mais aussi dans l’Ain, la Savoie, la Haute-Savoie et l’Ardèche*. Des mesures éparpillées sur une vingtaine de sites au total.
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