Récit d'un aller-retour Grenoble-Pologne, pour apporter du matériel et revenir avec des réfugiés ukrainiens

Récit d’un aller-retour Grenoble-Pologne pour appor­ter du maté­riel et reve­nir avec des réfu­giés ukrainiens

Récit d’un aller-retour Grenoble-Pologne pour appor­ter du maté­riel et reve­nir avec des réfu­giés ukrainiens

TÉMOIGNAGE – À l’i­ni­tia­tive (per­son­nelle) de Sylvain Becquet, sapeur-pom­pier à Meylan, et avec le sou­tien du col­lec­tif Ukraine-Grenoble, quatre four­gons sont par­tis de la région gre­no­bloise jeudi 10 mars 2022 pour rejoindre la fron­tière entre la Pologne et l’Ukraine. Objectif ? Livrer du maté­riel et reve­nir avec des réfu­giés. Récit d’un périple avec son orga­ni­sa­teur et l’un de ses par­ti­ci­pants, Damien Parisse.

« À la fron­tière, c’est un flot inin­ter­rompu 24 heures sur 24. Des femmes font la queue, elles sont gelées, les enfants ont le visage mar­qué. C’est hor­rible ! » C’est par ces mots que Sylvain Becquet décrit l’af­flux de réfu­giés Ukrainiens en Pologne. Entre le jeudi 10 et le dimanche 13 mars, l’Isérois a effec­tué un aller-retour jus­qu’à la fron­tière pour appor­ter de l’aide… et reve­nir avec des réfugiés.

Ukraine : un aller retour Grenoble-Pologne pour venir en aide aux réfugiés. Des sourires et de la fatigue pour un trajet presque non-stop depuis Grenoble jusqu'à la frontière entre la Pologne et l'Ukraine. © Sylvain Becquet

Les sou­rires des béné­voles ayant pris part au tra­jet, mal­gré la fatigue liée à un tra­jet presque non-stop depuis Grenoble jus­qu’à la fron­tière entre la Pologne et l’Ukraine. © Sylvain Becquet

Mais Sylvain Becquet n’est pas parti seul : en tout, huit per­sonnes ont par­ti­cipé au périple, à bord de quatre four­gons. Le tout pour un tra­jet aller et retour (sans qua­si­ment aucune halte), les conduc­teurs se relayant au volant. Et si Sylvain Becquet est à l’o­ri­gine de l’i­ni­tia­tive, il s’est rapi­de­ment coor­donné avec le col­lec­tif Ukraine-Grenoble, qui lui a notam­ment fourni une grande part des 10 mètres cubes de maté­riel à ache­mi­ner jus­qu’à la frontière.

Matériel médi­cal et pro­duits pour les enfants

Pourquoi une telle opé­ra­tion ? « J’ai été très tou­ché par cette guerre, ces images de gens qui partent en exode. Je me suis dit qu’il fal­lait faire quelque chose », explique Sylvain Becquet. Difficile tou­te­fois de se por­ter volon­taire pour accueillir des réfu­giés, avec un bébé en bas âge à la mai­son et une épouse enceinte. « Ça a cogité et j’ai pensé : si je ne peux pas les accueillir, alors je vais aller les cher­cher ! », poursuit-il.

« Aide humanitaire pour l'Ukraine », de l'autre côté de la frontière polonaise. © Damien Parisse

« Aide huma­ni­taire pour l’Ukraine », de l’autre côté de la fron­tière polo­naise. © Damien Parisse

Sapeur-pom­pier basé à Meylan, Sylvain Becquet a le sens de l’aide… et de l’or­ga­ni­sa­tion. Il envoie à ses proches un appel aux dons qui dépasse vite ses espé­rances. Le pro­jet ini­tial : par­tir avec un four­gon en direc­tion de l’Ukraine. Ce sont fina­le­ment quatre four­gons qui ont pris le départ. À leur bord : des pro­duits pour les enfants, mais aussi du maté­riel médi­cal récolté auprès de phar­ma­cies du Vercors.

Damien Parisse, accom­pa­gna­teur en mon­tage, fai­sait par­tie du voyage. « Il y avait pas mal d’ac­ces­soires pour les bébés. Ça fai­sait bizarre, ce “go fast” avec plein de couches ! On est même tom­bés sur des anciens légion­naires qui col­lec­taient des bibe­rons et des tétines », raconte-t-il. Sur place, l’or­ga­ni­sa­tion était bien rodée : les camions fran­çais et ukrai­niens se met­taient dos à dos en zone neutre, le maté­riel pas­sait de l’un à l’autre et par­tait rejoindre l’Ukraine.

Vingt-deux réfu­giés pour le tra­jet de retour depuis la Pologne

Mais l’ob­jet du voyage était aussi, et sur­tout, de reve­nir avec des réfu­giés. C’est une Ukrainienne de Coublevie, retour­née en Ukraine peu après le début de la guerre, qui s’est char­gée de trou­ver les per­sonnes dési­rant rejoindre la région gre­no­bloise. Pas ques­tion de “char­ger” des gens au hasard. « Il faut avoir une solu­tion pour les gens à l’ar­ri­vée », explique Sylvain Becquet. En tout, ce sont 22 réfu­giés (et quatre chiens) qui seront du voyage retour.

Ukraine : un aller retour Grenoble-Pologne pour venir en aide aux réfugiés. Un "flot ininterrompu" de réfugiés, des femmes et des enfants dans leur immense majorité, passe la frontière entre l'Ukraine et la Pologne. © Sylvain Becquet

Un « flot inin­ter­rompu » de réfu­giés – des femmes et des enfants dans leur immense majo­rité – passe la fron­tière entre l’Ukraine et la Pologne. © Sylvain Becquet

Leur pro­fil ? « Des mor­ceaux de familles », résume en quelques mots Damien Parisse. La majo­rité des réfu­giés sont en effet des femmes et des enfants, ou des hommes trop âgés pour sup­por­ter le conflit… ou se battre. Sur les 22 per­sonnes qui ont rejoint l’Isère, Sylvain Becquet compte un jeune de 17 ans et deux hommes de plus de 60. Les autres per­sonnes sont des femmes avec leurs enfants en bas âge.

Arrivées en Isère, elles ont rejoint Coublevie, Chamagneux, Villard-de-Lans ou Grenoble, selon les solu­tions d’ac­cueil ou les parents déjà pré­sents dans la région. Avec une excep­tion pour quatre per­sonnes – deux femmes avec enfants – qui ont “pro­fité” du tra­jet pour pou­voir ensuite se rendre à Périgueux. Des places étaient en effet res­tées vacantes, des pas­sa­gers pré­vus ini­tia­le­ment n’ayant fina­le­ment pas pu pas­ser la frontière.

« Le seul sen­ti­ment que j’ai, c’est qu’on n’en a pas ramené assez »

La fron­tière a mar­qué les esprits. Stéphane Becquet n’est pas le seul à avoir été tou­ché par la vision du flux de réfu­giés. « C’était poi­gnant ! Cet exode évoque plein de choses. C’était nos familles que l’on voyait là. On a tous eu des moments où l’on s’est mis à chia­ler dans un coin », relate Damien Parisse. Qui envi­sage d’or­ga­ni­ser à son tour un nou­veau tra­jet en direc­tion des réfu­giés ukrainiens.

Des réfugiés ukrainiens partagent des images de la guerre telle que prises à leurs fenêtres. © Sylvain Becquet

Des réfu­giés ukrai­niens par­tagent des pho­tos de la guerre prises à leurs fenêtres. © Sylvain Becquet

Sylvain Becquet en a l’en­vie aussi… « mais il y a ma femme et mes enfants der­rière ; c’est un gros inves­tis­se­ment per­son­nel et il faut le finan­cer », décrit-il. Sans pour autant se conten­ter du suc­cès de sa mis­sion. « Le seul sen­ti­ment que j’ai, c’est qu’on n’en a pas rame­nés assez. Ils sont par­qués comme des bes­tiaux. Et ce n’est pas du tout le fait de la Pologne qui a mis beau­coup de moyens. Mais il y a trois mil­lions de réfu­giés, c’est ingé­rable ! »

Pour rap­pel, la pré­fec­ture de l’Isère a dif­fusé les moda­li­tés d’ins­crip­tion pour les per­sonnes sou­hai­tant se por­ter volon­taires à l’ac­cueil de réfu­giés. La Ville de Grenoble a, pour sa part, activé la pla­te­forme Solidarité avec l’Ukraine pour per­mettre de pro­po­ser de l’aide ou un héber­ge­ment. Tandis que le col­lec­tif Ukraine-Grenoble relaye sur les réseaux sociaux les appels aux dons ou col­lectes lan­cées par les associations.

Florent Mathieu

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