FOCUS – « Bad Religion ? », œuvre de Goin représentant une femme voilée portant l’étoile jaune, continue de faire parler d’elle. Par voie de communiqué en date du 27 janvier 2022, la Région Auvergne-Rhône-Alpes annonce en effet « suspendre ses aides au festival Grenoble Street Art ». Mais la fresque n’est déjà plus visible en l’état.
« La Région refuse de laisser se diffuser dans les esprits de telles fausses références », écrit la collectivité au sujet de la fresque Bad Religion ? de Goin. « Au-delà du mensonge historique véhiculé, cette provocation artistique aussi inacceptable que dangereuse ne sert que les extrêmes et constitue une incitation à la haine et aux violences », considère la Région Aura. Et celle-ci de demander « le retrait immédiat » de l’œuvre en question.
Quid des subventions au Grenoble Street Art Fest ? Celles-ci sont suspendues « jusqu’à ce que [la Région] ait obtenu des explications assorties des garanties que cette situation ne se reproduise pas », indique le communiqué. La collectivité écrit encore « partager l’émotion légitime de la communauté juive et au-delà, de tous ceux qui souhaitent vivre dans une société rassemblée et apaisée ».
Fin 2021, la Région annonçait déjà retirer son financement à Sciences Po Grenoble, suite à la suspension d’un enseignant ciblé par des accusations d’islamophobie. Parmi les premières réactions, celle sur Twitter de l’élu grenoblois Alan Confesson, qui juge « affligeant » la position de la Région. « [Elle] va donc maintenant opérer une véritable police de la pensée et faire des choix strictement partisans dans l’attribution de ses subventions », écrit-il.
La fresque de Goin dégradée
Si le président du Crif Grenoble-Dauphiné, dans une lettre à Éric Piolle, et désormais la Région Auvergne-Rhône-Alpes demandent le retrait de l’œuvre de Goin Bad Religion ?, celle-ci n’est désormais plus visible en l’état.
La fresque Bad Religion ? a été dégradée dans la journée du 27 janvier. © Florent Mathieu – Place Gre’net
Dans la journée du jeudi 27 janvier, la fresque a en effet été dégradée. Le visage de la femme voilée, de même que l’étoile jaune qu’elle arborait, ont été tous deux recouverts de noir. Aucun message ou inscription n’apparaissent sur les lieux.
Émilie Chalas : « Cette œuvre est d’abord un mensonge »
Dans un communiqué émis vendredi 28 janvier, la députée de l’Isère et conseillère municipale de Grenoble Émilie Chalas s’exprime à son tour sur la fresque de Goin. « Cette oeuvre […] est d’abord un mensonge par le message qu’elle porte. […] Aucun musulman de France ne subit ce que les juifs ont subi pendant la 2de guerre mondiale et, non seulement nous souhaitons, mais nous lutterons également pour que jamais aucun musulman n’ait à le subir », écrit-elle.
Émilie Chalas avait déjà émis des réserves sur une autre œuvre de Goin, KKKops. © Léo Aguesse – Place Gre’net
« Quand le message se mêle à l’art, c’est presque toujours le message qui l’emporte sur l’art », estime encore la parlementaire. Qui ajoute que, si « la liberté de l’expression artistique doit être totale », celle de la critique « doit l’être également ».
Et d’attaquer, sans le nommer, le maire de Grenoble Éric Piolle pour conclure : « Qu’un élu promeuve dans sa ville la création artistique, c’est bien ce que nous pouvons attendre de lui et nous applaudissons des deux mains. Mais est-ce vraiment la mission d’un élu que d’être le vecteur, voire le soutien, d’un message explicitement idéologique sous couvert de création artistique ? ».
« Éric Piolle doit cesser cette dangereuse fuite vers l’ultra gauche », selon Alain Carignon
Pour le groupe d’opposition Société civile divers droite et centre conduit par Alain Carignon, les déclarations selon lesquelles “les musulmans sont les nouveaux juifs” sont également intolérables. « Ce révisionnisme de fait n’est pas acceptable. Personne ne peut assimiler aujourd’hui la situation des musulmans de France à la déportation des juifs et à la solution finale des nazis », affirme le groupe qui y voit une « banalisation », comme le président du Crif.
« Notre ville, avec les excès de Sciences Po, l’arrivée du nouveau mois de la honte, “le mois décolonial”, qu’Eric Piolle propose de subventionner au prochain conseil municipal, le débat sur le burkini dans l’espace public, est le théâtre de dérives de plus en plus inquiétantes, dont la municipalité par ses discours et ses actes est la première responsable », juge le groupe OSCDC.
Celui-ci appelle donc Éric Piolle à « cesser cette dangereuse fuite en avant vers l’ultra gauche ». Selon lui, le maire doit ainsi « mettre fin à sa volonté d’imposer une grille de lecture très minoritaire de l’histoire et de la société d’aujourd’hui qui ne correspondent aucunement au message universaliste dont notre pays est le porteur. »