FOCUS – (Nouvelle) polémique à Grenoble autour d’une œuvre de l’artiste « enragé » Goin. Le dessin d’une femme voilée portant une étoile jaune indiquant « Muslim » (« musulman » en anglais) indigne le président du Crif Grenoble-Dauphiné. Qui adresse une lettre à Éric Piolle pour lui demander de « faire retirer cette réalisation ».
AJOUT – Vendredi 4 février, le procureur de la République de Grenoble a indiqué avoir reçu le signalement du Crif Grenoble-Dauphiné, et ordonné une enquête pour « contestation de l »existence de crime contre l’humanité ». [encadré ajouté le 4 février 2022 à midi]
Une nouvelle polémique au palmarès de l’artiste Goin ? Après la fresque L’État matraquant la liberté, qui défraya la chronique en 2016, puis la représentation d’un policier avec une cagoule du Ku Klux Klan en 2020, c’est le dessin d’une femme voilée portant une étoile jaune qui provoque la colère du Crif. Le (tout nouveau) président du Conseil représentatif des institutions juives de France Grenoble-Dauphiné s’en est ainsi ému auprès du maire de Grenoble.
« Je vous demande de bien vouloir faire retirer cette réalisation, qui pourrait utilement être remplacée par une œuvre, de nature non à diviser mais à unir les communautés », écrit Hervé Gerbi à Éric Piolle, dans un courrier en date du 24 janvier 2022. Situé rue Hébert à Grenoble, à quelques pas du Musée de la Résistance et de la Déportation de l’Isère, le dessin a probablement été réalisé au mois de juillet 2021. Si l’on en croit la page Facebook de l’artiste.
« La banalisation, un premier pas vers l’oubli de la Shoah »
Intitulé Bad Religion ?, l’œuvre représente une femme portant le voile, dans une tenue dont les rayures rappellent celles des uniformes des déportés juifs par le régime nazi. Le personnage arbore de surcroît une étoile jaune, en tous points semblable à celle que devaient porter les Juifs dans les zones contrôlées par l’Allemagne durant la Seconde Guerre mondiale. Le tout avec la mention « Muslim » (« musulman » en anglais).
« On fait une analogie entre la situation de certains musulmans et les déportés [juifs] gazés par la suite. Ce n’est pas possible ! », s’indigne Herbé Gerbi auprès de Place Gre’net. Pour le président du Crif Grenoble-Dauphiné, une telle analogie ne peut que banaliser la réalité de la Shoah. « Et quand vous banalisez ce qu’est l’horreur de la Shoah, c’est le premier pas vers l’oubli. Et c’est une porte possible vers le négationnisme », analyse-t-il.
Deuxième sujet de colère ? Le titre même de l’œuvre et le singulier qu’elle emploie avec « Bad Religion » (« mauvaise religion »). « À partir du moment que vous interpellez sur une seule religion, vous laissez supposer qu’elle bénéficie de moins d’empathie que la cause juive », juge Hervé Gerbi. De quoi alimenter, à ses yeux, des clichés antisémites du type : « Qui détient les médias ? Est-ce qu’on en fait trop avec la Shoah ? »
« Nous verrons ce qu’il en est de la censure et de la liberté d’expression »
Pourquoi maintenant ? Le président du Crif Grenoble-Dauphiné reconnaît que l’œuvre n’est pas récente. Mais explique en avoir pris connaissance dernièrement, alerté par un membre de la communauté juive de Grenoble. Il est vrai que le dessin, situé dans un recoin relativement discret de la rue Hébert, ne saute pas aux yeux. Il n’en demeure pas moins « un message dans l’espace public », qu’Hervé Gerbi juge inacceptable.
Le contexte est d’autant plus tendu que le 26 janvier marque la Journée internationale à la mémoire des victimes de la Shoah. Et que le maire de Grenoble doit assister dimanche 30 janvier à la cérémonie du 77e anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz-Birkenau. Sollicités par Place Gre’net, les services de la Ville ont assuré qu’ils nous tiendraient informés de la réponse du maire de Grenoble au Crif Grenoble-Dauphiné.
Quid de Spacejunk Grenoble, porteur du Street Art Festival dans le cadre duquel l’œuvre a été réalisée, en “off”? Son fondateur Jérôme Katz se refuse à tout commentaire, si ce n’est : « Nous verrons ce qu’il en est de la censure et de la liberté d’expression ». Contacté via son site Internet, l’artiste « enragé » Goin n’a, pour l’heure, pas adressé de réponse à notre demande de réaction.
Une réflexion sur « « Banalisation de la Shoah » : le Crif Grenoble-Dauphiné indigné par une œuvre représentant une femme voilée portant l’étoile jaune »
L” art mensonger au service des politiciens …