FOCUS – Le démantèlement de leur installation sur le rond-point du Raffour indigne les gilets jaunes de Crolles qui y étaient installés depuis près de deux ans. Le maire de Crolles assume, au nom de l’interdiction d’occuper l’espace public, et plus encore par temps de Covid. Mais les gilets jaunes ont reçu le soutien d’un autre élu, sur Twitter. En l’occurrence, Éric Piolle, maire de Grenoble.
Ils occupaient le site depuis près de deux ans. L’installation des gilets jaunes sur le rond-point du Raffour à Crolles a finalement été démantelée mardi 10 novembre 2020. Un démantèlement largement relayé sur les réseaux sociaux, par le compte Action Crolles 38. « C’est un symbole qui tombe, une perte pour la collectivité et une honte pour les auteurs », écrivent les militants. Qui fustigent allégrement la municipalité de Crolles.
Les gilets jaunes n’ont pas l’intention de renoncer pour autant. Confinement ou pas, ils ont ainsi organisé une assemblée générale dans l’après-midi du 11 novembre, dans un lieu tenu secret. Avant de relayer, le matin du 12 novembre, une vidéo pour “célébrer” les deux ans du mouvement gilet jaune dans toute la France.
Philippe Lorimier assume le démantèlement
De son côté, Philippe Lorimier, maire PS (réélu) de Crolles, assume totalement sa décision de mettre fin à l’occupation du rond-point. Notamment, dans un courrier, en date du 6 novembre, adressé aux Crollois. L’élu y estime qu’il « convient désormais de respecter la loi, d’autant que les mesure sanitaires liées à la pandémie Covid interdisent les rassemblements sur l’espace public ».
L« édile précise à Place Gre’net avoir toujours cherché à maintenir le dialogue avec les gilets jaunes. « Je les ai reçus de façon régulière, on leur a mis des salles à disposition, mais aujourd’hui se pose la question de l’occupation permanente de l’espace public », juge Philippe Lorimier. Pour qui le rond-point commençait à prendre « une connotation de ZAD ». « Je ne peux pas continuer à le tolérer ! », estime donc l’élu. Qui appelle les gilets jaunes à « faire société et rentrer dans un processus plus conventionnel de contestation ».
Sans surprise, les gilets jaunes de Crolles ne l’entendent pas de cette oreille. « Pourquoi une telle haine face à quelques dizaines de personnes qui avaient retrouvé là une fierté, des femmes et des hommes qui occupaient et entretenaient pacifiquement quelques mètres carrés au bord d’une route ? », interrogent-ils sur les réseaux sociaux. Non sans accuser Philippe Lorimier de trahir son étiquette socialiste.
Éric Piolle en soutien aux gilets jaunes de Crolles
Les gilets jaunes crollois ont toutefois reçu un soutien inattendu, en la personne d’Eric Piolle. « J’apprends aujourd’hui le démantèlement du rond point des gilets jaunes de Crolles, affirme ainsi le maire de Grenoble sur Twitter, le jour même de l’opération. Il était devenu la maison de famille de celles et ceux qui n’en ont pas, et qui endurent sans plier la pression néolibérale depuis des décennies. Les débats y étaient vifs. Et les repas généreux. »
Un message diversement apprécié par les internautes. Dont plusieurs se sont déchaînés, Twitter oblige, en réponse. Parmi les amabilités : « Quelle honte d’écrire ça pour un élu », « Un Maire qui soutien le squat des rond points par des gens complètement à la dérive », « C’est le résumé de vos actions sociales, une baraque en bois sur les ronds points ? ». Sans oublier des appels (ironiques) à accueillir les mêmes gilets jaunes sur la commune de Grenoble.
Quant au maire de Crolles, s’il se dit « surpris d’une remarque sur un territoire à la fois proche et distant », il voit avant tout dans le message du maire de Grenoble des visées électoralistes. « C’est peut-être un renvoi d’ascenseur à monsieur Julien Terrier, qui a soutenu sa candidature », laisse-t-il entendre. Un soutien qui, du reste, n’avait pas été apprécié par tous les gilets jaunes de Grenoble.
Reste que le message d’Éric Piolle passe mal auprès de Philippe Lorimier. « Je ne me permettrais pas de critiquer Éric Piolle sur sa politique locale vis-à-vis de Grenoble », lance-t-il… avant de finalement se le permettre. Et de moquer ainsi, pour exemple, la ferme urbaine de Grenoble, qui « sert essentiellement des magasins bio et des Amap ». « Je pense qu’il y a une faible proportion de gilets jaunes dans ces boutiques », s’amuse ainsi le maire de Crolles.