FOCUS - Avec la constitution de son exécutif, la Métropole de Grenoble a mis (au moins provisoirement) fin à plusieurs semaines d'instabilité institutionnelle. Dans les intercommunalités qui la jouxtent, les présidents ont tous été élus pour leur part au mois de juillet 2020. Le point sur les basculements et nouvelles forces en présence pour y voir plus clair dans ce nouveau paysage politique.
Cette fois, ça y est. Après de longues tractations de couloir, la Métropole de Grenoble dispose enfin d'un exécutif au complet. Le conseil métropolitain du vendredi 28 septembre a en effet permis – provisoirement – une réunification des forces de gauche. Un accouchement dans la douleur aussitôt suivi pas un coup de théâtre, des écologistes et l’Ades ayant, contre toute attente, maintenu des actions en justice contre Christophe Ferrari, président de la Métro.
Un psychodrame politique qui contraste fortement avec les intercommunalités environnantes. Qui, toutes, avaient élu plus ou moins sereinement leur président et équipe depuis le mois de juillet.
L'Isère compte à ce jour 18 intercommunalités: trois communautés d'agglomération, quatorze communautés de communes et une Métropole. Des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de taille et longévité variables. La Métropole grenobloise partage ses frontières avec huit d'entre elles. Et entretient des liens privilégiés avec certaines, dont le Grésivaudan et le Pays voironnais, notamment au sein du Syndicat mixte des mobilités de l'aire grenobloise (Smmag).
Grésivaudan: une unanimité contrastée
Contrairement à la Métropole, la communauté de communes du Grésivaudan et celle du Pays voironnais ont changé de président à l'occasion des élections de 2020. Dans le Grésivaudan, Thierry Gimbert a ainsi choisi de laisser la main. Son successeur, Henri Baile, par ailleurs maire de Saint-Ismier, a été réélu dès le premier tour avec une avance (très) confortable le 15 mars 2020.
Sur le papier, rien ne semblait devoir faire obstacle à l'élection d'Henri Baile à la présidence de la communauté de communes. Jusqu'au bout, l'élu sera même présenté comme seul candidat à la succession de Thierry Gimbert. Il pouvait compter derrière lui le soutien de conseillers communautaires de droite comme de gauche. Et ceci malgré une sensibilité politique qui penche nettement plus en faveur du camp des Républicains.
Une unanimité pourtant battue en brèche par EELV, le PCF et Génération.s. "Un seul candidat ne peut constituer une offre démocratique", ont protesté les partis dans un communiqué commun.
Le tout avec des accents... furieusement grenoblois, lorsque la proximité d'Henri Baile avec Alain Carignon a été évoquée. Proximité également soulignée alors par un mystérieux "Grési collectif", contextualisations historiques et citations de la presse à l'appui.
Au final, Henri Baile verra une candidate s'opposer à lui, en la personne de Nelly Gadel, élue de Crets-en-Belledonne. Qui ne manquera pas d'égratigner le futur président durant sa prise de parole. Pas de quoi inquiéter le favori, dont le discours de candidature ressemblait fortement... à un discours de victoire. Une intervention de plus de quarante minutes qui a mis en avant le besoin de rassemblement et l'urgence écologique. Son opposante obtiendra tout de même 16 voix, contre 48.
Le changement de présidence du Grésivaudan change-t-il la donne dans ses relations avec la Métropole? Rien n'est moins sûr. Si Henri Baile est de sensibilité différente de son prédécesseur, ses vice-présidents ont été piochés dans les rangs de la droite comme de la gauche, au grand dam d'EELV et du PCF. Et le nouveau président de l'affirmer: "Je préfère le bon sens et la raison pour agir plutôt que l'idéologie qui égare et qui nous éloigne des réalités".
Pas de ville-centre présidente non plus au Pays voironnais
Changement de présidence aussi du côté du Pays voironnais. Après deux mandats à la tête de la communauté d'agglomération, Jean-Paul Bret a, lui aussi, pris la décision de raccrocher. Y compris de son mandat de maire, et pour cause: la commune du Pin (1250 habitants), dont il était l'édile depuis 1989, n'existe plus. Fusionnée avec Paladru en 2017, elle est désormais un secteur des Villages-du-Lac-de-Paladru.
L'élu a laissé derrière lui un duel entre deux de ses anciens vice-présidents : Julien Polat, maire de Voiron, et Bruno Cattin, maire de Voissant. Des similitudes avec la Métropole? Tout comme le grenoblois Yann Mongaburu, Julien Polat représente la “ville-centre”. À un léger détail près, puisque l'élu de 35 ans apparaît comme une figure montante de la droite iséroise. Et occupe, en outre, une vice-présidence au Département de l'Isère.
Autre similitude : tout comme à la Métropole de Grenoble, la ville-centre ne remportera pas la présidence... mais ne sera pas passée loin. Bruno Cattin devance en effet son adversaire de deux voix seulement : 32 voix, contre 30 pour le maire de Voiron.
De quoi amener le nouveau président à avoir "une pensée pour Julien Polat"... et à lui proposer une place dans l'exécutif. En l'occurrence, le poste de troisième vice-président en charge de l'Économie et du Développement des activités non délocalisables.
Pas de protestation côté EELV cette fois. Et, au contraire, un satisfecit. Le parti écologiste salue en effet la nomination de Nadine Reux en tant que première vice-présidente à la Transition écologique. "Confier la transition écologique à la première vice-présidente, c'est marquer symboliquement l'importance de la question écologique dans l'élaboration et la mise en œuvre des politiques", salue le parti. De quoi rassurer pour des collaborations futures?
Du renouveau côté Oisans, Chartreuse et Matheysine
Quid des autres intercommunalités frontalières? Le changement de présidence a encore été de mise dans l'Oisans, la Matheysine et au sein de la communauté de communes Cœur de Chartreuse. Côté Oisans, peu de surprise: Guy Verney était seul candidat à la succession de Christian Pichoud. Avec quarante voix en sa faveur, et quatre bulletins blancs, le maire de Bourg-d'Oisans a accédé sans mal au poste de président.
La communauté de communes Cœur de Chartreuse a, de son côté, élu Cédric Vial à sa présidence. Avec 28 voix, le maire des Échelles devance largement les huit bulletins obtenus par sa concurrente Martine Machon.
Il succède ainsi à Denis Séjourné, ancien maire d'Entre-Deux-Guiers. Qui n'a pas souhaité renouveler son mandat pour mieux se consacrer à son entreprise de coaching professionnel, comme le rapportait Le Dauphiné libéré.
Dans la Matheysine, la situation est différente. Le président sortant, Joël Pontier, briguait bel et bien un nouveau mandat. Le maire de Nantes-en-Ratier n'a visiblement pas convaincu: son concurrent, Éric Balme, maire de Saint-Pierre-de-Méaroz, a obtenu 45 voix... contre 8 pour son prédécesseur. Le nouveau président a eu les coudées franches pour imposer un exécutif resserré, composé de huit vice-présidents.
Trièves et Vercors : deux intercommunalités qui gardent leurs présidents
Enfin, certaines intercommunalités ont choisi de maintenir leurs présidents en place. C'est le cas du Trièves, où Jérôme Fauconnier a remporté les suffrages des conseillers communautaires. Victoire aisée au demeurant, puisque le maire d'Avignonnet était le seul candidat à sa succession. Ce qui ne l'a pas empêché de remanier en profondeur la liste de ses vice-présidents, pour n'en garder qu'un seul de la précédente mandature.
Réélection aussi pour Frédéric De Azevedo à la présidence de la communauté de communes Saint-Marcellin Isère Vercors Communauté. Malgré la candidature, inattendue, d'un opposant en la personne de Jacques Lascoumes, le maire de Saint-André-en-Royans a remporté sans difficulté les suffrages. Et nommé un exécutif de 11 vice-présidents, contre 15 précédemment.
Reste la CC du Massif du Vercors, où Franck Girard-Carrabin rempile pour un second mandat de président. Le maire de Saint-Nizier-du-Moucherotte avait pris son poste en 2016, succédant à un Pierre Buisson démissionnaire pour cause... d'un certain épuisement. Face aux réformes territoriales et la difficulté de trouver le consensus autour de leur application. Preuve que la Métropole n'est pas seule à naviguer dans des eaux parfois houleuses.
Florent Mathieu